Accueil > Le Mag > Les formations et les métiers du luxe durable sont à la mode

En d’autres temps, les puristes auraient crié au sacrilège. Comment associer le Luxe et la mode, même dans un dossier consacré aux métiers et aux formations durables qui y mènent ?

Le luxe, c’est la qualité pérenne, le savoir-faire ancestral, l’innovation créative, la transgression raisonnable, l’époustouflante expérience, l’intime exclusivité, le superflu incontournable, la rareté dispendieuse (parfois à des prix que l’élégance dicte de taire).

Quand la mode s’inscrit dans l’innovation perpétuelle et le renouvellement systémique, aux tarifs les plus justes. Jusqu’à ces phénomènes que l’on nomme fast, voire ultra fast fashion et qui sont aussi durables qu’un jet privé en vol ou qu’une paire de chaussures en cuir de python peut l’être.

jet privé
Pourtant, le secteur du Luxe a bel et bien entamé sa mue. Il s’est « modisé », comme le dirait Sophie Abriat. Les grandes Maisons ont non seulement progressivement augmenté le nombre de leurs collections mais elles ont aussi et peut-être surtout envahi des sphères que l’on pouvait penser préservées.

Arts, culture, voyage, gastronomie, décoration intérieure… rares sont les territoires du quotidien et les espaces publics que le Luxe n’a pas préemptés pour la mise en scène de ses marques et produits. Une « extension du domaine du luxe » comme la qualifie la journaliste de M Le Monde.

Exemple ? En juin 2023, les parisiens ont pu apercevoir, de loin et coincés dans les embouteillages, Rihanna, Beyoncé, Omar Sy et Paul Pogba arpenter gaiement le Pont Neuf, privatisé pour l’occasion, aux côtés des quelques 2000 invités de la maison Louis Vuitton (LVMH).

Les grandes maisons ont remisé la discrétion qui les animait et fondait jadis leur ADN pour leur substituer une cacophonie débridée.

Les marques de luxe sont désormais comme ces enfants auxquels les parents ne prêtent pas assez attention. Alors elles multiplient les occasions de se montrer : elles s’érigent au Pont Neuf, surgissent au Louvre, s’exposent à Versailles, défilent aux Césars… ou s’affichent avec Penélope Cruz et Brad Pitt dans un film hommage à la nouvelle vague. Et le font savoir.

La vente des produits n’est plus que l’ultime et futile étape d’un processus bien plus sophistiqué qui consiste à enchanter la vie et le monde en puisant dans l’héritage et l’histoire de la marque et en s’appropriant les codes de l’art et de la culture qui la servent.

En trente ans, le luxe est sorti des salons feutrés de la haute couture, des vitrines et des magazines pour investir des territoires inattendus. Les marques ont considérablement agrandi leur périmètre d’action, créant des objets et des expériences qui vont bien au-delà de leur cœur de métier traditionnel : le prêt-à-porter et la maroquinerie. En langage marketing, on parle d’une extension des marques dans des marchés connexes. Aujourd’hui, tout est potentiellement « luxifiable ».

Sophie Abriat • Danser sur le volcan – La mode et le luxe à la conquête de nos imaginaires •  Editions Grasset

couverture livre Danser sur un volcan
Autre tendance notable : les acteurs de la mode et du luxe s’efforcent de verdir leurs activités. Climat, biodiversité, pollutions, ressources… Ils ont acté les dérèglements en cours et tentent, pas tous et pas de la même façon, d’améliorer leurs pratiques.

Sans pour autant remettre en question le totem du « renouvellement permanent des collections et (de) l’incitation à consommer » le précise Julia Faure dans l’entretien que la dirigeante de Loom, présidente de En Mode Climat et co-présidente du Mouvement Impact France nous a accordé.

Ce nouveau dossier dédié aux secteurs du luxe, mais aussi de la mode, s’inscrit dans le prolongement des précédents articles consacrés aux formations et aux métiers « éthiques » ou « responsables » qui visent à éclairer et à faciliter les choix d’orientation des jeunes générations.

voyage de luxe
gastronomie de luxe
costume de luxe sur mesure
joaillerie luxe

L’habit ne fait pas le luxe

Nous ne ferons pas ici la généalogie du Luxe et de la mode. Les ouvrages sur le sujet abondent et les explications diffèrent selon les auteurs et leurs points d’ancrage historiques.

Le luxe change de caractère avec chacune des grandes phases de l’état social.

Henri Baudrillart (1821/1892) – Histoire du luxe privé et public, depuis l’antiquité jusqu’à nos jours.

Le luxe sous l’antique Athènes n’a plus grand chose chose à voir avec celui des empires de Bernard Arnault ou de François-Henri Pinault.

Alors au mieux tenterons-nous d’en dessiner les contours et les principales caractéristiques. Sans prétention d’exhaustivité.

La France a inventé un modèle original de développement de la créativité s’appuyant sur un fort patrimoine culturel et institutionnel – le modèle de la mode aristocratique incarné par la Maison de Haute Couture. Mais l’heure est au luxe marchand, mondialisé et de masse. C’est alors la confrontation entre ce modèle et les exigences nouvelles de l’intégration par les groupes financiers des industries du luxe qui est mise au cœur des soubresauts contemporains de la mode.

femme robe rose luxueuse
Intéressante introduction que celle offerte il y a 20 ans par Christian Barrère et Walter Santagata dans leur ouvrage « La Mode. Une économie de la créativité et du patrimoine à l’heure du marché », pour comprendre les enjeux schizophréniques du secteur.

La tentation est grande d’opposer d’un côté les zélateurs d’un luxe créatif porté par la Haute couture et inspiré par les arts et la culture, aux impératifs mercantiles mâtinés de somptueuses messes sponsorisées par les grands groupes financiarisés de l’autre.

Définir le luxe sans tomber dans les clichés, comprendre ses ramifications et ses extensions, appréhender ses modalités de fonctionnement et de développement s’avèrent bien plus complexe.

Luxe et littérature, un lien cousu de fil blanc !
Fascination, marqueur social, excès, décadence, critique, détestation… le thème du luxe a largement été abordé dans la littérature.

Dans Bel ami, Maupassant dresse une critique acérée des élites et de leur obsession pour l’apparence.

Émile Zola révèle la corruption, l’arrivisme, la spéculation… des élites de la haute bourgeoisie dans « L’Argent ». La démesure et l’exubérance dans La curée.

Honoré de Balzac aussi dans ses Splendeurs et misères des courtisanes.

Dans Madame Bovary, Gustave Flaubert dépeint le luxe comme un fantasme, un refuge illusoire.

Plus tard, Raymond Radiguet rendra compte d’un luxe discret, reflet des contradictions bourgeoises dans Le diable au corps; et d’un luxe mondain, théâtre des illusions sociales dans Le bal du comte d’Orgel.

Il entra dans l’appartement somptueux où les tentures de soie, les meubles anciens, les tapis épais et les bibelots précieux respiraient cette opulence discrète qui distingue la vraie richesse. Il marcha lentement, touchant du bout des doigts les étoffes, s’arrêtant devant un vase de Saxe ou une pendule en bronze doré, le cœur battant de ce désir ardent d’appartenir à ce monde éclatant ».

Guy de Maupassant • Bel ami

Le marché du Luxe a su tirer son épingle du jeu

Le luxe est une notion plurielle et évolutive, qui varie selon les cultures, les époques, les perceptions et les partis-pris partisans.

Il concerne des secteurs, des activités et des savoir-faire diversifiés – joaillerie, cosmétiques, maroquinerie, horlogerie, gastronomie, tourisme, immobilier… – avec une certaine porosité si l’on en juge par les « innovations » mises en oeuvre : restaurants Yves Saint Laurent, Prada, Armani, café Dior, Spa et librairie Chanel, hôtel Bulgari…

Il touche aussi des publics ô combien différents, que les marques veillent à satisfaire selon leurs envies et surtout leurs moyens : accessoire Vuitton pour les moins nantis, sac éponyme sensiblement plus onéreux pour les autres.

femme dans une baignoire jaune
Quel que soit le segment de clientèle ciblé, l’article de luxe tient sa légitimité de la marque, de la griffe, du Directeur Artistique… qui lui sert de caution ombrelle. Avec le concours indispensable de l’Expérience qui lui est associée : packaging, accueil en boutique, scénarisation de la vente, services, communication…

De la même façon, les boîtes de savon Brillo et de soupe Campbell ne relèvent de l’art que lorsque Warhol s’en saisit afin de révéler la banalité qui se cache derrière une marchandise séduisante par la grâce du marketing.

Par ailleurs, le Luxe est une notion ambivalente qui permet de considérer que le privilège d’un café au chevet d’un soleil qui s’éveille est presqu’aussi désirable que la possession d’un yacht ou d’une Aston Martin. Presque.

Elitisme et banalisation fluctuent au gré des perceptions et des usages.

Enfin, le luxe admet cette forme de perversion qui consiste à estimer que la « nécessité » du luxe est affaire de condition sociale : superflue pour certains car inutile, enviable ou indispensable pour d’autres car constitutive d’un statut particulier d’émancipation, de distinction, de singularité dont la rareté et l’authenticité sont le dénominateur commun et le prix le pré-requis.

La magie de la mode n’est rien d’autre qu’une forme de violence symbolique contribuant à la reproduction de l’ordre social et des positions de dominants et de dominés.

Marc Abélès • Un ethnologue au pays du luxe

Malgré l’hétérogénéité axiologique du luxe, les multinationales concernées partagent quelques points communs.

Les chiffres du Luxe sont sur leur 31
  • Le marché du Luxe couvre une dizaine de secteurs très différents : Mode et accessoires, Joaillerie et horlogerie, Beauté et parfumerie, Automobile, Hôtellerie et voyages,, Vins, spiritueux et gastronomie, Immobilier, Arts et objets de collection…
  • Les métiers de la filière Mode & Luxe incluent : Bijouterie, Joaillerie, Horlogerie, Arts de la table, Textile, Couture, Habillement, Tannerie-Mégisserie, Maroquinerie, Chaussure.
  • En 2022, le marché mondial du luxe a atteint un chiffre d’affaires de 1 300 milliards d’euros (forbes.fr)
  • La valeur du marché mondial des biens personnels de luxe est passé de 76 milliards d’euros en 1996 à 349 milliards d’euros en 2022 (statista).
  • Les dépenses sur ce marché pourraient atteindre 2 500 milliards d’euros en 2030, avec une valeur des produits de luxe personnels estimée entre 540 et 580 milliards d’euros, soit le double de 2019. (journalduluxe.fr)
  • La performance des groupes français : LVMH, Kering, Hermès et L’Oréal ont enregistré des augmentations significatives de leurs ventes, avec des croissances respectives de 23%, 27%, 38% et 14% (esg-luxe.com)
  • Sur les quelques 230 entreprises du Luxe dans le monde plus de la moitié sont françaises.
  • La France est le 1er acteur mondial de la mode et du luxe; elle génère 615 600 emplois (directs et indirects), 154 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 25 % des ventes mondiales sont réalisées par des entreprises françaises (entreprises.gouv.fr)

L’or, j’adore !

Le luxe, à l’image de ses clients, ne connaît pas la crise. Il se gausse des coronavirus et des conflits géopolitiques avec l’imperturbable élégance d’un palace parisien. Entre 2019 et 2023, la croissance annuelle des entreprises du luxe flirtait avec les 5%. Encore qu’il s’agisse d’une moyenne : la maison Hermès a enregistré quant à elle une croissance en hausse de 21% et une rentabilité de 42%.

Et malgré une année 2024 moins glorieuse (2%) et des prévisions comparables pour 2025 dues en partie à l’essoufflement du marché chinois, certains prédisent au secteur des records à l’horizon 2030 (entre 8 et 10%).

Cette croissance de l’activité va de paire avec celle de la rentabilité. LVMH, L’Oréal, Hermès, Kering… sont régulièrement dans le top 10 des groupes les plus performants du CAC40. Des résultats qui s’accompagnent de dividendes versés records (6,85 milliards de dollars pour LVMH en 2023) et dont se félicitent les actionnaires.

bouteille de champagne

(…) Ce qui distingue enfin l’industrie du luxe, c’est sa capacité à imposer ses prix. À la limite, plus c’est cher, plus c’est distinctif, et plus c’est demandé. Il n’y a pas de risque de concurrence par les prix, sauf évidemment la contrefaçon. D’où les taux de profitabilité importants que l’on constate par rapport à d’autres secteurs.

Olivier Petitjean • multinationales.org • Lire l’entretien

Les observateurs un tantinet taquins se demanderont s’il ne serait pas plus utile d’utiliser ces subsides pour investir davantage dans le développement durable ? Des ignorants qui n’entendent rien aux subtilités de l’analyse financière.

Aujourd’hui, la communication financière autour des résultats trimestriels est devenue un exercice absolument déterminant. Il ne suffit plus d’atteindre les prévisions : il faut les surpasser, sous peine de subir une correction brutale en Bourse.

Explique Eric Briones dans un article du Journal du Luxe de février dernier.

Peut-être davantage que d’autres pans de l’économie, le luxe est attendu au tournant de ses résultats. A force d’enchaîner les records, les spécialistes s’attendent à de nouveaux dépassements. Les actionnaires sans doute aussi.

Le commerce du luxe est aujourd’hui celui qui engendre les profits les plus spectaculaires, et il a connu ces vingt dernières années une croissance exponentielle. Le luxe semble incarner le triomphe du matérialisme, avec l’exaltation et l’ostentation de la richesse. Au luxe, on associe la dépense, l’excès, la transgression.

Communications, n° 111. L’État du luxe • Editions du Seuil • 2022

Satisfaire l’actionnariat, rassurer les clients quant à la qualité des produits, des expériences et des services qui leur sont attachés, tenir compte de leurs aspirations environnementales et sociales… requièrent des talents d’équilibriste qui passent en partie par la capacité de ces entreprises à se réinventer pour demeurer désirables.

ENTRETIEN AVEC OLIVIER PETITJEAN (MULTINATIONALES)

Entretien avec Olivier Petitjean, journaliste, cofondateur et coordinateur de l’Observatoire des multinationales. Il a co-dirigé avec Ivan Duroy, la publication de Multinationales – Une histoire du monde contemporain, publié aux Editions de la Découverte.
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Comment s’articulent les 800 pages de votre ouvrage Multinationales ?

couverture du livre MultinationalesLe livre suit un ordre chronologique, de 1851 à 2025. Il est construit autour d’environ soixante grandes dates emblématiques, qui font l’objet d’articles écrits par des universitaires ou des journalistes.

Ces chapitres sont complétés par des récits ou des portraits plus courts. Nous avons essayé de couvrir tous les secteurs et tous les pays, tout en donnant à voir un mouvement d’ensemble. Le livre permet de comprendre l’origine et l’histoire de certaines des multinationales que nous connaissons tous aujourd’hui : Nestlé, Coca-Cola, TotalEnergies, Bayer, Google, Carrefour, etc.

Mais c’est aussi et surtout un livre sur les multinationales dans leur ensemble, comme un nouveau type d’acteur économique et plus qu’économique à l’échelle mondiale, et sur les débats et les résistances qui ont accompagné leur essor.

Ce que ce livre raconte au fond, c’est comment les multinationales en sont venues à occuper progressivement tous les aspects de notre vie quotidienne, ce qu’on voit bien avec l’envahissement du numérique aujourd’hui.

Au-delà de cet ordre chronologique, il y a évidemment de nombreux effets de résonance au cours de cette histoire, des débats ou des acteurs qui reviennent. Nous avons intégré un système de renvois et un index qui permettent de naviguer autrement dans le livre. Celui-ci est assez épais et peut paraître impressionnant, mais il a été conçu pour pouvoir aussi être « picoré », et pour être accessible à un vaste public.

Certains chapitres abordent l’industrie du Luxe (« Hennessy et la mondialisation du luxe », « Christian Dior et la renaissance de l’industrie française du luxe »…). Que faut-il en retenir ?

D’abord que c’est une industrie qui s’est très tôt internationalisée. En un sens le luxe est le pionnier de la mondialisation : à une époque où le transport était plus lent et plus cher, il ne concernait que des marchandises qui en valaient vraiment la peine.

Très tôt, ces premières maisons de luxe ont été confrontées à des enjeux de préservation de leur marque, de garanties de qualité, de lutte contre la contrefaçon.

Elles ont inventé à la fois le marketing et le contrôle produit. C’est ce que raconte le chapitre sur Hennessy.

Pour autant, les maisons de luxe ne sont devenue des multinationales « comme les autres » que lorsqu’elles ont cherché à cibler aussi un public plus large à travers des gammes de produits plus diversifiés portant leur griffe : parfums, lignes de prêt-à-porter, mais aussi sous-vêtements, lunettes de soleil et parfois sièges de voiture.

On peut dire que c’est Christian Dior, à travers son association avec l’industriel du textile Marcel Boussac, qui a été le pionnier de cette manière de faire. Il a été un innovateur en matière de mode vestimentaire, mais aussi en matière économique.

C’est sur cette base que se sont construits les groupes de luxe que l’on connaît aujourd’hui. L’association Boussac-Dior est le fondement sur lequel s’est construit LVMH.

Plus globalement les multinationales du luxe ont-elles des caractéristiques et des trajectoires comparables à celles d’autres secteurs ?

On peut dire qu’il y a grosso modo quatre grands types de multinationales :

  1. celles qui se construisent autour d’un secteur d’activité, à l’image de TotalEnergies ou de Sanofi qui contrôlent toutes les étapes de la production et la vente d’énergie ou de médicaments,
  2. celles qui se construisent autour d’une technologie (comme les GAFAM aujourd’hui),
  3. celles qui sont des places de marché (comme la grande distribution et de plus en plus également les GAFAM),
  4. et enfin les conglomérats qui se construisent en rassemblant un certain nombre de marques. C’est un modèle commun à l’industrie agroalimentaire ou des boissons, où une poignée de groupes sont derrière la plupart des marques que vous trouvez en supermarché, et à l’industrie du luxe.

Ce qui caractérise beaucoup de multinationales aujourd’hui, comme Apple ou Nike par exemple, c’est d’être à la tête de grandes chaînes d’approvisionnement mondialisées, où les matières premières sont sourcées aux quatre coins du globe, où une grosse partie de la production est sous-traitée, et où à la limite dans la multinationale elle-même on ne garde que le design et le marketing, tout en se réservant l’essentiel des profits issus des ventes.

Il y a eu des analyses sur la part du prix d’une basket Nike par exemple qui revenait aux ouvriers au Pakistan qui l’avaient fabriquée – c’est de l’ordre 2%, tandis que Nike garde 25% sous la forme de profit même après avoir payé toute la publicité, les taxes, les matières premières, le transport, la commercialisation.

Avec une multinationale comme LVMH ou Kering, on est encore loin de ce modèle mais on flirte avec sur certains produits.

Ce qui distingue enfin l’industrie du luxe, c’est sa capacité à imposer ses prix. À la limite, plus c’est cher, plus c’est distinctif, et plus c’est demandé. Il n’y a pas de risque de concurrence par les prix, sauf évidemment la contrefaçon.

D’où les taux de profitabilité importants que l’on constate par rapport à d’autres secteurs.

Vous pointez du doigt les ravages, notamment sociaux et environnementaux, dont les multinationales sont responsables. Impacts auxquels n’échappent par les industries du Luxe. Les efforts entrepris par certains grands groupes dans ce secteur (réduction des émissions carbone, utilisation de matières premières durables, traçabilité des approvisionnements…) vous paraissent-ils aller dans le bon sens ?

Ce serait difficile de dire que ça va dans le mauvais sens. Mais le problème est qu’on se heurte à des réalités physiques.

On aura beau remplacer les ampoules, passer à l’énergie renouvelable, porter plus de soin aux matières premières, tant que ces groupes restent sur un modèle où l’on vise à vendre toujours plus de produits matériels, leur impact environnemental global et leurs émissions de gaz à effet de serre ne peuvent qu’augmenter.

Cela vaut pour les groupes de luxe comme pour les autres.

C’est un enjeu auxquels nous sommes tous confrontés : les multinationales ont rendu notre vie plus confortable à bien des égards en nous inondant de biens matériels, mais aujourd’hui on se heurte à des limites.

On pourrait penser que les groupes de luxe seraient les mieux placés pour promouvoir des formes de consommation qui soient moins basées sur le « toujours plus », mais sur la qualité et l’authenticité, mais je n’ai pas l’impression que ce soit la stratégie retenue à ce stade par les conglomérats qui contrôlent les marques.

Olivier Petitjean Multinationales

La désidérabilité sous toutes les coutures.

Le terme figure jusque dans les rapports financiers annuels des multinationales du secteur.
Luxe et désir sont indissociables, bien que le second ne suffise pas à caractériser entièrement le premier.
Ce n’est pas un hasard si dans le prix d’un produit de luxe, la part consacrée aux « efforts de désidérabilité » est largement supérieure à son coût de production.

Dans cet univers, le jus lui-même constitue moins de 10 % du tarif du flacon payé en boutique. Souvent même 5 %.

Philippe Benacin, PDG d’Interparfums • Le Monde • 2019

Selon lui, « le coût se répartit entre 50 % pour le distributeur (Sephora, Marionnaud…), 30 % en dépenses de publicité et marketing et 20 % en fabrication du produit (ce qui inclut notamment le jus, le flacon, l’emballage) ».

Reste que le désir, aussi raffiné et sophistiqué soit-il, disparaît après l’achat. Un coït fastueux et néanmoins interrompu à l’issue de l’effort financier conséquent produit. Cette désirabilité,  les grandes marques doivent impérativement l’étoffer, la sublimer, la renouveler pour séduire à nouveau leurs clients.

Le désir est à la marque ce que l’or est à la monnaie : un étalon, une référence. La marque de luxe doit nourrir et préserver ce qui fonde sa désidérabilité, car elle est un levier d’achat et une garantie de sa profitabilité, seul et unique enjeu de l’entreprise qui la commercialise.

Et l’ADN d’une marque de luxe forte et désirable repose sur les fondamentaux déjà cités : qualité des matières, créativité, innovation, savoir-faire, expérience…
Socles que le marketing tend à valoriser auprès d’une clientèle exigeante, prospère et néanmoins restreinte.

femme shopping luxe
parfum chanel
Les clients du luxe sont estimés à 400 millions dans le monde. Ils ont plus que triplé en l’espace de 20 ans. Le nombre de milliardaires aussi a progressé, passant d’à peine 480 en 2000 à près de 2700 aujourd’hui. Tout comme les mensurations de leur fortune, qui ont fait un bond de 2000 milliards de dollars en 2024 selon Oxfam.

Ces clients sont les premiers contributeurs de cette économie.
Et les principaux responsables de ses conséquences délétères sur l’environnement.

La bonne nouvelle, c’est que plus on est riche, plus il est facile de réduire ses émissions. Les émissions de carbone des 1% les plus riches proviennent principalement de biens de luxe et non essentiels.

Alexandre Poidatz, responsable de campagne Climat et inégalités chez Oxfam France

ENTRETIEN AVEC ARIELLE LEVY (UAMEP)

Entretien avec Arielle Lévy, présidente et membre du conseil d’administration du collectif Une Autre Mode Est Possible (UAMEP).

Quelle est la raison d’être du collectif Une Autre Mode Est Possible et quels sont ses leviers et modalités d’action ?

Face aux enjeux sociaux-environnementaux de la filière textile, Une Autre Mode est Possible (UAMEP), association d’intérêt général s’engage depuis 7 ans pour sensibiliser et accompagner les changements de comportements pour réduire les déchets textiles, la destruction des écosystèmes et donner des clés concrètes pour faire durer ses vêtements (éco-conception, tri, réparation / transformation qui passe par une approche artistique, low tech et qualitative).

A l’instar de Kering, qui compte parmi les adhérents accompagnés par la Fédération de la mode circulaire, de nombreuses entreprises du Luxe tendent vers une amélioration de leurs pratiques (programme « Brand Approved » d’Alexander McQueen, emploi de matières recyclées et biosourcées chez Louis Vuitton, collaborations Gucci, Chloé, Burberry et Isabel Marant avec Vestiaire Collective…). Quel regard portez-vous sur les efforts entrepris par les grandes maisons de la mode et du luxe pour être plus durables ?

Le luxe maintient des emplois, préserve des savoir faire, et je trouve que les collections retrouvent un degré d’exigence, de créativité, voire d’audace quelles que soient les maisons. On ne peut que s’en réjouir.

On voit d’ailleurs que le management intègre le collectif comme ce fut le cas dans l’après Lagerfeld et aujourd’hui engage des DA souvent moins bling bling, plus en lien avec notre époque, venant souvent de l’école du design qui questionnent notre époque. C’est une nécessité.

Pour des groupes comme Kering, nous sommes face à la nécessité de transformer leur business modèle.
Il s’y emploient tout en ne perdant pas de vue qu’ils doivent maintenir leurs parts de marché.

Leur priorité est de construire leur nouvelle chaîne de valeur en particulier en renforçant leur traçabilité, ce qui passe en effet par un gros travail sur le sourcing et la recherche de matières.

Le deuxième enjeu pour les groupes de luxe est de consolider leur discours narratif en valorisant leur travail sur les savoir-faire, la traçabilité et leur engagement pour la biodiversité, le respect du vivant par exemple en développant des alternatives au cuir traditionnel.

Leur expertise en terme de recherche matières, de mesure d’impact et de marketing est incontestable d’autant qu’ils doivent séduire une génération cosmopolite qui recherche aussi l’expérience client et affirme ses valeurs. Leur défi est bien de maintenir leurs parts de marché en produisant moins et de manière plus durable.

Parallèlement, le luxe devient un art de vivre et le service redevient central comme on peut le voir dans les boutiques Hermès (café, réparation, personnalisation…).

La rentabilité reste un facteur clef tout comme la scalabilité car il est lié à la recherche de toujours plus de clients et de valeur financière.

Je questionne ce modèle à l’heure où nous avons atteint la 7ème limite planétaire et que des tensions planétaires menacent le vivre ensemble.

Difficile de penser uniquement à son bien être matériel sans mesurer notre rapport à l’autre.

Quels sont selon vous les métiers d’avenir de la mode responsable ?

Avant de parler de métiers d’avenir de la mode responsable, nous devons parler de vision pour la mode responsable.

Il y a une deuxième voie, celle à taille humaine, plus sociale qui questionne notre modèle actuel de la SCALABIITE. Je pars du principe que nous devons changer de posture globale et donc sociétale. L’objectif est de se reconnecter au vivant, de ralentir et de faire société en créant du lien localement sur nos territoires. C’est à dire travailler le plus possible en local.

Les déchets ou ressources locales sont transformés localement et distribués localement. La collaboration entre acteurs exige dès lors une gouvernance circulaire sur le territoire.

Vision macro mais action locale. Les services sont essentiels et on doit recréer du lien social, questionner notre rapport au travail, à la productivité. L’ess n’est plus un concept mais une réalité, un mode de vie : la quête du bien être individuel et collectif est l’objectif numéro.

Le fameux why. C’est dans cette optique que UAMEP s’est inscrit dans un projet d’Ecologie Industrielle Territoriale dans le 11ème arrondissement.

Concrètement, les métiers manuels et créatifs sont indispensables si on ne veut pas perdre totalement nos savoir-faire qui se perdent en une génération.

Ce sont les jeunes qui ont envie de créer, de travailler avec leurs mains, d’apprendre à teindre leurs vêtements. Ils veulent changer leur rapport au travail et pouvoir se rapprocher de la nature, ce qui signifie un changement d’organisation du travail.

  1. Nous devons les accompagner pour utiliser ce qui existe : apprendre que réparer un vêtement peut être créatif. Il y a tellement de domaines à explorer celui des déchets alimentaires non comestibles.
  2. Savoir lier les techniques authentiques comme la gravure, l’impression, le tissage et le numérique est un vrai enjeu. La modélisation 3d n’aura aucun intérêt si on ne comprend pas le patronage, la morphologie.
    Les biosciences sont une source d’avenir comme le pouvoir des algues. Le biomimetisme nous rappelle que le vivant est la plus belle machine.
  3. Je crois également à l’hybridation entre les arts visuels et bien sur entre le design et l’artisanat en particulier pour répondre aux usages comme les différentes formes de handicap, le sport et la mobilité, la grande taille…
    Avoir des produits qui répondent à notre quotidien, qui durent, ont une histoire, sont accessibles et uniques à la fois tout en ayant de la valeur sociale et environnementale.

Que conseiller à un jeune qui souhaite s’orienter vers un métier de la mode durable ?

Il faut être curieux et surtout retrouver le goût de faire les choses par soi-même. Je remarque que certains jeunes ne sont pas à l’aise avec le quotidien dès lors que l’on sort du virtuel et du clic.

Cette nouvelle génération veut du sens et du bien être, elle a aussi besoin de se déconnecter des écrans. Ils ont beaucoup de créativité, d’intuition. Ils doivent juste la cultiver car la culture sous toutes ses formes est fondamentale. Musique, littérature, arts plastiques. La lowtech est un enjeu essentiel.

Arielle Levy UAMEP

Luxe et mode durable : chic et choc ?

Globalement et selon les sources prises en compte, les industries de la mode et du luxe contribuent à 6% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, à 20% de la pollution de l’eau et à près de 10% de celle des océans.

Les 10% les plus riches contribuent à la moitié des émissions de CO2 mondiales.

Oxfam

Si tous les secteurs sont concernés, la nature des impacts en cause varie de l’un à l’autre.

Vêtements et maroquinerie

Élevage intensif, déforestation, utilisation de textiles synthétiques dérivés du pétrole et de traitements chimiques aux noms poétiques (éthoxylates de nonylphénol, phtalates, colorants azoïques…), gestion des déchets (chaque européen jette en moyenne 35 vêtements par an, dont seulement trois sont recyclés)…

Ce ne sont pas les habitants du bassin de Citarum en Indonésie qui diront le contraire. Leur rivière, l’une les plus polluées du monde, est affectée par les déchets toxiques rejetés par les usines textiles qui produisent pour des maisons de luxe.

Joaillerie et l’horlogerie

Extraction minière (déforestation, pollution des sols et des cours d’eau, perturbation des écosystèmes), consommation d’énergie (raffinage des métaux, fonderies et usinage très énergivores), utilisation de produits chimiques (mercure, cyanure dans l’extraction de l’or, avec des risques de contamination des eaux souterraines), trafic et exploitation (conditions de travail dangereuses, impact sur les communautés locales…).

Cosmétiques et Parfums

Huiles de palme (déforestation), microplastiques (pollution des océans), substances chimiques non biodégradables. emballages (utilisation intensive de plastiques et de matériaux non recyclables pour des packagings haut de gamme), tests sur animaux, consommation d’eau importante…

comité Colbert
comité Colbert
comité Colbert

Sans omettre l’agriculture intensive, la consommation d’eau… pour les Vins et spiritueux, et l’artificialisation des sols, la consommation énergétique, les matériaux de construction utilisés… pour l’immobilier de prestige, etc.

Un véritable inventaire à la Prévert… de la dévastation.

Selon TIME et le portail de données Statista, seule une dizaine de marques de Luxe figure parmi les 500 entreprises les plus durables au monde en 2024. Si la maison italienne Moncler parvient à se hisser à la 3ème place, en revanche Mercedes-Benz (106e), Hermès (107e), Richemont (140e), Hugo Boss (209ème), Burberry (258ème), Ferrari (273ème), Ralph Lauren (280ème)… sont loin derrière et les groupes LMH et Kering n’en font pas partie.

Journal du Luxe • Juillet 2024

ENTRETIEN AVEC JULIA FAURE (LOOM)

Entretien avec Julia Faure, co-fondatrice de la marque Loom, co-présidente du Mouvement Impact France, présidente de En Mode Climat et sociétaire de Virgocoop.

Fabricant de vêtements et d’accessoires, Loom affiche sa philosophie dès la page d’accueil de son site web : « Achetons moins. Produisons mieux ». La marque propose néanmoins des pantalons, des vestes, des chemises, des chaussures en cuir… dont l’impact environnemental n’est pas négligeable. Sur quels critères choisissez-vous les produits que vous allez lancer et comment procédez-vous pour réduire leur impact ?

Chez Loom, on part d’un constat simple : l’industrie de la mode produit trop, trop vite, avec trop d’impact. Plutôt que de surfer sur les tendances, on essaie de faire l’inverse : ralentir.

Notre processus de sélection des produits repose sur trois critères principaux :

  1. L’utilité – On ne sort un produit que s’il répond à un vrai besoin. Pas question de lancer une énième collection pour suivre une mode passagère. On préfère travailler sur des essentiels bien pensés, qui durent vraiment.
  2. La durabilité – Nos vêtements doivent résister à l’épreuve du temps, autant en termes de solidité que de style. On fait des tests en laboratoire, on analyse les points de fragilité, on améliore les modèles jusqu’à obtenir un produit qui vieillira bien.
  3. L’impact environnemental – On choisit les matières les plus responsables possibles, on privilégie les circuits courts et on fabrique en Europe, là où les normes sociales et environnementales sont plus strictes. Mais on sait que chaque vêtement a un impact. Alors, plutôt que de faire croire qu’on est parfaits, on milite pour une consommation plus sobre : moins mais mieux.

Et surtout, on ne pousse pas à l’achat. C’est aussi ça, la clé d’une mode plus responsable.

Loom est membre du collectif En Mode Climat. Objectif des marques et des industriels français qui composent cette coalition : faire en sorte que le secteur textile reste sous les 2 degrés de réchauffement climatique (conformément à L’Accord de Paris, adopté en 2015 lors de la COP21). Cet objectif vous paraît-il encore atteignable ?

Honnêtement, on ne va pas se mentir : on est très, très loin du compte.

Aujourd’hui, le monde est sur une trajectoire de +3 à +4 degrés, pas de 2. Tant qu’on continuera à produire toujours plus de vêtements, à délocaliser la fabrication là où l’énergie est la plus carbonée (et la main d’oeuvre la plus exploitée), et à baser la mode sur les incitations à consommer, on n’y arrivera pas.

Mais est-ce que ça veut dire qu’il faut baisser les bras ? Non. Chez En Mode Climat, on se bat justement pour que les règles du jeu changent. Il ne suffit pas que quelques marques fassent mieux dans leur coin, il faut des lois qui imposent à toute l’industrie de faire autrement.

Sur ce dernier point, on avait enfin une avancée avec la loi anti-fast fashion, qui prévoit de réguler le modèle la fast fashion et de l’ultra- fast fashion. Adoptée à l’Assemblée nationale en mars 2024, le gouvernement ne l’a toujours pas mise à l’agenda du Sénat (pendant ce temps, Shein et Temu continuent de vendre des vêtements à 2 euros, sans aucune contrainte…).

Donc oui, si on continue comme aujourd’hui, les 2 degrés sont inatteignables. Mais si on impose des règles strictes à l’industrie, si on arrête de se voiler la face sur l’impact réel de la mode, alors on a encore une chance. Mais il faut agir maintenant, et vite.

Loom s’est fixé pour objectif « de fabriquer des habits qui durent longtemps et que vous n’aurez pas besoin de racheter tous les 4 matins ». Conçus pour durer, produits, peu ou prou, en France et en Europe et dans des quantités moindres… les grandes marques de luxe affirment elles aussi avoir pris la mesure des enjeux de la durabilité et s’être engagées à améliorer leurs process sur toute la chaîne de fabrication. Alors Loom vs LVMH, Kering ou Hermès : même combat ?

Pas vraiment. Certes, les grandes marques de luxe mettent en avant la durabilité, mais leur modèle reste basé sur le renouvellement permanent des collections et l’incitation à la consommation.

Chez Loom, notre objectif, c’est que les gens achètent moins, et pas juste des produits plus « verts ».

La différence fondamentale, c’est l’intention. Le luxe vend du désir, de la rareté, et pousse au renouvellement saison après saison. Nous, on cherche à répondre à des besoins, plutôt qu’à les créer : des vêtements bien conçus, qui ne se démodent pas et qui durent vraiment.

Vous êtes depuis 2023 coprésidente du Mouvement Impact France qui représente et fédère l’ensemble des entreprises engagées dans la transition écologique et sociale. Le fait que certaines grandes banques françaises (BNPP…), qui financent très majoritairement les énergies fossiles, soient partenaires du Mouvement est-elle compatible avec les principes et les engagements pris ?

BNP n’est pas adhérent d’Impact France, mais il nous arrive de collaborer avec eux sur certains événements. Est-ce que ça signifie qu’on cautionne leurs choix en matière de financement des énergies fossiles ? Absolument pas.

Donc, est-ce que c’est compatible ? Disons que c’est une tension permanente. Mais si on veut que les choses changent à grande échelle, on doit être à la table des discussions – sans jamais perdre notre exigence.

Dans notre manifeste et sur les valeurs qui façonnent notre action de plaidoyer, nous affirmons notamment la valeur de sobriété :

Nous proposons et soutenons les mesures encourageant les entreprises à diminuer leur consommation de ressources, à se concentrer sur les produits à forte valeur sociale et écologique, à centrer leurs innovations sur la réponse aux besoins plutôt que sur la création de nouveaux, afin d’intégrer les limites planétaires dans les modèles d’affaires.

Quels sont selon vous les métiers de la Mode durable amenés à se développer dans les années à venir ?

Je crois beaucoup au renouveau de l’industrie textile, en France et en Europe. Et au développement du secteur de la réparation. Je pense qu’à l’avenir on va avoir besoin de gens qui savent faire marcher des tricoteuses rectilignes, réparer des baskets, coudre des jeans etc.

Julia Faure Loom
ENTRETIEN AVEC EMMANUELLE LEDOUX (INEC)

Entretien avec Emmnauelle Ledoux, Directrice Générale de l’Institut de l’Économie Circulaire.

L’INEC présente l’économie circulaire comme l’opportunité « de passer d’un modèle de réduction d’impact à un modèle de création de valeur, positive sur un plan social, économique et environnemental ». Pourriez-vous développer ces différents avantages ? Cette approche ne semble avoir que des bénéfices ; quels sont alors les freins à une mise en œuvre étendue ?

L’immense majorité de l’économie mondiale aujourd’hui est linéaire : on extrait, on produit, on consomme, on jette. Passer à l’économie circulaire et donc décorréler croissance économique de l’usage des ressources permet de rentrer dans un cercle vertueux, celui où la matière extraite est utilisée au maximum de ses capacités : on reconditionne, on répare, on remanufacture… et en toute fin, on recycle.

Le principal intérêt est donc de réduire très significativement notre besoin de ressources, ce qui est une nécessité absolue, dès lors que les limites planétaires sont indépassables et ne nous permettent pas de continuer à extraire au même rythme.

Quel est le frein à une mise en œuvre effective dès lors ? Essentiellement financier. Nous parlons d’abord d’investissements lourds, et de produits qui pourront être en sortie de chaine significativement plus chers, ne serait-ce que parce que la main d’œuvre qui intervient est locale, et donc payée sur des bases toutes autres que celles des pays « habituellement » producteurs.

C’est pour cela que nous sommes si attentifs à l’INEC au cadre législatif et réglementaire sur lequel nous concentrons une partie significative de nos efforts : passer de l’économie du tout jetable à l’économie circulaire est un changement structurel qui nécessite des politiques publiques volontaristes.

Un certain nombre d’entreprises (pour ne pas dire la plupart), grandes et petites, fonctionnent encore aujourd’hui dans un système de production linéaire (extraire, produire, distribuer, consommer, jeter). Le système de l’économie circulaire (extraire moins, produire, distribuer, consommer mieux, voire moins, recycler) est-il la seule (ou la meilleure) solution de la durabilité ?

Ce qui est sûr, c’est que c’est la seule solution qui prend en compte la question des ressources ! L’économie circulaire va donc arriver, et c’est aujourd’hui que nous devons intéresser et former aux métiers de l’économie circulaire pour anticiper les besoins d’emplois énormes à venir.

Le passage à l’économie circulaire va nécessiter de nombreuses compétences et expertises, qu’il faut développer dès maintenant.

L’économie linéaire, l’économie du tout jetable, extrait des ressources pour les jeter peu après, tandis que l’économie circulaire vise à extraire beaucoup moins de ressources pour à la fois faire avec les ressources déjà disponibles mais surtout réduire notre besoin en ressources.

La mode circulaire, puisqu’il s’agit de notre sujet du jour, consiste à produire beaucoup moins de vêtements, donc à mobiliser beaucoup moins de ressources, et à faire durer beaucoup plus longtemps les vêtements que l’on achète.

La fast-fashion est intrinsèquement basée sur un renouvellement quasi constant de nos garde-robes, et donc sur des vêtements qui durent moins longtemps. Nous devons passer de ce modèle des collections textiles en renouvellement permanent et à durée limitée vers un modèle plus économe en ressources et composé de vêtements éco-conçus pour durer plus longtemps.

Du point de vue de l’entreprise, c’est également une solution qui leur permet de garantir la pérennité de leur activité sur le long terme. Les investissements sont certes plus importants mais lorsque les ressources viendront à manquer, les entreprises qui auront adapté leurs chaînes d’approvisionnement et relocalisé leurs activités seront les gagnantes.

Les préceptes de l’économie circulaire sont-ils applicables aux produits de la mode et du luxe ? (Et le sont-ils) ?

L’industrie du textile représente le paroxysme du modèle jetable : la production et la consommation de fast fashion est en hausse, les nouvelles références alimentent sans cesse le marché, et la durée de vie des produits se raccourcit.

Le modèle de la collecte textile connait actuellement une crise sans précédent, qu’il est nécessaire de regarder dans les yeux.

On sait aujourd’hui que 30% de la production mondiale de textile est jetée sans avoir même vu un consommateur, parce que l’industrie est basée sur une logique de surproduction.

En parallèle, la qualité des produits baisse, ce qui entraîne une crise du secteur de la seconde main qui n’est plus rentable et qui doit traiter des volumes toujours plus importants de vêtements de mauvaise qualité. Les pistes de recyclage ne sont pas assez développées pour traiter le volume nécessaire.

En théorie donc, les préceptes d’éco conception, de réparation, de réemploi sont évidemment applicables au secteur textile. Dans les faits, ils ne le sont que pour quelques marques vertueuses, car les coûts de main d’œuvre et de matière première sont significativement plus importants et empêchent une transition globale d’un secteur très compétitif.

D’où l’importance de créer des vocations et de former aux métiers de l’éco-conception et de la réparation !

Il existe des centaines de normes, de labels, de certifications… (600 en Europe selon PARIS GOOD FASHION X CLIMATE CHANCE) « attestant » de la durabilité d’un produit de Mode ou de Luxe. Et de nombreux outils et méthodes permettent de tracer, de mesurer, d’évaluer… leurs impacts environnementaux et sociaux. Comment s’y retrouver ? Certains sont-ils plus fiables ou efficients que d’autres ? Quels seraient les « bons » critères de traçabilité à prendre en compte pour ces secteurs ?

En effet, vous avez raison, il est facile de se perdre dans tous ces labels ! Et c’est pour cela que nous avons besoin de personnes compétentes pour éco-concevoir les produits, les réparer si besoin, accompagner les consommateurs dans leurs choix, etc. Nous avons besoin de personnes formées et qualifiées !

Beaucoup de ces labels certifient la qualité de la matière utilisée, comme le standard 100 Oeko-Tex ou Gots (qui garantit une matière biologique à 95% minimum), ce qui est déjà très bien.

En effet, un vêtement coton ou lin par exemple sera bien résistant et plus facilement recyclable qu’un vêtement en polyester et avec des matières mélangées.

Cependant, ces critères agissent peu sur les ressources nécessaires à élaborer les vêtements.

Par exemple, un jean neuf utilisera toujours près de 9000 litres d’eau pour sa fabrication seule.

Au-delà des labels, il est donc important de se poser la question de la mise sur le marché de vêtements neufs, quand on sait qu’on a actuellement assez produit de vêtements pour s’habiller jusqu’en 2100.

L’INEC promeut le développement des activités de réparation et d’allongement de la durée de vie des produits, afin de capitaliser sur les vêtements déjà existants plutôt que de multiplier les initiatives qui encouragent la consommation en la justifiant d’être responsable.

Lois Grenelle, loi Agec, loi Climat & résilience, directive CSRD… Depuis une quinzaine d’années, plusieurs dispositifs réglementaires en France et en Europe ont permis d’encadrer les pratiques liées au Développement durable. Ces réglementations vous paraissent-elles suffisantes ? Ont-elles prouvé leur efficacité ?

Les réglementations vont dans le bon sens mais il est encore compliqué d’en calculer les effets. Nous avons fêté il y a peu les cinq ans de la loi AGEC, pionnière dans le domaine, qui a fait bouger beaucoup d’industriels en posant les bases de l’économie circulaire.

Cependant, certains objectifs paraissent encore lointains : les tonnages d’emballages en plastique à usage unique mis sur le marché ont augmenté de 3,3 % entre 2018 et 2021, alors qu’une trajectoire de réduction de 20% en tonnage est fixée par la loi pour 2025.

D’autres mesures, telle que l’interdiction de la destruction des stocks d’invendus, partent de nécessités évidentes mais peuvent en réalité avoir des effets contre-productifs en déstabilisant la filière de la seconde main et en entrant en compétition avec les vêtements issus du réemploi, sans remise en cause du principe même de surproduction.

En parlant de mode et de textile, nous sommes toujours dans l’attente de l’examen au Sénat de la proposition de loi « anti fast-fashion » pourtant adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale il y a 1 an, et des mesures concrètes qui en découleront, notamment autour de la définition de la fast fashion.

Il est important de ne pas réduire la fast fashion aux géants Temu et Shein, car cela ne traiterait qu’une partie du problème.

Certains établissements de formation sont membres de l’INEC. Quelle est la nature de vos relations avec ces formations ? De quelle façon interviennent-ils sur ces sujets ?

Nous avons en effet le plaisir de compter parmi nos adhérents plusieurs organismes de formation, notamment des universités/écoles de l’enseignement supérieur, mais aussi des organismes de formation continue et des structures de l’insertion par l’activité économique, qui comprend un volet formation important.

Nous intervenons régulièrement auprès des étudiants/apprenants pour présenter les grands enjeux de l’économie circulaire, son histoire, les grands acteurs et grands concepts, les politiques publiques d’économie circulaire, etc.

Par exemple, nous sommes partenaires du Mastère Spécialisé Economie Circulaire et Développement Durable de Polytech Marseille (rattaché à Aix-Marseille Université) et dans ce cadre, deux personnes de l’INEC se rendent plusieurs fois par an devant les élèves pour détailler la règlementation en vigueur (au niveau national et européen) sur l’économie circulaire, les modèles économiques et le développement territorial par exemple.

Les sujets de formation sont justement au cœur de nos préoccupations actuelles puisque nous organisons en ce mois d’avril le “Mois de l’Emploi, de la Formation et des Compétences dans l’économie circulaire”, qui dresse notamment un panorama des formations dans le domaine !

92% de l’économie mondiale est linéaire, et la majorité de nos emplois est déjà ou sera, dans un avenir à moyen/court terme, donc touchée directement ou indirectement par la raréfaction des ressources naturelles, par des problèmes d’approvisionnement, etc.

Il y a donc un enjeu de création d’emploi ou de transformation des emplois existants avec l’économie circulaire, et nous devons accompagner ces bouleversements par une offre de formation solide et diversifiée : nous y travaillons !

Quels sont les métiers dont l’économie circulaire aura besoin dans les années à venir ?

Comme je vous le disais, on parle à la fois de création et de transformation des emplois grâce à l’économie circulaire, mais aussi de “retour” de certaines professions qui ont vu leur modèle économique fortement fragilisé par la généralisation de l’économie linéaire au siècle dernier.

Ce qui est certain, c’est que le changement sera structurel ! Pendant le mois de l’emploi, de la formation et des compétences que nous organisons à l’INEC, nous avons interrogé des professionnels de l’économie circulaire, notamment dans la gestion et la valorisation des déchets ou dans la réparation (électroménager, cordonnerie).

Les métiers du bâtiment seront également beaucoup touchés, tant du point de vue de la rénovation que de la construction de bâtiments neufs avec le réemploi de matériaux.

Je ne pourrais vous faire un panorama exhaustif puisque ces 92% d’économie linéaire dans le monde devront opérer un basculement vers l’économie circulaire, c’est un impératif pour rester dans nos limites planétaires, ce qui implique que tous les métiers vont évoluer !

Que conseiller à un lycéen que l’économie circulaire intéresse et qui cherche une formation dans ce domaine ?

Je le féliciterais d’abord de son choix ! Parce que s’impliquer dans l’économie circulaire c’est contribuer à construire une économie plus respectueuse des ressources et donc en adéquation avec les limites planétaires.

Le changement ne se fera pas d’un claquement de doigts, nous devons anticiper les besoins et faire en sorte qu’un maximum de personnes soit formé à ces enjeux.

D’un point de vue pratique, je lui conseillerais de suivre notre mois de l’emploi, de la formation et des compétences dans l’économie circulaire, au cours duquel nous allons répertorier les formations, initiales et continues, en lien avec l’économie circulaire sur notre compte LinkedIn.

Je préciserais aussi qu’il est aussi important de considérer l’économie circulaire dans sa dimension transversale, qui s’applique à tous les secteurs de la production. Ainsi, de nombreuses formations incluent des notions d’économie circulaire sans pour autant être spécialisées dans le sujet.

Emmanuelle Ledoux Institut National de l'économie circulaire

Pour ces industries, la RSE n’est plus un luxe

Les grandes multinationales ont pris la mesure des enjeux environnementaux et sociaux liés à leurs activités.

Cet intérêt pour la RSE est motivé par les demandes croissantes des consommateurs, autant que par la nécessité de se conformer aux règlementations des législateurs français et européens (lois AGEC et Climat & Resilience, stratégie textile européenne, directive CSRD…). Lesquels ont entrepris de mettre en lumière ce qui relève du greenwashing et de la labellisation pseudo-scientifique afin d’améliorer l’information des consommateurs.

Certes, les actions effectivement engagées ne sont pas encore tout à fait à la hauteur des intentions.

On sait aujourd’hui que 30% de la production mondiale de textile est jetée sans avoir même vu un consommateur, parce que l’industrie est basée sur une logique de surproduction.

Emmanuelle Ledoux • Institut National de l’Economie Circulaire • Lire l’entretien

Jeune femme dans les arbres
ENTRETIEN AVEC CATHERINE DAURIAC & PAUL LENGLET (FASHION REVOLUTION)

Entretien avec Catherine Dauriac et Paul Lenglet, respectivement Présidente et Secrétaire Général de l’ONG Fashion Revolution France, qui milite pour un système de mode propre, sûr, équitable, transparent et responsable par le biais de la recherche, de l’éducation et du plaidoyer.

Fashion Revolution publie depuis 2017 une étude sur les 250 principales marques de mode et la façon dont elles dévoilent les impacts de leur chaîne de valeur. Quels sont les critères pris en compte et les grandes conclusions qui peuvent être tirées de cet publication annuelle ?

Objectif et méthodologie

L’index examine et classe 250 des plus grandes marques et détaillants de mode selon les informations qu’ils divulguent publiquement sur leurs politiques, pratiques et impacts sociaux et environnementaux.

  • Il utilise 258 indicateurs couvrant un large éventail de sujets comme le bien-être animal, la biodiversité, le climat, le travail forcé, l’égalité des sexes, les salaires décents, les conditions de travail, etc.
  • L’objectif est d’inciter les grandes marques à être plus transparentes sur leurs efforts sociaux et environnementaux, ce qui est considéré comme une première étape nécessaire vers un changement systémique dans l’industrie.
    Résultats et impact
  • L’index a conduit à des progrès : en 2016, seules 5 marques sur 40 divulguaient leurs fournisseurs, contre 117 sur 250 en 2021.
  • Cependant, le rapport 2023 montre une stagnation globale, avec un score moyen de 26%, soit seulement 2% de plus que l’année précédente.
  • Certaines marques comme OVS et Gucci ont obtenu des scores supérieurs à 80% pour la première fois en 2023.

Le Fashion Transparency Index 2024 se concentre sur la décarbonisation et le mix énergétique des 250 marques de mode.

Près d’un quart des plus grandes marques de mode au monde ne divulguent aucune information sur leur stratégie de décarbonisation, ce qui indique que la crise climatique n’est pas une priorité pour elles.

Par ailleurs, moins de la moitié (47 %) des marques publient un objectif conforme à l’initiative Science Based Targets (SBTi) couvrant l’ensemble de leur chaîne de valeur. L’étude révèle que seules 43 % des marques communiquent sur leurs avancées par rapport à ces objectifs.

Parmi les 107 marques sur 250 qui partagent leurs progrès, 42 déclarent une augmentation de leurs émissions de scope 3 par rapport à leur niveau de référence – et cela ne concerne que les marques dont nous avons des données.

Pour 143 marques (57 %), il est impossible de savoir où elles en sont dans leur transition. Avec moins de cinq ans pour réduire de moitié les émissions mondiales d’ici 2030, il est évident que l’industrie s’éloigne de plus en plus de cet objectif crucial, alors que les émissions continuent d’augmenter.

Points clés à retenir

  1. La transparence n’est pas synonyme de durabilité, mais elle est considérée comme essentielle pour responsabiliser les marques.
  2. L’index n’est pas un guide d’achat pour les consommateurs, mais un outil pour pousser les marques à divulguer plus d’informations.
  3. Il vise également à encourager les gouvernements à mettre en place une législation plus stricte sur les impacts humains et environnementaux dans l’industrie de la mode.

Vous proposez des « masterclasses » de la primaire au lycée et intervenez dans les universités, les écoles de mode et de commerce avec des programmes dédiés. De quoi s’agit-il ? Vos interventions portent-elles leur fruit ?

Les établissements nous invitent à venir proposer aux élèves et étudiants des masterclass sur nos sujets. Il s’agit d’une conférence suivie d’un long échange de questions / réponses avec les participants.

Parfois suivie d’un atelier pratique de réparation/ embellissement par la broderie que les participants apprécient beaucoup.

Ce sont leurs questions et leurs remarques qui nous disent si l’intervention a porté ses fruits, notamment sur leur surconsommation de vêtements.

A côté des masterclass, nous avons aussi un programme d’interventions longues, comme des hackathon (1 semaine) ou des workshops sur 6 mois, pour accompagner les étudiants à élaborer un Hors-série de la revue Hummade en lien avec leur école.

Les formations spécialisées dans le luxe et la mode ont-elles intégré (ou intègrent-elles davantage) les enjeux de la durabilité dans leurs programmes ?

L’industrie de la mode est source de pollution et d’injustice sociale. Pourtant, les formations en mode et luxe n’ont que très lentement intégré ces enjeux dans leurs cursus.

Bien que certaines écoles proposent des modules sur la mode responsable, il n’existe toujours pas en France (ni dans la plupart des grandes capitales de la mode) de véritable école dédiée exclusivement à la mode éco-responsable.

Les formations en mode restent encore majoritairement axées sur la créativité et le savoir-faire artisanal, sans remettre en question le modèle économique dominant basé sur la surproduction et la consommation de masse.

Même dans les cursus où la durabilité est abordée, elle est souvent considérée comme une option ou un module complémentaire, au lieu d’être intégrée comme un socle fondamental à tous les enseignements.

Ce retard est préoccupant, surtout si l’on compare avec d’autres secteurs comme l’architecture ou l’ingénierie, où les problématiques environnementales sont bien mieux intégrées dans les cursus.

En ne formant pas suffisamment les futurs professionnels de la mode aux enjeux du développement durable, les écoles contribuent indirectement à perpétuer un modèle économique obsolète et destructeur.

Les étudiants intéressés par ces questions doivent souvent bricoler leur propre parcours en combinant des formations en mode avec des spécialisations en développement durable, en économie circulaire ou en innovation textile.

Une véritable école dédiée à la mode éthique et responsable permettrait pourtant de former une nouvelle génération de designers, entrepreneurs et responsables de production capables de repenser le système dans son ensemble.
Mais face à la pression croissante des consommateurs, des ONG et des gouvernements, plusieurs établissements commencent à intégrer ces problématiques.

Ajout de modules dédiés à la mode durable.

Certaines écoles ont introduit des cours spécifiques sur :

  • L’éco-conception et l’éco-design, qui encouragent la création de vêtements avec des matériaux durables et une production responsable, l’analyse du cycle de vie des produits, pour comprendre l’impact environnemental des vêtements à chaque étape de leur production et consommation.
  • L’innovation textile, incluant les alternatives au coton conventionnel, les matériaux biosourcés et les textiles recyclés. La responsabilité sociale des entreprises (RSE) et les normes internationales du travail.

Que conseiller à un jeune qui cherche une formation post-bac dans le but d’exercer un métier dans le luxe ou la mode durable ?

Un étudiant ou une étudiante souhaitant s’orienter vers la mode durable doit combiner formation académique, engagement personnel et expérience pratique.

Un parcours réussi dans la mode durable repose sur un équilibre entre formation, engagement personnel, apprentissage des nouvelles technologies et immersion dans l’écosystème de la mode responsable.

Choisir une formation adaptée : opter pour une école de mode qui intègre la durabilité. Certaines écoles de mode ont mis en place des modules dédiés (IFM, ESMOD, Parsons, etc.), mais il est aussi possible de suivre des cursus plus généralistes en choisissant des spécialités ou des options liées à l’éco-conception et à la mode responsable.

Pour se former aux enjeux de la mode circulaire et du développement durable, il existe des formations complémentaires sur la base du volontariat en économie circulaire, gestion de l’impact environnemental, RSE ou innovation textile qui peuvent être très utiles (Certification RSE Mooc C3D par exemple)…

La mode durable ne se limite pas à la création : comprendre la chaîne d’approvisionnement et la traçabilité des matériaux est essentiel pour choisir des textiles responsables. Maîtriser les nouvelles technologies textiles (matières innovantes, recyclage, impression 3D, upcycling) permet d’explorer des alternatives plus durables.

Savoir communiquer et sensibiliser : Les marques éthiques doivent raconter leur histoire de manière transparente pour gagner la confiance des consommateurs.

Acquérir une expérience concrète en faisant des stages ou travailler avec des marques engagées pour se confronter au terrain, en travaillant avec des marques responsables, des ONG ou des associations.

Participer à des projets de mode durable : Collaborer avec des associations, des collectifs de créateurs ou des concours spécialisés peut être un bon moyen de se faire connaître.

Développer un état d’esprit engagé et critique : un professionnel de la mode durable doit être en veille constante sur les évolutions du secteur, les innovations textiles et les nouvelles réglementations.

Lire des rapports, suivre des activistes et participer à des événements comme la Fashion Revolution Week est un bon moyen de rester informé et engagé.

Quelle définition donneriez-vous du Luxe ou de la Mode durable ?

La mode durable est une approche globale qui vise à réduire l’impact environnemental et social de l’industrie textile.

Une production responsable : réduction drastique de la production, réduction de la consommation d’eau et d’énergie, utilisation de matières biologiques et/ou recyclées, respect du bien-être animal, respect des droits et de la sécurité des travailleurs tout au long de la chaîne d’approvisionnement).

Les labels GOTS et Œko-TEX sont indispensables.

ll est plus que recommandé de mettre en place un modèle économique circulaire : encouragement au réemploi, recyclage et à l’upcycling, développement du marché de la seconde main et des modèles de location (économie de la fonctionnalité), allongement de la durée de vie des vêtements grâce à la qualité et la réparation.

Enfin, sensibiliser les consommateurs aux impacts de leurs choix pour les encourager à acheter moins mais mieux.

Le luxe devrait être exemplaire et durable selon les principes de la mode responsable et l’artisanat, la qualité et l’innovation.

Matières nobles et responsables : Le luxe privilégie des matériaux de haute qualité, mais de plus en plus de maisons adoptent des alternatives durables (cuir tannage végétal, soie éthique, laine certifiée).

Artisanat et savoir-faire local : Le luxe repose sur une production moins industrielle, favorisant la valorisation du travail manuel et la préservation des savoir-faire.

Innovation et éco-conception : Des marques comme Stella McCartney, Hermès (avec ses alternatives en cuir de champignon) ou Chloé développent des solutions pour limiter leur empreinte environnementale.

Transparence et traçabilité : De plus en plus de maisons de luxe investissent dans la traçabilité et l’open-source pour prouver l’origine de leurs matières et leur impact réduit.

Et malgré tout cela, le luxe est toujours épinglé pour ses failles environnementales, sociales (comme le travail des migrants dans les ateliers italiens de Santa Croce et Prato) et le non respect du bien-être animal (fermes de crocodiles etc.).

Catherine Dauriac Fashion revolution
Paul Lenglet Fashion révolution
Il n’est en effet pas certain que la vitrine en verre recyclé du flagship Bulgari de Shanghai, les pots de crème en copeaux de bois et matériaux biosourcés de Chanel, les bouteilles de spiritueux plus légères d’Hennessy, voire même le partenariat signé par Louis Vuitton avec la Formule 1 concourent grandement à compenser l’impact écologique du secteur.

Près d’un quart des plus grandes marques de mode au monde ne divulguent aucune information sur leur stratégie de décarbonisation, ce qui indique que la crise climatique n’est pas une priorité pour elles.

Fashion révolution FranceLire l’entretien

Le segment du luxe responsable n’en affiche pas moins une croissance dynamique. Selon une étude de BCG (2022), près de 60 % des consommateurs de luxe considèrent la durabilité comme un critère d’achat déterminant, et 40 % sont prêts à payer un supplément pour des produits éco-conçus.

Les consommateurs attendent de plus en plus de transparence et d’actions significatives (…) La durabilité n’est pas un centre de coût à court terme, mais un créateur de valeur à long terme.

Nicole Rycroft, fondatrice et directrice exécutive de Canopy

La mode a le doigt sur la couture de la réglementation

Focus législatif et règlementaire rédigé par Glynnis MAKOUNDOU, Avocate à Lyon.

Son site

L’Union Européenne est à l’initiative de nombreux textes encadrant l’impact environnemental et social des entreprises du secteur de la mode et du textile, dans le cadre de sa stratégie pour des textiles durables et circulaires dévoilée le 30 mars 2022.

Le législateur français en partie en avance sur ces questions avec des textes précurseurs tels que la loi AGEC ou la loi Climat et Résilience.

Tout d’abord, la Loi Grenelle II du 12 juillet 2010 insiste sur la nécessité de réduire les impacts environnementaux des activités économiques. Elle introduit l’obligation de réaliser un bilan des émissions de gaz à effet de serre pour les entreprises privées de plus de 250 salariés, devant être mis à jour tous les 4 ans.

De même, la Loi Climat et Résilience du 22 août 2021 renforce les obligations en matière de transparence et de prévention des atteintes à l’environnement, contribuant ainsi à protéger à la fois l’environnement et la santé humaine. Elle instaure notamment un affichage volontaire de l’impact environnemental des vêtements sou forme de note, avant l’achat.

La gestion des déchets textiles à travers la responsabilité élargie du producteur (REP) prévue à l’article L541-10 et suivants du code de l’environnement rend les entreprises qui fabriquent des vêtements destinés aux ménages responsables de leur impact environnemental sur l’ensemble de leur cycle de vie. Elles ont l’obligation d’agir en faveur de l’écoconception des produits, de l’allongement de leur durée d’usage, et de la gestion de leur fin de vie.

La loi AGEC du 10 février 2020 a modifié en profondeur le cadre de la REP en France. Parmi ses mesures phrases, on compte l’obligation pour les marques commercialisant plus de 10000 références de produits par an en France et réalisant plus de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires de fournir, de manière accessible au moment de l’achat, des informations sur les qualités et caractéristiques environnementales de chaque vêtement, notamment leur traçabilité géographique. La loi AGEC interdit également la destruction des produits textiles invendus et incite à leur réutilisation ou recyclage, contribuant ainsi à la lutte contre le gaspillage. Ce texte s’inscrit dans une logique plus large de transition vers une économie circulaire.

L’intégration des droits sociaux et humains dans les politiques environnementales est également crucial. À cet égard, la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), adoptée au niveau européen en décembre 2022, oblige les entreprises d’une certaine taille à rendre compte de manière transparente de leurs impacts sociaux, environnementaux et de gouvernance, contribuant ainsi à un respect renforcé des droits humains au sein des chaînes de production. En France, la CSRD a été transposée par une ordonnance en date du 6 décembre 2023.

La réglementation européenne comme française met également l’accent sur les allégations environnementales et l’importance de l’information du consommateur. Le règlement ESPR du 13 juin 2024 établit un cadre visant à définir des exigences en matière d’écoconception pour des produits durables, afin de réduire l’impact environnemental de ces produits tout au long de leur cycle de vie. Il prévoit l’instauration d’un passeport produit digital contenant des informations sur l’impact environnemental des vêtements.

La transposition de la Directive ECGT du 28 février 2024 ajoute au sein du code la consommation des pratiques commerciales déloyales liées au greenwashing. La loi Climat et résilience citée plus haut avait déjà renforcé les sanctions dont sont passibles les entreprises qui utilisent des allégations trompeuses en matière d’impact environnemental pour mieux vendre leurs produits. Dissuasives, elles peuvent s’élever à 10% du chiffre d’affaires ou 80% du budget publicitaire consacré à la campagne trompeuse.

ENTRETIEN AVEC LUCAS THIVOLET (FASHION GREEN HUB)

Entretien avec Lucas Thivolet Conde Salazar, Directeur Fashion Green Hub.

L’association Fashion Green Hub se définit comme un « catalyseur et un opérateur des transitions nécessaires à l’avenir de la filière Mode/ Textile/ Accessoires/Sport/Luxe en France pour la rendre plus forte et plus désirable en minimisant ses impacts environnementaux et sociaux. » Quelle stratégie et quels moyens déployez-vous pour y parvenir ?

Association d’entreprises d’intérêt général, Fashion Green Hub Fashion porte depuis sa création en 2015 le message d’une mode plus durable, locale et innovante, créatrice d’emplois dans les territoires, en lien avec l’objectif de décarbonation de l’Union Européenne.

Pour y contribuer, nous développons un modèle hybride basé sur le faire ensemble au sein duquel nos entreprises adhérentes se forment, ouvrent et expérimentent de nouvelles voies, en toute confiance. Faire ensemble parce qu’il est plus que temps de mettre en œuvre des réponses immédiatement applicables.

Nous sommes gestionnaire de la nouvelle manufacture de mode circulaire et solidaire, le Plateau Fertile Paris. Notre tiers-lieu est un catalyseur de communautés agissantes.

Parce que changer radicalement le business model de la mode nécessite des modes de fonctionnement audacieux, capables de fédérer des entreprises, des créateurs, des écoles, chercheurs, des start-ups ayant en commun la volonté de prendre leur part pour relever collectivement le défi d’une transformation de la mode à la fois économique et sociale.

La Corporate Reporting and Sustainability Directive (CRSD) entrera en vigueur cette année. De quoi s’agit-il ?

La nouvelle réglementation européenne CSRD fait suite à la directive sur le Reporting Non-Financier (NFRD) établie en 2017. Cette réglementation impose aux grandes entreprises européennes de reporter leurs performances extra-financières pour plus de transparence sur leurs impacts environnementaux et sociaux.

L’objectif est d’encourager les entreprises à limiter leurs impacts et à trouver de nouvelles voies de développement.

La loi Omnibus, visant à simplifier le Green Deal, en cours de discussion à la commission européenne, vient s’opposer aux objectifs de la CSRD et constitue un nouveau retour en arrière dans nos efforts pour poser un cadre légal incitatif et nécessaire.

Les grandes marques du Luxe ont une approche qui n’est pas sans rappeler le mode de fonctionnement de l’upcycling (choix des matières premières, créativité…). Peut-on considérer qu’elles sont plus durables que les produits des secteurs de l’habillement ou du prêt-à-porter ?

Le secteur du Luxe construit de nouvelles dynamiques autour de la durabilité et la qualité de ses produits.

Sourcing durable et innovant, qualités des matériaux, éco-conception, réparabilité, création de valeur en circuit court.

Le secteur a toutefois largement augmenté ses quantités produites depuis dix ans, son impact a donc nécessairement augmenté sur ces dernières décennies.

Vous avez noué des partenariats avec plusieurs écoles, de mode, de design, de communication… Quelle est la nature des actions développées avec ces formations ?

Le réseau de Fashion Green Hub est composé d’une diversité d’entreprises et de partenaires, notamment de grandes écoles de mode et de management.

Nous travaillons avec nos écoles pour sensibiliser et préparer les futures générations de professionnels de la mode aux enjeux de filière et aux dynamiques de transition.

RSE, devoir de vigilance, REP, nouveaux modèles économiques circulaires et fonctionnels, inclusion économique au service de la réindustrialisation de nos filières.

Quels conseils donner à un lycéen qui envisage de s’orienter vers une formation et/ou un métier du Luxe ou de la Mode durable ?

Qu’il existe une diversité de « métiers passion » au cœur de filière Mode. Et que pour maintenir ces métiers et soutenir la transition, la nouvelle génération est attendue pour insuffler un vent de renouveau au sein des entreprises.

Une nouvelle mode, belle, circulaire et solidaire est possible !

Lucas Thivolet Fashion green hub

Une Responsabilité Sociale et Environnementale cousue main

Dans le sillage de Stella McCartney, pionnière de la mode green, les marques s’activent : départements dédiés au Développement durable, fabrication de faux cuir à partir de champignons et de micro-organismes, mesure de l’empreinte environnementale, utilisation de matières recyclées, essor des pierres précieuses de laboratoire…

À l’instar du programme LIFE 360 de LVMH, initié en 2012, les choses bougent et les dispositifs abondent pour améliorer tout ou partie des process en cours.

Les géants du secteur optent (très) progressivement vers l’utilisation de matières premières durables (cuir végétal chez Chanel, interdiction des peaux exotiques non traçables chez Kering…).

Elles tendent à réduire leurs émissions de carbone et à privilégier les énergies renouvelables (objectif de réduction de 50 % de l’empreinte carbone d’Hermès d’ici 2030, 100 % des sites de production alimentés en énergies renouvelables chez L’Oréal Luxe…).

Nous croyons fermement qu’il est possible de concilier croissance et développement durable, tout en continuant à faire rêver à travers nos créations.

Hélène Valade, Directrice Développement Environnement de LVMH • Journal du luxe • septembre 2024

L’éco-conception et le recyclage font leur entrée chez Prada (Collection Re-Nylon en nylon recyclé), Cartier & Chopard (or recyclé), LVMH (emballage de parfums avec des matériaux 100 % recyclables)…

couturières Loom
bague Lady Courbet
ENTRETIEN AVEC MANUEL MALLEN (COURBET)

Entretien avec Manuel Mallen, cofondateur (avec Marie-Ann Wachtmeister) et président de COURBET, après une expérience de 30 ans dans le luxe (Richemont, Baume & Mercier, Poiray…).

Courbet conçoit, fabrique et commercialise des pièces de joaillerie en diamant de synthèse et en or recyclé largement plus éthiques et écologiques que leurs équivalents extraits de mines. Ces bijoux peuvent-ils pour autant être considérés comme des produits de luxe ?

Oui car :

  1. Un objet de luxe est défini par la noblesse des matériaux qui le composent. Dans le cas des bijoux COURBET, les matériaux utilisés sont de l’or 18k, traditionnellement employé en joaillerie, et le diamant. Hormis leur origine qui diffère, puisque l’or est recyclé à partir de déchets informatiques, et le diamant créé en laboratoire par l’homme, rien ne les distingue de leurs homologues extraits des mines. La qualité et l’esthétique demeurent intactes, ce qui fait des créations COURBET des bijoux d’exception.
  2. Par ailleurs, le luxe réside dans la technique et les savoir-faire mobilisés. Ici aussi, rien ne change, puisque COURBET travaille avec des artisans experts qui perpétuent la tradition joaillière si chère aux joailliers de la Place Vendôme, de même nous proposons des créations sur mesure.
  3. Enfin, l’écrin dans lequel la Maison reçoit ses clients, à savoir le calme et l’intimité de l’Appartement COURBET, niché sous les toits de la Place Vendôme, couronne l’expérience luxe.

Plusieurs entreprises telles que Capucine H, Innocent Stone, Swarovski ou Lusix ont développé des approches similaires. Quelle part de marché occupe aujourd’hui la joaillerie dite « durable » ?

Lors de la création de COURBET en 2018, le marché français était très imperméable au diamant créé en laboratoire. La Maison a été la première à se positionner à un tel niveau d’excellence en s’implantant au cœur du monde joaillier, sur la Place Vendôme.

COURBET n’a pas seulement cherché une adresse symbolique, mais a souhaité atteindre le même niveau d’excellence, notamment en ne sourçant que les plus beaux diamants créés en laboratoire (D, E, F parmi les critères de sélection).

Autrefois très largement minoritaire, le diamant créé en laboratoire se taille une place de choix sur le marché de la joaillerie mondiale. On estime cette part à 15%, mais certains marchés sont beaucoup plus réceptifs depuis de nombreuses années, comme les États-Unis, où plus de 50% des bagues de fiançailles achetées sont désormais serties de diamants créés en laboratoire.

En France ce phénomène est plus lent, mais le mouvement est lancé, et les clients sont de plus en plus nombreux à questionner l’achat joaillier et de facto à se tourner vers des marques comme COURBET.

Les diamants de laboratoire, qu’ils soient produits par HPHT (Haute Pression Haute Température) ou CVD (Chemical Vapor Deposition) sont énergivores. Et faute d’une traçabilité suffisante, il arrive que l’or recyclé soit mélangé par certaines entreprises avec de l’or extrait, rendant le terme « recyclé » discutable. Des progrès vous semblent-ils possibles pour améliorer ces aspects ?

Fabriquer un diamant en laboratoire est en effet énergivore, mais tout dépend toutefois de l’énergie utilisée.

Chez COURBET, les diamants sont sourcés dans les pays où l’énergie est la plus décarbonnée possible, grâce à l’énergie nucléaire, mais aussi grâce aux énergies renouvelables et notamment le solaire.

Plus les pays producteurs de diamants en laboratoire mettront de moyens pour décarbonner leurs productions, et plus les diamants seront éthiques.

N’oublions pas que certaines entreprises comme Aether Diamond, certifient d’ores et déjà la neutralité carbone de leurs diamants, ce qui montre une réelle conscience des enjeux environnementaux de la filière.
Mais qu en est il du bilan énergétique, écologique et humain de l extraction…

Le risque pour une marque éthique est en effet que son stock d’or recyclé ne se retrouve mélangé avec de l’or de première extraction. Il faut dans ce cas là encourager les ateliers à choisir uniquement des filières d’or recyclé, ou choisir de ne travailler qu’avec des ateliers qui garantissent que 100% de l’or est issu de filières de recyclage.

Quoiqu il en soit nous faisons progresser les choses en n’achetant que de l’or recyclé.

Quels sont les métiers et donc les compétences que votre activité nécessite ?

  • Création artistique : création des collections, design des prototypes en 3D et en gouache.
  • Supply chain : achat des matières premières, notamment l’or et les diamants. Relation avec les ateliers de fabrication. Contrôle des stocks.
  • Vente et service après-vente : accompagnement des clients durant tout le parcours d’achat, en physique à l’Appartement COURBET, mais également par téléphone ou en visio-conférence, merchandising des vitrines, service après-vente.
  • Communication et relations presse : animation des réseaux sociaux de la Maison, activations d’influence (médias, KOL), événementiel, image de marque.
  • Marketing : stratégie de marque, développement produit, analyse de marché.
  • Digital : site Internet, stratégie d’acquisition, CRM.
Manuel Mallen président Courbet
Les labels s'habillent en durable
Si la plupart des études s’accordent à dire que seule une baisse notable de la production et de son corollaire la consommation permettrait d’atteindre les conditions requises pour conserver une planète habitable d’ici à 2050, les efforts entrepris de part et d’autres pour y parvenir ne doivent pas être négligés.

Déchets plastiques métamorphosés en vêtements de plage par la marque Apnée, robe en bracelets de montres recyclés de la créatrice Marine Serre, calculette environnementale fiabilisée par l’Afnor lancée par Eram, réseau de distribution de vêtements de seconde main de Patatam…
De l’utilisation de matières éco-responsables (lyocell, coton bio, coton recyclé, lin, polyester recyclé…) dans la confection de vêtements, à la relocalisation de la production dans des pays où l’énergie est peu émettrice de CO2, en passant par le développement du réemploi, de la seconde main et de la réparation, ou l’exploitation de la blockchain pour la traçabilité et des énergies renouvelables pour la décarbonations des activités… les actions et les dispositifs visant à améliorer la durabilité des produits ne manquent pas.

Un certain nombre de labels et de certifications (pour ne pas dire un nombre certain car il en existerait plus de 600 en Europe) ont pour but de « garantir » que ces pratiques sont éthiques, durables ou responsables.

Chaque secteur a les siens (Responsible Jewellery Council pour la joaillerie, COSMOS pour les cosmétiques, Global Organic Textile Standard pour la mode…).

Citons :

  • GOTS (pour Global Organic Textile Standard) est un label qui certifie les textiles biologiques respectant des critères écologiques et sociaux stricts.
  • Le label OEKO-TEX garantit des textiles sans substances nocives, assurant sécurité et innocuité pour la santé. Il comporte plusieurs standards qui varient en fonction des degrés d’exigeance (Made In Green, Standard 100, Leather Standard, STeP…).
  • B Corp, évalue l’entreprise dans sa globalité sur des critères environnementaux, sociaux et économiques.
  • Cradle to Cradle (C2C), mesure la durabilité d’un produit sur l’ensemble de son cycle de vie, de sa conception à sa fin de vie, et plus particulièrement sa capacité à s’inscrire dans une démarche d’éco-conception et d’économie circulaire.
  • CarbonNeutral® Certification, certifie que les entreprises compensent toutes leurs émissions de CO₂ et adoptent des pratiques pour réduire leur empreinte carbone.
  • ISO 14001 certifie le système de gestion environnementale d’une entreprise. Elle assure que celle-ci minimise son impact environnemental de manière continue, en améliorant sa gestion des ressources et en réduisant ses déchets.
  • 1% for the Planet atteste que l’entreprise s’engage à reverser 1 % de son chiffre d’affaires à des initiatives environnementales.

Pour en savoir plus

Certaines entreprises tendent à renforcer leurs engagements sociaux et leurs conditions de travail : programme d’égalité des sexes et d’inclusion, et évaluation sociale et environnementale systématique de tous les fournisseurs chez Kering, traçabilité des diamants via la blockchain pour lutter contre les diamants de conflit chez Richemont et LVMH…

Et de nouvelles stratégies commerciales éclosent, avec la seconde main, l’économie circulaire, la location ou le prêt d’objets de luxe, les investissements dans la green tech (soutien aux solutions éco-innovantes, matériaux durables…).

C’est à se demander si les industries du Luxe ne sont pas plus enclines à changer de paradigme que ne le sont les responsables politiques ?

En tout cas si l’on s’en tient à la décision récente du gouvernement de reporter l’examen de la loi « anti fast-fashion » au Sénat, malgré son adoption à l’unanimité à l’Assemblée en mars 2024. Ou si l’on se fie aux velléités de « simplification » de la Commission européenne s’agissant des directives CSRD et CSDDD, introduites depuis peu pour une plus grande durabilité des entreprises.

ENTRETIEN AVEC BÉNÉDICTE ÉPINAY (COMITÉ COLBERT)

Entretien avec Bénédicte Epinay, Déléguée générale du Comité Colbert.

L’univers du Luxe regroupe des marques, des produits, des services et des savoir-faire très différents. Comment définiriez-vous un produit (ou un service) de Luxe ? Quels sont les pré-requis pour intégrer le Comité Colbert ?

Un produit ou un service de luxe est synonyme d’excellence à toutes les étapes de son cycle de vie depuis le sourcing des matériaux jusqu’à la fabrication en passant par sa distribution.

Toutes ces étapes convoquent des savoir-faire souvent ancestraux qui confèrent à l’objet ou aux service une désirabilité.

L’ancien Président d’Hermès disait d’ailleurs fort justement, « le luxe c’est le désir qui l’emporte sur la raison ». Il y a une part de déraison dans le fait d’acheter un produit de luxe qui dépasse le cadre strict du besoin pour entrer dans celui du rêve.

Entrer au Comité Colbert requiert d’être une marque née en France, de renommée mondiale (la majorité de son chiffre d’affaires doit être réalisée à l’export) et dotée d’ateliers de création en France même si l’actionnaire est étranger. Le reste de nos règles est tenu secret.

Charte « Colbert Patrimoine de demain » en 2010, publication des rapports RSE dédiés aux bonnes pratiques, étude prospective « 2050 : Scénarios futurs » visant à anticiper les impacts environnementaux et sociétaux du Luxe à long terme, programmation d’un cycle de conférences sur l’eau… le sujet de la durabilité dans le luxe alimente depuis une quinzaine d’années les réflexions du Comité Colbert, qui a même créé une Commission Développement durable en 2020. Bien que le Comité n’ait pas vocation à s’engager sur les actions à mener, ces réflexions ont-elles eu des répercussions notables auprès des Maisons membres de l’association ?

Le partage de bonnes pratiques telles que nous le pratiquons activement est toujours source de progrès. Lorsque la maison Chloé a obtenu le label b.Corp., ses responsables sont venus raconter aux autres membres quel avait été leur chemin, leurs découvertes, les embûches.

Plusieurs de nos maisons l’ont depuis obtenu, d’autres sont également en chemin. Témoigner collectivement comme nous le faisons à l’Université de la Terre est tout aussi utile pour montrer que notre industrie est non seulement convaincue mais engagée sur de multiples sujets sociaux et environnementaux.

Enfin, nous sommes collectivement déterminés pour aider à la construction des multiples règlementations qui se négocient actuellement, tant en France qu’Europe avec le Green deal.

Désigné lauréat du Programme d’investissements d’avenir (PIA) en 2023, le Comité Colbert a initié le projet Resource aux côtés de l’École des Mines, du Campus Mode, Métiers d’Art, Design-Manufacture des Gobelins, des Maisons Christofle et Van Cleef & Arpels. Financé à hauteur de 9 millions d’euros sur 5 ans, « ce projet vise notamment à mettre en place un dispositif d’intelligence artificielle de captation des gestes d’artisans, de les retranscrire et de les conserver pour servir à terme de support à la formation des générations futures d’apprentis ». Comment fonctionne ce dispositif ? Le Comité Colbert a-t-il développé ou envisage-t-il de créer des projets comparables en lien avec les enjeux du développement durable ?

Le projet ReSource repose sur trois axes.

Si le premier concerne en effet la transition générationnelle avec notamment l’élaboration d’une méthodologie innovante à base de capteurs et de gants haptiques pour capter et transmettre l’expertise des gestes, associée à une banque de données dynamique et évolutive, les deux suivants portent sur la transition écologique.

À terme, les objectifs sont de pouvoir proposer des formations spécialisées intégrant la circularité dans les métiers de la création et de la fabrication, en développant des compétences liées à l’économie circulaire mais aussi de favoriser une mode à impact en créant une plateforme de production locale et innovante.

Ducasse, Chanel, Hermès, Lesage, Cartier… Une quinzaine d’écoles et de programmes ont été créés par des Maisons de Luxe. A quels objectifs répondent ces lancements et pour quels types de métiers ?

Notre industrie fait face à une sévère et très inquiétante pénurie de talents. Il nous manque 20 000 artisans pour répondre au vieillissement de la population dans les ateliers où la moyenne d’âge excède parfois 55 ans. Or, il faut parfois dix ans pour former un artisan de haute joaillerie, un maroquinier ou un orfèvre expert. Nous devons donc nous en préoccuper dès maintenant.

C’est pourquoi, près de 20 maisons du Comité Colbert ont créé des formations diplômantes comme le leur permet la loi depuis 2020. Cela leur permet de former des artisans directement à leur savoir-faire. Beaucoup de métiers sont en tension, ceux de l’hôtellerie restauration mais aussi la joaillerie, la maroquinerie et la couture pour ne citer que ceux-ci.

Le dispositif Les De(ux)mains du luxe (lancé en 2022 par le Comité Colbert) a pour ambition de faire découvrir les métiers du Luxe et les formations qui y mènent. De quoi s’agit-il ?

Les De(ux)mains du luxe est un salon de l’orientation gratuit un peu particulier à destination des jeunes et du grand public. Nos visiteurs, jeunes ou adultes en reconversion, ont en effet la possibilité de tester leur agilité sur les stands de nos grandes maisons en fabricant quelque chose de leur main : peinture sur porcelaine, couture, maroquinerie, pâtisserie, orfèvrerie, joaillerie, etc.

Notre ambition est de susciter ainsi des vocations par la pratique du geste.

La visite se poursuit par la découverte des écoles qui préparent à ces carrières et par l’écoute de professionnels venus témoigner. Nous préparons actuellement une édition XXL de cet évènement qui se tiendra au Grand Palais du 2 au 5 octobre 2025.

L’urgence est de rendre visibles ces métiers qui ne l’étaient pas. C’est ce que nous faisons également sur Tiktok et Instagram en donnant la parole à tous ces artisans sans lesquels le luxe n’existerait pas.

Quels sont selon vous les métiers du Luxe durable amenés à se développer dans les années et les décennies à venir ?

Les métiers d’art constituent la colonne vertébrale de cette industrie. Ils en sont l’assurance vie. Pas de luxe sans métiers d’art. Mais le secteur est également tourné vers l’intelligence artificielle qui disrupte déjà les supply chains ou la manière dont les maisons interagissent avec leurs clients et accélère les process créatifs. Ce n’est que le début.

Bénédicte Epinay Comité Colbert
ENTRETIEN AVEC FRÉDÉRIQUE GÉRARDIN (CSF MODE & LUXE)

Entretien avec Frédérique Gérardin, déléguée générale du Comité Stratégique de Filière Mode et Luxe – Savoir pour Faire -.

La plateforme Savoir pour Faire vise à faire découvrir les métiers du Luxe et les formations qui y mènent. De quoi s’agit-il ?

Avec plus de 10 000 postes à pourvoir dans l’industrie du luxe française (croissance du secteur et de nombreux départs à la retraite), cette initiative majeure (développée en complément du dispositif Les de(ux)mains du luxe initié par le Comité Colbert) a été développée pour promouvoir les métiers du secteur.

« Savoir pour faire », c’est est une plateforme et des outils numériques de communication (site Internet, newsletters, podcasts, etc.) au service de la filière mode et luxe française :

  • 80 métiers techniques différents;
  • 250 formations disponibles;
  • Un espace dédié pour mettre en relation entreprises et demandeurs d’emploi;
  • Des informations sur les savoir-faire de la filière.

Engager « une action d’éducation tous publics sur le thème  « consommer moins, pour consommer mieux » est l’un des enjeux du comité Stratégique de Filière des industries de la mode et du luxe. De quoi s’agit-il ?

La consommation impulsive et excessive, encouragée par les acteurs de l’Ultra fastfashion a des conséquences néfastes sur l’environnement, mais aussi sur  nos modèles sociaux et sociétaux.

Nous voulons sensibiliser les consommateurs sur le  fait que la valeur des produits reflète leur type de production, le modèle de société, auquel il participe,  d’impact sur l’environnement.

En choisissant mieux des produits de qualité, conçus pour durer, être réparés,  nous réduisons notre empreinte écologique et consolidons les sous-jacents d’une économie vertueuse  (respects conditions de travail, sécurité sociale, droits chômage etc,) .

Pour cela, nous travaillons à informer sur la structuration de la chaine de valeur, sur les matières utilisées, sur le cycle de vie des produits, de leur production à leur fin de vie etc.

Fin 2024, la Commission européenne a annoncé son intention de « simplifier » les règles récemment introduites en matière de durabilité des entreprises (directives CSRD et CSDDD notamment). Et le projet de loi sur le fast-fashion pourtant adopté à l’unanimité en mars 2024 par l’Assemblée Nationale a été mis à l’arrêt par le Sénat en février dernier. Ces revirements vous paraissent-ils aller dans le bon sens pour la Filière Mode et Luxe ?

L’engagement des marques vers une mode plus durable est une tendance de fond.

La temporisation dans les textes environnementaux répond à un contexte politique particulier en France et une demande d’ajustement du rythme des règlementations européennes qui sont  extrêmement complexes à déployer.

Cela ne témoigne pas d’un recul sur le terrain. De nombreuses marques, de luxe en particulier, investissent fortement dans le domaine RSE, innovent, utilisent des indicateurs liés aux pratiques durables comme outil de pilotage et de transformation, pour répondre aux attentes croissantes des consommateurs et réduire leurs empreintes environnementales.

Concernant le  Projet de loi contre l’Ultra Fast fashion, il a été adopté à l’unanimité en mars 2024 à l’Assemblée et devrait prochainement arriver au Sénat. Il reste une priorité partagé des pouvoirs publics et de la filière.

Outil de traçabilité ayant commencé à être utilisé par l’industrie textile, la blockchain permet de suivre les différentes étapes de production. C’est un pas important vers une mode plus éthique et transparente. La CSF a-t-il vocation à promouvoir cette technologie ?

Le CSF a inscrit la traçabilité au coeur de son action. Sans elle, il sera impossible de proposer un affichage environnemental, de mesurer de façon claire ses impacts, de produire un passeport numérique.

Nous menons différents travaux pour accompagner les entreprises dans cette tâche.

La blockchain est une réponse intéressante sur une certaine typologie d’articles de luxe. Elle n’est pas la seule et n’est pas adaptée à tous les segments de produits. C’est pourquoi nous testons un grand nombre de techniques et de technologies, au sein de pilotes notamment.

Quels sont selon vous les métiers du Luxe durable amenés à se développer dans les années et les décennies à venir ?

D’une façon générale, tous les métiers autour de la donnée, pour :

  1. accompagner la traçabilité, l’affichage environnemental d’une part,
  2. mais également la prévision / gestion de stocks, production à la demande pour limiter les invendus et produire au plus juste.

Les métiers autour des l’écoconception bien sûr.

Enfin, tous ceux autour du recyclage des produits. (Ces deux points étant étroitement liés).

Sur la Plateforme « Savoir pour faire », nous en avons identifiés quelques uns (liste non exhaustive) :

Frédérique Gérardin Savoir pour faire

Exercer un métier de la mode ou du luxe qui tend à réduire ou en tout cas à limiter son empreinte sociale et/ou environnementale s’avère possible. En intégrant ces enjeux dans leurs programmes, de nombreuses formations contribuent à donner les clés pour y parvenir.

Formations & métiers du luxe durable à la mode de chez nous

On l’a vu dans les dossiers précédents : il en va de l’étique ou du développement durable dans la mode et le luxe comme dans le journalisme, la communication, l’agro-écologie… il peut être partout.

Le styliste peut travailler ses collections en privilégiant des matières recyclées, l’ingénieur développer des outils de traçabilité efficaces, le designer exploiter des matériaux moins polluants, la Chef plébisciter des produits locaux…
Question de choix et de partis-pris préalables.

Pour le jeune qui a fait ce choix, il s’agit d’identifier les secteurs et les métiers d’une part, les formations d’autre part, qui répondent à ses exigences éco-responsables. Pas toujours simple de se repérer dans cette profusion d’activités, de professions et d’écoles.

Pour simplifier, disons que le choix pourra porter sur :

  • un secteur d’activité : Mode, Accessoires, Joaillerie, Gastronomie, Cosmétique, Hôtellerie, Immobilier… voire parmi eux, ceux qui ont construit leur modèle sur la durabilité (recyclerie, bijoux de laboratoires…);
  • un type de métier ou un métier dans ce secteur : marketing, vente, gestion, création, informatique, production, fabrication… ou brodeur, chargé d’études, ingénieur textile, modéliste, styliste…
  • une ou plusieurs formations qui conduisent vers le métier envisagé.

Autant dire qu’il n’existe pas de réponse toute faite. Et qu’il se révèle impossible de lister de façon exhaustive les solutions qui s’offrent au jeune.

Voici toutefois les pistes principales qui s’offrent à lui.

Métiers du luxe et de la mode, professions d’avenir ?

Nous leur avons posé la question. Comité Colbert, Loom, Chaire Bali, EFAP, Ducasse… ont listé ces métiers qui feront la mode durable de demain. Voici une synthèse de leurs réponses.

Les métiers du luxe et de la mode durable sont en pleine évolution. Ils reflètent un besoin croissant de compétences en artisanat, technologie et durabilité.

L’artisanat reste essentiel, notamment avec la valorisation des métiers d’art et de la réparation textile (tricoteurs, réparateurs de baskets, couturiers spécialisés). Parallèlement, l’ingénierie textile se transforme avec des expertises en traçabilité, circularité et éco-conception, visant à développer des machines et des processus plus sobres et efficients.

L’intelligence artificielle bouleverse aussi le secteur, pour optimiser la gestion des stocks, la production à la demande et l’interaction client. Dans la haute gastronomie, elle permet aux chefs de mieux gérer leur activité, ouvrant la voie à des métiers de formation et de conseil en IA.

Enfin, de nouveaux métiers sont en plein essor autour du développement durable : designer de mode éthique, responsable RSE, expert en recyclage et upcycling, consultant en durabilité et spécialiste en marketing éco-responsable.

Ces évolutions traduisent une tendance globale vers une industrie résiliente, plus respectueuse de l’environnement et des savoir-faire, et alliant tradition et innovation.

ENTRETIEN AVEC VALENTINA NARDI & JÉRÉMY LEGARDEUR (CHAIRE BALI)

Entretien avec Valentina Nardi et Jérémy Legardeur, respectivement Responsable et Directeur scientifique de la Chaire Bali, un programme d’enseignement et de recherche pour le déploiement d’une mode circulaire.

La Chaire Bali (Biarritz Active Lifestyle Industry) se définit comme un « programme d’enseignement et de recherche réunissant des acteurs de la mode et du textile désireux de collaborer ensemble autour de l’école d’ingénieur ESTIA sur la transition environnementale, sociétale et économique de l’industrie ». De quoi s’agit-il plus précisément ?

Notre ambition est d’accompagner le secteur industriel du textile vers plus de circularité, c’est à dire créer une boucle vertueuse où les produits du passé serviront à confectionner les produits du futur.

C’est un défi qui est posé en réponse aux enjeux actuels de sobriété et de soutenabilité pour diminuer la tension sur les ressources (matières, énergies…) et favoriser les relocalisations de la filière, pour rapprocher les lieux de production des lieux de consommation et favoriser la diminution de l’empreinte carbone.

La Chaire BALI (Biarritz Active Lifestyle Industry) est un des principaux programmes français d’enseignement et de recherche sur les innovations technologiques qui vont transformer l’industrie textile et de l’habillement.

Initiée en 2017 par l’ESTIA, la Chaire BALI fédère des acteurs majeurs de l’industrie textile et de la mode : Belharra, CETIA, Décathlon, Gebetex, Groupe Eram, Petit Bateau, ESMOD, avec le soutien de la Région Nouvelle Aquitaine.

Les thématiques de recherche de la chaire BALI sont :

  • Mode circulaire :  accompagner les entreprises dans le développement d’outils pour mettre en œuvre la circularité (démantèlement, valorisation, réparation).
  • Mode transparente : engager le consommateur dans les pratiques d’économie circulaire, déployer le passeport produit circulaire
  • Mode durable : allonger la durée de vie des produits, favorise l’éco-conception.

Les travaux de la Chaire sont organisés autour de trois groupes de travail (GT) qui réunissent des membres de la Chaire mais aussi d’autres participants externes :

  1. GT Traçabilité, porté par Belharra, Groupe Eram et Petit Bateau : Retour d’expérience sur le déploiement d’un passeport numérique entre entreprises expérimentant des démarches / outils
  2. GT Process de tri du futur, porté par le CETIA et Gebetex : Quelle sera la future organisation : collecte – tri- préparation matière recyclage ? Quels acteurs ? sur quels marchés ? Massification des opérations ou organisation distribuée ?
  3. GT Ecoconception, porté par le Groupe Eram : développer des indicateurs de réparabilité, durabilité et recyclabilité.

Aujourd’hui, dans tous les secteurs, il y a une prise de conscience généralisée qu’il nous faut changer rapidement de paradigme car le modèle du « Business as usual » linéaire (basé sur l’extraction des matières premières jusqu’à leur déchet en fin de vie) n’est pas tenable avec l’illusion de croitre indéfiniment dans un monde aux ressources finies et surtout en continuant de le faire au détriment du vivant.

A l’opposé, les partisans d’une décroissance et d’un arrêt trop brutal de nos activités à l’échelle planétaire risque de provoquer encore plus vite un effondrement systémique de notre civilisation.

Les conflits et crises sanitaires actuelles ne sont malheureusement qu’un petit signal où l’on voit comment l’arrêt de certaines activités plongent certains secteurs et même pays dans une trajectoire d’effondrement (inégalités, pauvretés, émeutes, replis nationalistes…)

Entre ces deux scénarios porteurs de catastrophes humaines et écologiques, il nous faut imaginer et forcer un autre destin pour l’humanité avec une recherche d’équilibre entre les trois piliers économique, environnemental et social.

Ainsi même le principe d’un « développement » durable est mise à mal par les tensions actuelles sur les ressources (matières, énergie…).

En tant que chercheurs, industriels, enseignants, nous sommes de plus en plus nombreux à être persuadés qu’il y a une voie hybride à créer, à imaginer autour du modèle de la circularité régénérative qui doit permettre de donner un cap, une vision, du sens pour penser et agir collectivement lors des prochaines décennies (et espérons siècles) vers une transformation assumée et soutenable de nos sociétés.

Depuis 2017 avec les membres de la Chaire BALI, nous avons pu développer et échanger collectivement sur de nombreux projets, initiatives, POC (proof of concept), méthodes, idées… pour favoriser la circularité dans le secteur textile afin d’augmenter son niveau de résilience, favoriser la frugalité et la sobriété en se questionnant sur la traçabilité, la durabilité, l’extension des usages des produits et services, privilégier la réparation, la fabrication à la demande et les circuit-courts au service des territoires.

Avec BALI, nous pensons qu’il est temps de passer à la circularité 2.0 en privilégiant la mise à l’échelle, et le déploiement massif de nos initiatives avec une ambition d’augmenter la scalabilité industrielle de la circularité sur l’ensemble du secteur textile.

Dans cette optique, les différents membres de la Chaire ont décidé de lancer 4 thèses qui sont positionnées sur des axes de recherche complémentaires, pour apporter des réponses concrètes :

  1. La thèse CIFRE de Pantxika Ospital (soutenue en 2023) au sein de l’entreprise Belharra Numérique sur le sujet : Favoriser la circularité et la traçabilité dans le domaine de la mode et du textile : proposition du Passeport Numérique des Produits pour atteindre la transparence produit
  2. La thèse CIFRE de Ximun Currutchet, (Sept 2021 – 2022) concernait la mise en place d’indicateurs de durabilité, de réparabilité et de recyclabilité pour favoriser l’éco-conception des produits des marques (TBS, GEMO, BOCAGE…) du groupe ERAM.
  3. La thèse CIFRE de Nicole Rohsig (soutenue en 2024) au sein de Decathlon sur le sujet : Développement d’un outil d’aide à la décision pour favoriser l’économie circulaire basé sur les considérations techniques et le comportement des consommateurs : application à l’industrie du sport
  4. La thèse CIFRE d’Amanda Bernar (soutenance prévue pour 2025) au sein de l’entreprise Petit Bateau sur le sujet : Développement d’un outil d’aide à la décision pour favoriser la conception et le pilotage d’une usine automatisée de type 4.0 destinée à la relocalisation de la production textile

Nos activités scientifiques sont basées sur une démarche empirique et inductive de type recherche-action appliquée à l’industrie. Les thèses ont pour objectif d’apporter des contributions opérationnelles utiles pour les acteurs économiques et également scientifiques pour le monde académique.

Pour cela, nous utilisons le dispositif CIFRE de l’ANRT avec lequel le ou la doctorant-e est employé-e directement par l’entreprise. C’est la manière dont nous approchons généralement les thèses à l’Estia. Nous partons d’une problématique industrielle concrète, et construisons au fur et à mesure la problématique scientifique.

Les avancées de chaque thèse sont partagées avec les partenaires de la Chaire BALI, afin de favoriser les complémentarités et la confrontation des points de vue des principaux acteurs du secteur du textile et chaque thèse fait écho aux différents GT de la Chaire Bali.

Chaque année depuis 2018, nous partageons nos résultats et travaux lors de nos éditions de la Biarritz Good Fashion qui rassemble plusieurs centaines de professionnels.

Le Développement Durable & Responsabilité Sociétale (DD&RS) figure parmi les engagements d’ESTIA. De quelles façons l’école d’ingénieurs intègre-t-elle ces enjeux dans les programmes et les cours ?

En octobre 2024, l’ESTIA a obtenu le label DD&RS (Développement Durable et Responsabilité Sociétale), pour une durée de 4 ans.

Attribué par le CIRSES, une organisation d’experts dédiée à la promotion et à l’évaluation des démarches responsables dans l’enseignement supérieur, ce label témoigne de son engagement stratégique et concret en faveur de la transition écologique et sociale.

Avec seulement 16 écoles d’ingénieurs en France labellisées pour cette durée, l’ESTIA s’inscrit parmi les institutions les plus engagées. Plus qu’une reconnaissance, ce label est un levier pour poursuivre et amplifier les efforts vers l’exemplarité.

Parmi les points forts mis en avant par les auditeurs dans leur rapport figurent :

  • un engagement stratégique de l’ESTIA qui a repensé son modèle autour de l’ingénierie régénérative visant à former des professionnels engagés pour le vivant ;
  • l’intégration des enjeux DD&RS dans les formations amorcée depuis 2019 ;
  • le couplage original de la démarche DD&RS à la politique de qualité exigeante ;
  • la prise en compte volontariste des questions sociales, notamment en faveur des étudiants.

Les 753 étudiants du cycle ingénieur ont des cours spécifiques sur le développement durable et l’économie circulaire :

  • En 1ère année : enjeux socio-écologiques (42h en S5 et 16h en S6, avec fresque du climat, introduction à l’économie circulaire et stratégies pour l’économie circulaire), développement durable (12h en S6)
  • En 2ème année : de la transition socio-écologique à l’éco-conception (26h en S8), éco-conception de produits et service: la boîte à outils de l’ingénieurs (24h en S8)
  • En 3ème année : RSE (16h en S9), conception durable pour la fonctionnalité (24h en S9), reconception de produit au service de l’économie circulaire 24h en S9), intégration des critères environnementaux et sociaux dans le pilotage d’un projet (de la stratégie à la roadmap) (24h en S9), projet RSE (14h en S9)

Les 125 étudiants du cycle préparatoire ont eux aussi des cours spécifiques liés au développement durable et l’économie circulaire :

  • En 2ème année : entreprendre et entrepreneuriat: approche RSE (16h en S4)
  • Les 65 étudiants du cycle bachelor, cours spécifiques : En 1ère année : projet transition socio-écologique (64h en S2)

En tant qu’école d’ingénieurs, l’ESTIA doit former les nouvelles générations d’élèves ingénieurs afin de répondre aux défis du réchauffement climatique, du recul de la biodiversité.

En complément des approches d’ingénierie « hightech », il y a un enjeu de former des ingénieurs/entrepreneurs/citoyens pour la transition socio-écologique afin de développer des innovations plus soutenables par des approches éco-innovantes telles que la sobriété, la low-tech, le Design et ingénierie régénérative, l’économie circulaire.

Actuellement, en partenariat avec l’Agglomération Pays Basque, nous avons un projet de rénover une vieille ferme abandonnée proche de l’ESTIA en lieu totem des low-tech et de la circularité avec :

Espace Ateliers
– Ateliers de réparation d’objets pour réparer des objets du quotidien pour et avec les citoyens
– Ateliers de réparation de vélos pour favoriser la mobilité douce
– Ateliers d’upcycling/recyclage de produits (textiles,…)
– Ateliers de construction d’objets Low-tech

Espace Workshop / Formation :
Pour organiser des workshops entreprises et étudiants pour coconcevoir des solutions plus circulaires et/ou low-tech
Pour organiser des formations (étudiants, professionnels) spécialisées sur les low-tech et la circularité

Espace Démonstrateurs :
Pour fabriquer et montrer des démonstrateurs, prototypes issus de la circularité et/ou low-tech sur un lieu unique

Ce lieu unique permettra de partager nos résultats issus des activités de recherche dans le domaine de la circularité et des low-tech.

La Chaire Bali compte Decathlon parmi ses membres actifs. L’entreprise est intervenue notamment sur des travaux portant sur le déploiement d’une « démarche circulaire post-consumer » et a participé à des groupes de travail sur « l’éco-conception » et les « process de tri du futur ». Elle a aussi permis aux étudiants de l’ESTIA de travailler sur les sujets du « démantèlement et du recyclage d’articles en fin de vie » et de la « reconception des produits techniques ». Suite à une enquête de Disclose publiée en février dernier, la filiale d’Auchan a été pointée du doigt pour ses pratiques délétères de sous-traitance au Bangladesh. A-t-elle toujours sa place au sein de la Chaire Bali ?

Oui et plus que jamais car en tant que scientifique, nous essayons de comprendre les freins et verrous pour la circularité. Notre objectif n’est pas de juger mais de faire progresser tous les acteurs vers plus de soutenabilité.

Il serait plus simple de travailler seulement avec des petits acteurs, vertueux à 100% mais nous pensons que nous jouons notre rôle en accompagnant des entreprises majeures du secteur et en collaborant avec elles pour aller encore plus dans le bon sens.

Par ailleurs, sans vouloir défendre Decathlon, nous pouvons témoigner de leur engagement et d’une majeure partie de leurs salariés qui lancent des projets de circularité (un article scientifique a été rédigé pour les recenser dans le cadre de la thèse de Nicole Rohsig)

Notre correspondant pour la Chaire BALI est passé de « Responsable Innovation » à « Responsable de la Circularité » pour accélérer cette mutation. Decathlon a répondu présent quand nous avons étudié la traçabilité et la transparence à travers l’étude sur le Passeport Produit Numérique pour le Parlement Européen (voir question 4 ci-après).

Depuis 2008, l’entreprise propose de nombreux sujets pour former nos élèves ingénieurs en lien avec la circularité.

Nous savons qu’en interne il y a 80 personnes chargées d’auditer et contrôler les 1500 fournisseurs de Decathlon dans le monde entier. Malheureusement, ce n’est pas suffisant pour éviter certaines pratiques, donc c’est pour cela que nous sommes convaincu avec BALI de l’importance de déployer le Passeport Produit Numérique dans le secteur textile et un jour dans tous les domaines.

Dans le cadre de la Chaire Bali, vous avez été amené à travailler sur les projets européens FT ALLIANCE (Fashion-Tech Alliance) et SCIRT (System Circularity and Innovative Recycling of Textiles). Ces deux projets visent à promouvoir l’innovation et la durabilité dans les industries de la mode et du textile. Quelles ont été les répercussions concrètes des travaux menés dans ce cadre ?

La collaboration dans le cadre des projets européens permet de mettre l’innovation et l’intelligence collective au service de la mode circulaire.

A titre d’exemple, le projet SCIRT SCIRT a mobilisé de grands acteurs de la filière et a opéré des synergies entre la mode, l’innovation et l’enseignement. Ainsi, l’école d’ingénieurs ESTIA, la plateforme CETIA et l’entreprise technologique Valvan ont travaillé ensemble sur des solutions innovantes comme le désassemblage semi-automatique préservant l’intégrité des textiles.

De leurs côtés, les marques de mode XANDRES, PETIT BATEAU, DECATHLON, HNST ou encore BEL & BO ont conçu des collections prototype intégrant des fibres recyclées.

Ces trois dernières années, les partenaires du projet SCIRT se sont efforcés de surmonter les obstacles technologiques, économiques, socio-économiques et réglementaires auxquels se heurte actuellement le recyclage des textiles, afin de parvenir à une économie circulaire de la mode réelle et durable.

Une des retombées importantes de BALI a été également la thèse de Pantxika Ospital car alors qu’en France, l’Assemblée nationale votait le 14 mars 2024 des mesures pour endiguer l’ampleur de la fast fashion, le parlement européen examinait la faisabilité de déployer un passeport produit numérique pour le textile européen.

Suite aux publications scientifiques réalisées dans le cadre de la Chaire BALI, Le Parlement Européen (Panel sur l’Avenir de la Science et de la Technologie – STOA) a sollicité l’ESTIA pour diriger une étude sur la conception et le déploiement d’un Passeport Produit Numérique pour le secteur textile.

Un outil clé dont la vocation est d’assurer la transparence et la traçabilité des produits textiles et de répondre à l’enjeu majeur de l’économie circulaire.

Cet outil numérique va permettre de fournir à terme, en plus de la composition du textile, des informations sur les lieux de production, les modes de fabrication des produits textiles et leurs impacts environnementaux et sociaux d’information, à destination des consommateurs mais aussi des industriels du secteur puisqu’il leur permet de suivre leurs produits de la production jusqu’à leur fin de vie.

Nos chercheurs ont présenté les résultats le jeudi 14 mars devant les députés du Parlement européen à Strasbourg.

Quels sont selon vous les métiers de l’ingénierie « durable » amenés à se développer dans les secteurs de la Mode ou plus généralement du Luxe ?

Jusqu’à aujourd’hui, c’est majoritairement la vision d’une soutenabilité faible, privilégiant les objectifs financiers de court terme à la durabilité (obsolescence programmée, surconsommation, etc.), qui a principalement guidé les orientations industrielles et de nombreux programmes de formation à l’ingénierie.

Nous pensons que les nouveaux métiers de la soutenabilité forte vont prendre de plus en plus d’ampleur : ingénierie de la traçabilité, des Passeports Produits, ingénierie de la Circularité, ingénierie de la résilience/sobriété et des low-tech.

Les scientifiques et les ingénieurs ont souvent impulsé et accompagné les transformations technologiques de nombreux secteurs industriels, comme l’automobile ou l’aéronautique.

C’est important pour la filière textile dont certaines techniques de production et métiers ont peu évolué, de bénéficier des dernières travaux et connaissances scientifiques à la fois pour s’inspirer des progrès mais aussi éviter des erreurs des autres filières afin d’accélérer leur propre transition écologique.

Notre enjeu aujourd’hui est de créer des programmes en coopération avec les marques pour produire de la science utile et former des ingénieurs de haut niveau, qui vont développer les machines de demain qui seront plus soutenables, plus efficientes, plus sobres en énergie et en matière…

Les challenges sont complexes sur le plan technico-économique mais passionnants.

Le textile est un secteur attractif, porteur d’emplois riches en savoir-faire, et plus particulièrement en ingénierie si nous aspirons à concevoir les solutions d’automatisation de la circularité afin de relocaliser de la production en Europe dans les prochaines années.

Avec la Chaire BALI, nous espérons créer des programmes de formation spécifique pour élargir la curiosité de nos élèves vers ce secteur, révéler leurs talents, et également diversifier nos publics notamment en attirant un public plus féminin dans les écoles d’ingénieurs.

Nous pensons qu’il faut mobiliser en France et dans le monde toute la matière grise et toutes nos capacités de R&D pour construire de nouveaux modèles résilients. Les ingénieurs ont un rôle clé à jouer pour construire une voie hybride entre le scénario d’une croissance infinie qui détruit les ressources et impacte le climat, et celui de l’effondrement de nos civilisations et de nos modes de vie.

Cette voie intermédiaire nécessite de développer plus de sobriété, par exemple en réduisant l’énergie consommée par les machines, ou encore en améliorant la durabilité des produits pour lutter contre l’obsolescence programmée.

Être ingénieur est un métier porteur de sens, aujourd’hui plus que jamais. Nous revenons aux fondamentaux : inventer de nouveaux modèles, créatifs et disruptifs pour faire face au défi de la transition écologique.

Acteur des mutations technologiques durables, l’ESTIA forme les ingénieurs de demain et développe les technologies qui façonnent ce que sera l’industrie textile du futur : plus compétitive, plus responsable et plus en phase avec les besoins sociétaux. Dans ce contexte, la Chaire BALI propose aux étudiants de l’ESTIA des opportunités exceptionnelles pour travailler sur ces questions, en collaboration avec ses membres.

L’ESTIA braque les projecteurs sur la circularité avec un programme sur 3 ans au coeur de ses enseignements : une sensibilisation massive et un approfondissement des connaissances sur le développement durable et sur les enjeux de la circularité qui bouleversent les standards de formation actuels.

En intégrant les enjeux de la circularité dans chaque cours de tous les domaines technologiques avancés confondus, l’école d’ingénieurs a pour objectif de sensibiliser et participer à l’instruction de tous les futurs talents de l’industrie.

Elle porte un très fort engagement qui ne concerne pas seulement les étudiants du secteur de la mode et du textile : elle a pour ambition de diffuser, bien au-delà de l’industrie du luxe, une nouvelle culture de la circularité auprès de tous les ingénieurs, et initier un changement de paradigme dans la formation.

Sensibilisation aux enjeux environnementaux du secteur textile et aux défis contemporains de l’industrie de la mode et du luxe (circularité, raréfaction des ressources et des matières premières, pollution de l’eau, dégradation des écosystèmes et de la biodiversité, GES, consommation d’énergie à toutes les étapes du cycle de vie, etc.) mesure de l’analyse de Cycle de vie, ou encore réglementation environnementale évolutive…

La Chaire permet de continuer à nourrir le cursus des étudiants de l’ESTIA en intégrant des sujets stratégiques comme la durabilité tout au long du cycle de vie d’un produit, de son développement à sa mise au rebut, en passant par sa fabrication et son utilisation.

Jeremy Legardeur chaire bali

Luxe et mode : parcours de formation jusqu’au Bac

Formations courtes professionnalisantes

Opportuns pour les jeunes qui souhaitent intégrer rapidement la vie active, le CAP (Certificat d’Aptitude Professionnelle), le BMA (Brevet des Métiers d’Art), le CS (Certificat de Spécialisation) offrent des dizaines de parcours dans le secteur de la mode au sens large : maroquinerie, ferronnerie d’art, sellerie, arts de la broderie, chapelier-modiste, art et techniques de la bijouterie-joaillerie, vêtement flou…

La durée des études varient de 1 à 3 ans selon la formation choisie. Une poursuite d’études peut être envisagée.

CAP (Certificat d’Aptitude Professionnelle)

  • Diplôme national (1er niveau de qualification professionnelle) / 2 ans
  • Ouvert aux collégiens après la classe de 3ème
  • Plusieurs domaines et sous-domaines : Arts de la bijouterie-joaillerie (CAP Arts et techniques de la bijouterie joaillerie option bijouterie joaillerie…); Arts textiles et mode (CAP Métiers de la mode, chapelier-modiste…)…
  • Poursuite d’études : BMA, Bac Pro…

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BMA (Brevet des Métiers d’Art)

  • Diplôme national de niveau 4 des certifications professionnelles (2 ans)
  • Ouvert aux titulaires d’un CAP ou niveau équivalent / Scolaire (lycées professionnels, établissements privés d’enseignement technique) ou apprentissage (CFA)
  • Une vingtaine de référentiels : Bijou option Bijouterie joaillerie, Arts et techniques du tapis et de la tapisserie de lisse…)
  • Poursuite d’études : BTS, DN MADE…

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Bac professionnel

En lycées professionnels, certains bacs pros peuvent mener, en 3 ans après le collège, à des métiers du luxe et de la mode :

  • Bac Pro « artisanat et métiers d’art » (plusieurs options possibles, tel que tapissier d’ameublement).
  • Bac Pro « Métiers de la mode – vêtements »
  • Bac pro « Métiers de la couture et de la confection »

Bac général ou technologique

Le choix des spécialités générales en première et en terminale ou des séries en voie technologique dépendra des aspirations de l’élève (parcours universitaire, formation courte ou longue…).

Citons malgré tout le Baccalauréat STD2A et l’enseignement optionnel Création et Culture Design (CCD) proposés en seconde générale et technologique.

À NOTER

La FCIL (Formation Complémentaire d’Initiative Locale) est un diplôme de spécialité permettant à des diplômés de niveau 3 (CAP…) et 4 (bac pro…) d’acquérir des compétences professionnelles particulières. Exemples : Arts de la Mode; Lingerie, corseterie, balnéaire; Savoir-faire fabrication habillement…

Les entreprises du luxe prêtes à en découdre pour la formation
Plusieurs grandes maisons du luxe ont créé leurs propres centres d’apprentissage pour former les jeunes à leurs méthodes et pourvoir les nombreux postes vaquants.

L’Institut des Métiers d’Excellence (IME), par LVMH

Créé en 2014, l’Institut des Métiers d’Excellence LVMH (IME) forme aux métiers de l’artisanat, de la création et de la vente en partenariat avec des écoles prestigieuses (École Boulle, Les Compagnons du Devoir, IFM, etc.).
Formations en bijouterie, maroquinerie, couture, horlogerie, vente, etc.
Marques impliquées : Louis Vuitton, Dior, Chaumet, Berluti, etc.

Les Ateliers École de Chanel

Programme de formation interne pour préserver les savoir-faire des métiers de la haute couture, de la maroquinerie et de la joaillerie.
En collaboration avec ses maisons d’art (Lesage, Massaro, Lemarié, Goossens, etc.).
École ERES pour la lingerie et le maillot de bain.

Hermès avec L’École Hermès des savoir-faire

Formation en maroquinerie pour transmettre l’expertise artisanale.
Basée sur l’apprentissage et la transmission en interne avec une approche individualisée.
Forme des artisans du cuir, en partenariat avec des CFA.

L’Institut Joaillerie Cartier

Créé en 2002 pour former aux métiers de la joaillerie et de l’orfèvrerie.
Programmes intensifs pour apprendre la conception et la fabrication de bijoux haut de gamme.

Van Cleef & Arpels et L’École des Arts Joailliers

Fondée en 2012, propose des formations en joaillerie, sertissage, gemmologie et histoire de l’art du bijou.
Accessible aussi bien aux professionnels qu’aux passionnés.

 L’Académie Dior

Lancée en 2021 pour former aux métiers de la haute couture et de la maroquinerie.
Formation dispensée dans les ateliers de la maison et en partenariat avec des écoles de mode.

Par ailleurs, le développement durable compte parmi les enjeux abordés au sein de plusieurs grands acteurs du luxe…

  • L’Institut de Couture Saint Laurent propose une formation de 6 mois développée avec l’Institut Français de la Mode.
  • Même objectif avec le partenariat noué entre Louis Vuitton et Central Saint Martins.
  • LVMH et EHL Hospitality Business School ont lancé l’Executive Master Leading Sustainable Excellence in Luxury Retail & Hospitality. Un programme de formation continue d’un an axé sur la durabilité et l’excellence.
Les métiers d'art ne sont pas passés de mode
Secteur à part entière, les métiers d’arts comptent près de 300 métiers répartis en 16 domaines d’activité, dont certains figurent au sein du Comité Stratégique de Filière Mode & Luxe.

L’article 22 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises donne une définition légale des métiers d’art. Selon cet article : « relèvent des métiers d’art, […] les personnes physiques ainsi que les dirigeants sociaux des personnes morales qui exercent, à titre principal ou secondaire, une activité indépendante de production, de création, de transformation ou de reconstitution, de réparation et de restauration du patrimoine, caractérisée par la maîtrise de gestes et de techniques en vue du travail de la matière et nécessitant un apport artistique ».

Les métiers d’art ont pour point commun d’associer savoir-faire d’excellence, créativité et technicité. Ils supposent le plus souvent la transformation de matériaux (métaux précieux, cuir, soie, verre, etc.) pour créer des pièces uniques ou en petites séries.

L’artisan d’art maîtrise des gestes précis, parfois hérités de plusieurs siècles de pratique, et s’adapte aux évolutions technologiques. Des centaines de formations spécifiques sont possibles, selon le métier et le diplôme visés.

Reconnus pour leur forte valeur patrimoniale et culturelle, les métiers d’art tendent à préserver et à adapter les savoir-faire qui contribuent au rayonnement du luxe et de l’artisanat français dans le monde.

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Parmi les activités concernées, citons notamment :

Bijouterie, Joaillerie, Orfèvrerie, Horlogerie

  • Exemples de métiers : Bijoutier-joaillier; Diamantaire; Orfèvre…
  • Exemples de formations : CAP art et techniques de la bijouterie-joaillerie; BMA art du bijou et du joyau​; MC joaillerie; Diplôme des métiers d’art (DMA) arts du bijou et du joyau​; Brevet des métiers d’art (BMA) horlogerie​; CAP horlogerie​…

Mode et accessoires

  • Exemples de métiers : Accessoiriste de mode​; Chapelier-modiste​; Couturier​; Modéliste​; Styliste…
  • Exemples de formations : CAP métiers de la mode; Bac professionnel métiers de la mode-vêtements​; BTS métiers de la mode-vêtements​; Diplôme des métiers d’art (DMA), DNMADE Mention Mode​…

Textile

  • Exemples de métiers : Designer textile​; Tapissier​…
  • Exemples de formations : Bac professionnel métiers du cuir; BTS métiers de la mode et du textile​; Diplôme des métiers d’art (DMA) arts textiles​…

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Formations post-bac du luxe et de la mode durable

À NOTER

  • Seules les formations bénéficiant d’une reconnaissance de l’état sont citées;
  • Il existe des formations « durables » dans d’autres secteurs du Luxe (Voyage, Immobilier…) que nous n’abordons pas ici;
  • Les formations présentées ne sont pas exhaustives; il sera préférable de solliciter l’accompagnement d’un coach en orientation pour obtenir des recommandations personnalisées.

BTS (Brevet de Technicien Supérieur)

  • Diplôme national Bac+2
  • Ouvert aux bacheliers, inscription sur Parcoursup / CFA, lycées, écoles spécialisées… / Scolaire ou alternance
  • Nombreux domaines et options possibles : BTS métiers de la mode (Vêtements ou Chaussure et Maroquinerie); BTS MCO (Management Commercial Et Opérationnel) Option Luxe; BTS liés à l’environnement (Métiers de l’eau, Maintenance des systèmes, Métiers des services à l’environnement); BTS Innovations textile…
  • NB : les BTS « artistiques » (métiers de la mode-chaussure et maroquinerie; métiers de la mode-vêtements; design de Mode, Textile et Environnement option Textile…) ont été remplacés par le DN MADe mention Mode.
  • Les enjeux RSE peuvent figurer dans les programmes de certains BTS;
  • Poursuite d’études : licence pro, Bachelor…

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DD&RS : le label développement durable de l’enseignement supérieur

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label DD&RS

DN MADe (Diplôme National des Métiers d’Art et du Design)

  • Grade de licence (3 ans)
  • Ouvert aux bacheliers, inscription sur Parcoursup  / Scolaire ou Apprentissage
  • Une quinzaine de mentions disponibles : Mode, Matériaux, Espace, Objet (ex : design de produits, matériaux et éco-conception)…
  • Certaines mentions et formations abordent la durabilité de façon transversale.
  • Poursuite d’études : Master, DSAA (Diplôme Supérieur d’Arts Appliqués), DNSEP (Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique)…

Bachelor

  • Bac+3 (RNCP niveau 6)
  • Ouvert aux bacheliers, inscription sur Parcoursup ou directement sur le site de la formation / Scolaire ou alternance
  • Le choix de la formation dépendra de la finalité recherchée (« création » ou « business ») : Bachelor Styliste Designer de Mode, Bachelor Design de mode, Bachelor Styliste modéliste, Bachelor management du luxe…
  • Il convient de vérifier si la formation aborde la RSE dans ses programmes.
  • Poursuite d’études :Master…

9 exemples de bachelors « durables » pour la mode et le luxe

  1. Bachelor Environnement et développement durable (Unilassalle);
  2. Cours Green Luxury du Bachelor Designer créateur de produit de mode et textile (école Conte);
  3. Séminaire Sustainability dans le luxe du Bachelor Marketing du luxe (EIML Paris);
  4. Bachelor of Fine Art en 4 ans de Parsons Paris intègre le Sustainable systems dans son programme.;
  5. Bachelors Luxury Management et International Luxury d’ISG Luxury (Culture écologique, Durabilité et luxe…);
  6. Bachelor Stylisme et modélisme de Modart International (Eco-conception, développement durable et sourcing éco-responsable, Démarche créative éco-responsable et cahier de recherche);
  7. Avec le concours du groupe LVMH, EHL Hospitality Business School lance l’Executive Master Leading Sustainable Excellence in Luxury Retail & Hospitality;
  8. Bachelor TBS Education (Négociation responsable, Doing sustainable business);
  9. Istituto Marangoni intègre la RSE de façon récurrente dans certaines de ces formations (Bachelor of Arts…).

Licence professionnelle

  • Bac+3 / durée : 1 à 3 ans
  • Plusieurs domaines et parcours : LP Métiers de la mode, LP Développement durable…
  • Il convient de vérifier si la formation aborde la RSE dans ses programmes.
  • Poursuite d’études : Master…

4 exemples de LP Métiers de la mode durables

  1. Université d’Angers – Plusieurs parcours (Modélisme industriel – vêtement; Méthodes et gestion de production industrielle – vêtement mode et luxe…), parmi lesquels le parcours Management international de la mode propose une UE Connaissance et enjeux de la mode éthique et écoresponsable.
  2. Université Caen Normandie – compétences acquises : Intégrer les enjeux environnementaux; Maitriser les bonnes pratiques en matière de durabilité et d’éthique dans le processus de production.
  3. Université Savoie Mont Blanc – parcours (en anglais) OUTDOOR SOFTGOODS DESIGN & DEVELOPMENT, intègre un module « Sustainable development in the sports industry ».
  4. Université Lumière Lyon2 – module « Lean management et développement durable » du parcours Productique et Méthodes.

DSAA (Diplôme supérieur des arts appliqués, spécialité Design)

  • Grade de master (2 ans)
  • Ouvert aux titulaires d’un diplôme national des métiers d’art et du design ou d’un diplôme (RNCP) de niveau 6 minimum  / Scolaire ou Apprentissage
  • Plusieurs parcours (et options) possibles selon la formation : Matériaux et Conception d’Espaces Durables, Design des mutations écologiques, Design d’espace et ruralité : accompagner les mutations écologiques, design d’objets des mutations écologiques, Design & prospective : textile, vêtement, tendances …
  • Les notions de durabilité y sont souvent présentes.
  • Poursuite d’études : Master Design, Doctorat.

Master

  • Bac+5 / durée : 1 à 2 ans
  • Accessible aux Bac+3 / Parcoursup ou écoles / Scolaire ou alternance
  • A l’instar des bachelors, il existe de nombreuses possibilités de parcours en master, selon la finalité (« création » ou « business »), voire le niveau de diplôme visés : Master 2 Mode et Industries Créatives Mention : Industries culturelles; Master marketing du luxe…
  • Il convient de vérifier de quelle façon la formation aborde la RSE dans ses programmes.
  • Poursuite d’études : Autre master, Doctorat

7 exemples de masters « durables »

  1. La RSE et la Transition écologique est abordée en année 1du Mastère Management de la mode et du luxe de ISAL Paris.
  2. Master Spécialisé Manager de Projet d’Innovation en Économie Circulaire proposé par ITECH Lyon.
  3. Supdeluxe intègre la durabilité dans plusieurs de ses formations : MBA Luxury Brand Marketing & International Management, Msc Global Luxury Brand Management, MSc Luxury Fashion Management, MSc Luxury Gastronomy & Wine Management.
  4. En 2ème année du Mastère Marketing du luxe de EIML Paris : « Sustainability in luxury ».
  5. « Développement durable/Responsabilité sociale des entreprises » font partie des objectifs du Master spécialisé MIM (Manager de l’innovation et du développement de produits dans la mode), co-proposé par ENSAIT et IFM Paris.
  6. SKEMA BS propose plusieurs formations qui abordent, peu ou prou, les enjeux de la durabilité : MSc Entrepreneurship and Design for Sustainability, MSc Global Luxury and Management, MSc Luxury & Fashion Management.
  7. La durabilité est aussi abordée au sein des formations MSc Global Luxury Brand Management, MSc Luxury Fashion Management, MSc Luxury Gastronomy & Wine Management et PGE de SUP de LUXE / EDC Paris BS.
ENTRETIEN AVEC FABIENNE CHAMEROY (Aix Marseille Université)

Entretien avec Fabienne Chameroy, Vice-Doyenne Relations entreprises de la Faculté d’Economie et de Gestion à Aix Marseille Université, Responsable pédagogique Master Management de la Mode, Maître de Conférences HDR en Sciences de Gestion.

Le Master Mode parcours « Management de la mode », créé en 2011, permet notamment de « sensibiliser (les étudiants) aux problèmes de RSE et de protection de l’environnement, de la conception du vêtement à sa réutilisation après achat ». De quelle façon ces sujets sont-ils abordés ? Ces enjeux étaient-ils déjà enseignés lors de la création du Master ?

Le Master Mode – parcours « Management de la Mode », créé en 2011, a progressivement intégré les problématiques de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) et de protection de l’environnement dans son programme.

L’approche pédagogique repose sur plusieurs axes :

  • Cycle de vie du vêtement : les étudiants sont sensibilisés à l’ensemble du processus, de la conception des matériaux (fibres biologiques, alternatives durables, couleurs), éco-conception, à la réutilisation et au recyclage des vêtements (économie circulaire, seconde main, upcycling).
  • Enjeux RSE dans la chaîne de valeur : La formation intègre les problématiques de production éthique, la traçabilité des matériaux et la limitation des déchets industriels.
  • Normes environnementales et certifications : les étudiants sont sensibilisés à l’intérêt des labels et systèmes d’évaluation/certification par des tiers de confiance ; à connaître les réglementations en vigueur dans l’industrie de la mode.
  • Innovations et business models durables : le programme inclut des études de cas sur des marques adoptant une démarche écoresponsable (mode éthique, location de vêtements, slow fashion vs fast fashion) et des formations en entrepreneuriat avec l’équipe universitaire Pépite Provence. Ils travaillent également sur la réponse aux nouvelles attentes des consommateurs : inclusivité, éco-responsabilité, co-création, transparence.
  • Projets et partenariats : certains modules impliquent des collaborations avec des entreprises et startups engagées dans la mode durable, permettant aux étudiants d’appliquer leurs connaissances dans des contextes réels.

Lors de sa création, le Master n’intégrait pas ces problématiques de manière aussi approfondie. En 2011, les enjeux environnementaux et sociaux dans la mode étaient moins prioritaires dans l’enseignement.

Avec la montée en puissance des préoccupations RSE dans l’industrie textile et les nouvelles attentes des consommateurs, ces sujets ont progressivement pris plus de place dans le programme.

Aujourd’hui, ils sont au cœur du Master, alignés avec les défis contemporains de la mode.

Faut-il avoir préalablement suivi un parcours spécifique pour postuler au Master Mode ? Autrement dit, est-il ouvert à tous les bac+3 ?

Il s’agit d’un diplôme spécialisé en management de la mode, principalement destiné aux étudiants issus des filières économie et gestion. Cependant, chaque année, nous accueillons également des profils variés, issus de droit, de langues étrangères, ainsi que de formations créatives, enrichissant ainsi la diversité des approches et des compétences au sein du programme.

Vers quels métiers se destinent les diplômés du Master Mode ?

Les débouchés du diplôme couvrent un large éventail de métiers liés à l’industrie de la mode, notamment dans les domaines du marketing, de la création, de l’influence et du développement commercial.

Parmi les principales opportunités professionnelles, on retrouve :

  • Marketing/ création/ communication : responsable marketing digital, chef de projet événementiel, social media manager, chef de produit, brand manager, responsable de collection, responsable production.
  • Influence/Relations publiques : responsable relations publiques, consultant en stratégie d’influence.
  • Développement commercial et retail : Business developer, category manager, acheteur mode, responsable visual merchandising.

Cette diversité de métiers reflète la richesse des compétences acquises au sein du programme, permettant aux diplômés de s’insérer dans des secteurs variés, allant des grandes maisons aux marques émergentes et aux startups innovantes.

Des étudiants créent leur propre marque ou activité.

Alors qu’elles sont pléthoriques dans le privé, il existe peu de formations universitaires dédiées au Luxe ou à la Mode durable. Comment l’expliquez-vous ?

Le secteur du luxe est historiquement lié aux grandes écoles et aux écoles spécialisées. Ces institutions ont développé des programmes spécifiques en partenariat avec les grandes maisons, elles sont principalement basées à Paris.

Nous avons adopté un positionnement différenciant, en nous appuyant sur les compétences clés du secteur et les besoins des entreprises : création et gestion de marque, relation client, digitalisation, influence, développement stratégique et commercial.

Notre formation couvre l’ensemble de la chaîne de valeur de l’industrie de la mode, en intégrant une maîtrise des outils numériques et analytiques, notamment le data-mining et des logiciels professionnels tels qu’InDesign.

À chaque étape de cette chaîne, nous formons les étudiants aux enjeux du développement durable, un axe central de notre programme et un véritable facteur de différenciation.

Cette approche est renforcée par l’ancrage universitaire transdisciplinaire, combinant des méthodes de travail académiques et une culture approfondie de la mode : histoire du vêtement, sociologie, sa valeur patrimoniale et créative.
Le management de la mode est un domaine en avance sur les technologies digitales, souvent adoptées par d’autres secteurs par la suite.

En parallèle, l’industrie de la mode demeure l’un des plus mauvais élèves en matière de développement durable, ce qui justifie pleinement une formation intégrant ces enjeux à chaque étape de la chaîne de valeur.

Fabienne Charmeroy AMU
ENTRETIEN AVEC PASCALINE WILHELM (ENAMOMA-PSL)

Entretien avec Pascaline Wilhelm, Directrice exécutive programme ENAMOMA-PSL.

Le Master Mode et Matière (ENAMOMA-PSL) a été co-construit avec 3 établissements aux profils de formations très différents de l’université PSL : Dauphine, l’Ecole des Arts décoratifs et Mines Paris. A quels objectifs (ou quels constats) répond cette création ?  Vers quels métiers mène-t-il ?

ENAMOMA-PSL, un Engagement pour des Alternatives Mode et Matière créatives et responsables.

Le programme Mode & Matière est un espace d’expérimentation interdisciplinaire qui croise les expertises académiques, artistiques et professionnelles.

Pour adresser les enjeux de la transition écologique, sociale et technologique, la créativité est approchée à toutes les étapes de la filière mode.

Les matières sont placées au cœur d’un design de mode tourné vers l’usager, en lien avec les développements en sciences et ingénierie des matériaux et les exigences de l’écoconception

Le programme forme les futurs acteurs du design, du management et de l’ingénierie avec des domaines d’application qui vont du prêt-à-porter au secteur du luxe, en passant par des univers comme celui des vêtements de travail ou celui de la santé.

La diversité des profils qui composent chaque promotion se retrouve dans l’étendue des métiers visés. Nos étudiants sont très largement engagés dans toute la filière mode et textile, avec la richesse d’entreprises et d’organisations aux structures très diversifiées de l’amont à l’aval.

Ils sont principalement présents dans les équipes RSE, design, innovation, management, marketing et qualité.
Certains étudiants poursuivent également leur formation avec un doctorat.

Le Master 1 ENAMOMA (trajectoire « Création ») n’est ouvert qu’aux titulaires d’un diplôme bac+3 en design vêtement ou textile et matières. Tandis que tous les profils (design, sciences des organisations, sciences et ingénierie) peuvent suivre le programme du Master 2 dès lors qu’ils sont détenteurs d’un diplôme de niveau Bac+4 (Master 1 ou équivalent). Pour quelles raisons ? Quels sont les profils d’étudiants susceptibles d’intégrer ce Master ? Quels cours sont dispensés dans le cadre des 6 blocs de formations et des 3 trajectoires ?

Notre formation est interdisciplinaire et multiculturelle (notre Master est en anglais). Elle est un lieu de partage et d’écoute entre différentes disciplines qui permet à nos étudiants d’acquérir des connaissances pointues sur la filière mode et de développer un esprit critique pour créer des alternatives créatives et responsables pour le futur de la mode.

Pour ce faire, chaque étudiant apporte son expertise disciplinaire développée en amont. Dans des disciplines comme le management ou l’ingénierie, il est nécessaire d’aller au moins jusqu’au Master 1 pour acquérir un socle de connaissances solide.

Il est par ailleurs attendu des étudiants qui intègrent la formation en Master 1 qu’ils développent leur pratique en design vêtement et design textile.

Quels sont les profils d’étudiants susceptibles d’intégrer ce Master ?

Nous composons chaque année un collectif. Chaque personne apporte son expertise, ses centres d’intérêt, sa culture et doit être prêt à s’engager dans la formation avec curiosité et détermination.

Suivre la formation est une expérience exigeante où chacun développe sa trajectoire personnelle au contact et avec le collectif.

Quels cours sont dispensés dans le cadre des 6 blocs de formations et des 3 trajectoires ?

Les étudiants vivent une expérience personnelle et interdisciplinaire via une diversité de dispositifs pédagogiques : séminaires de sensibilisation, cours d’approfondissement, workshops, rencontres, visites industrielles et artistiques.

Chaque cours doit être à la portée de tous et permet la transmission de connaissances via l’équipe pédagogique et entre les étudiants. Les projets tutorés permettent à chacun de développer finement son expertise personnelle.

Des cours optionnels peuvent être suivis grâce à la richesse de l’offre d’enseignements de l’Université PSL L’apprentissage repose autant sur des lectures et écrits que sur de la pratique et des mises en situation.
Le programme est détaillé sur notre site www.enamoma.psl.eu.

ENAMOMA est l’acronyme de Engagement pour des Alternatives Mode et Matière créatives et responsables. Comment se traduit cet engagement dans le programme de cette formation ? La présence de grandes banques françaises partenaires (Dauphine) ou « Grands donateurs » (Fondation Mines Paris) n’est-elle pas de nature à fausser la perception de cet engagement en raison de leur rôle dans le financement des énergies fossiles ?

L’indépendance d’analyse et d’action est un des fondamentaux de l’université publique française.

Notre formation est organisée autour d’une équipe dédiée, à la fois transverse et intégrée aux établissements de l’Université PSL. Cette interdisciplinarité est essentielle à l’étude des matières qui sont au cœur de la réflexion.

L’enseignement et la recherche sont menés en connexion avec les acteurs de la filière mode pour que les mondes académiques, artistiques et professionnels soient amenés à réfléchir ensemble aux transformations contemporaines.

Ce dialogue est pour nous essentiel.  Il a notamment lieu à l’occasion de partenariats pédagogiques développés avec attention avec des acteurs de la filière.

Pascaline Wilhelm ENAMOMA PSL
ENTRETIEN AVEC AGNÈS OUHIOUN (EFAP / IFA)

Entretien avec Agnès OUHIOUN, Directrice Marketing & Communication des écoles EFAP & IFA Paris.

Durant les 4 premières années du Programme Efap, la Responsabilité Sociétale des Entreprises est abordée dans le cadre de « RSE Lab Day » (1ère, 3e et 4e année) et d’un volet consacré à la « communication RSE » (3e année) des Enseignements pratiques et théoriques. En quoi consistent les RSE Lab Day ? Envisagez-vous d’intégrer les sujets du Développement durable de façon transversale dans les années à venir ?

Les RSE Lab Days à l’EFAP sont des journées dédiées à la sensibilisation et à la formation des étudiants aux enjeux de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE).

Ces événements incluent des activités interactives et des challenges pour engager les étudiants sur ces thématiques cruciales. Ils doivent par exemple travailler sur une campagne de communication digitale de sensibilisation pour une cause qui leur tient à cœur (cancer du sein, harcèlement scolaire, protection des océans…) en concevant des supports de communication vidéo, réseaux sociaux, affichage, etc.

Les enseignements de l’EFAP sont orientés dès la première année vers une prise de conscience des enjeux de préservation de l’environnement et d’équité sociale et économique.

Quelques cours déployés dès les premières années et tout au long du cursus :

  • Communiquer dans un monde nouveau
  • Stratégies de marketing digital responsable pour un impact environnemental durable
  • Stratégie de contenus / Slow content
  • Communication des organisations responsables
  • L’évènementiel éco-responsable
  • Stratégies d’influence éthique et contenu responsable
  • Éco-conception / Green design.

En 5e année, ce ne sont pas moins de 22 spécialisations de MBA auxquelles peuvent accéder les étudiants de l’Efap : Communication RSE & Développement Durable, Communication & Marketing des Vins et Spiritueux, Communication & Gastronomie, Communication in Fashion Industries, Luxury Communication & Strategies, Digital Marketing & Business Luxe… Que conseiller à un lycéen que les sujets du Luxe et de la mode durables intéressent et qui hésiterait quant au parcours de formation à privilégier ?

Un étudiant de l’EFAP suit un cursus généraliste en communication et marketing durant les 4 premières années puis choisit une spécialisation parmi les 22 proposées en 5e année (MBA Spécialisés). L’hyperspécialisation dans les domaines du Luxe, de la mode ou de la RSE se fait donc en 5e et dernière année.

Un étudiant intéressé par les enjeux de Luxe et de la mode durable peut choisir parmi les MBA Spécialisés :

  • Luxury Communication & Strategies,
  • Communication RSE & Développement Durable,
  • Communication & Marketing des Vins et Spiritueux,
  • Communication in Fashion Industries,
  • Digital Marketing & Business Luxe.

Certaines de ces spécialisations peuvent être suivies en temps plein (6 mois de cours + 6 mois de stage) ou en alternance durant 1 an.

Quel que soit son choix de spécialisation, il est important de noter que les enjeux RSE sont omniprésents dans les enseignements de l’EFAP sur les 5 années d’études et adaptés aux secteurs et métiers auxquels l’étudiant se prépare.

Quelques spécificités des programmes EFAP

Formation EFAP « Full English » possible dès la 1ère année : pour ambitionner travailler dans les industries du luxe, l’anglais courant est aujourd’hui une priorité, l’EFAP offre cette opportunité d’apprentissage à ses étudiants, via le cursus « Full English ».

Stages et expériences professionnelles : chaque année, les étudiants de l’EFAP réalisent un stage en entreprise en France ou à l’international. Grâce au réseau de l’EFAP, ils peuvent orienter leurs recherches de stages vers des entreprises engagées dans la durabilité et spécialisées dans l’univers du luxe. Cela leur permet d’acquérir une expérience pratique et de comprendre les défis et opportunités du secteur. Sur 5 années d’études, ils peuvent réaliser plus de 21 mois de stages et acquérir une réelle expérience professionnelle et/ou finir leur cursus en apprentissage.

Projets et initiatives durables : les étudiants de l’EFAP participent à des projets, compétitions, challenges qui promeuvent la mode durable et les industries du luxe. Cela peut inclure l’organisation d’événements pour sensibiliser à la durabilité ou la réalisation de concepts publicitaires éco-responsables, à titre d’exemple.

Sur le même sujet : Efap, l’école de communication qui incube les talents de demain

Les formations disponibles à l’IFA couvrent 2 cursus (Stylisme & Création et Fashion business & marketing) et 2 diplômes (Bachelor mode en 3 ans et MBA Cycles experts en 2 ans). Pouvez-vous présenter ces différentes formations ?

IFA Paris propose deux filières :

Filière Stylisme & Création

Cette filière incarne l’ADN créatif de l’école, prépare aux métiers du stylisme et du modélisme. Elle repose sur un cursus en deux parties : un Bachelor en 3 ans et un Cycle Expert en 2 ans.

Années 1 à 3 : Bachelor Stylisme & Modélisme

Focus sur les métiers de la création de mode, Compréhension de toute la chaîne de création d’une collection de mode, Développement de la culture mode et de son identité créative.

Les temps forts du Bachelor : 
Développement du processus créatif, Production de looks dès les premières semaines, Découverte du Tech Lab et de ses outils, Travail avec l’Intelligence Artificielle, Participation au défilé annuel de l’école, Réalisation d’une collection de A à Z.

Années 4 à 5 : Cycle Expert

Sensibilisation à la conciliation entre enjeux commerciaux et créatifs, Réflexion artistique et questionnement des choix créatifs, Choix d’une spécialisation pour développer son expertise.

Les expertises de la 5e année :
 Direction créative de maisons de mode, Entreprenariat de mode – option design, Mode durable – option design, Mode image et production media.

Filière Fashion Business & Marketing

Prépare les nouveaux leaders des secteurs de la Mode et du Luxe. Cette filière propose un cursus en deux parties : un Bachelor en 3 ans et un Cycle Expert en 2 ans.

Années 1 à 3 : Bachelor Fashion Marketing & Management

Acquisition d’une solide culture du secteur, Gestion événementielle de la mode, Développement de l’esprit critique, de la finesse d’analyse et de la créativité.

Les temps forts du bachelor : 
Découverte de la « Fashion Scene » de Paris, Développement d’un plan de collection, Participation à l’organisation d’événements créatifs de l’école, Focus sur l’Intelligence Artificielle, « Fashion with purpose » (projet d’extension ou de création d’une marque).

Années 4 à 5 : Cycle expert

Approfondissement de l’interprétation des codes et des différents enjeux de l’écosystème de la mode, Renforcement en stratégie d’entreprise, Choix d’une spécialisation pour développer son expertise.

Les expertises de la 5e année :
Mode image et production média, Entreprenariat de mode – option tech, Marketing de la mode et du luxe, Mode durable – option business.

A l’IFA, de quelles façons les sujets du développement durable sont-ils enseignés dans le cadre du Cycle expert Mode Durable des options Design et Business ?

Certification et cadre pédagogique

  • Programme basé sur la Certification Conscious Fashion and Lifestyle Network des Nations Unies (initiative des Nations Unies qui mobilise les acteurs de la mode et du lifestyle pour promouvoir des pratiques durables).
  • Une pédagogie ancrée sur les SDG (Sustainable Development Goals) des Nations Unies (exemples : accès à l’éducation pour tous, égalité homme/femme etc.)
  • Programme structuré autour de la chaîne de valeur.

Projet annuel structurant : développement d’une éco-line

Les étudiants choisissent une marque qui n’a pas forcément d’éco-line et auditent son impact.
Proposition d’une éco-line intégrant des stratégies durables (optimisation des ressources environnementales, inclusivité, diversité etc.).

Méthodologie et approche itérative

  • Audit basé sur les outils EP&L de Kering et GoodOnYou (notation des marques sur leur impact environnemental).
  • Exploration progressive des stratégies de durabilité à chaque étape (du sourcing à la commercialisation).
  • Modules tout au long de l’année qui nourrissent leur réflexion et leur projet (exemple : module sur les matériaux innovants).

Interdisciplinarité et collaboration

Options Design et Business associées pour favoriser les échanges et l’émulation.
Chaque étudiant développe son propre projet tout en bénéficiant des apports des autres.

Quels sont selon vous les métiers du Luxe et de la mode durables amenés à se développer dans les années à venir ?

Les métiers du luxe et de la mode durables sont en pleine expansion, portés par une prise de conscience croissante des enjeux environnementaux et sociaux.

Ces métiers en particulier vont, selon nous, se développer dans les années à venir :

  • Designer de mode durable : les designers qui intègrent des principes de durabilité dans leurs créations, en utilisant des matériaux écologiques et en privilégiant des processus de production éthiques.
  • Responsable RSE : Ce rôle consiste à intégrer des pratiques durables dans toutes les opérations de l’entreprise, de la chaîne d’approvisionnement à la gestion des déchets.
  • Expert en upcycling et recyclage : Les professionnels qui transforment des matériaux usagés ou des déchets en nouveaux produits de luxe, réduisant ainsi l’impact environnemental.
  • Consultant en durabilité : Les consultants aident les marques de luxe à adopter des pratiques plus durables, en analysant leurs opérations et en proposant des solutions pour réduire leur empreinte carbone.
  • Marketing et communication durable : Les professionnels du marketing et de la communication mettent en avant les initiatives durables des marques et sensibilisent les consommateurs aux enjeux environnementaux et sociaux.
  • Métiers visant à valoriser l’artisanat et les savoir-faire traditionnels : les techniques artisanales et les savoir-faire traditionnels sont souvent plus durables que les méthodes de production industrielle.
    Ces métiers reflètent une tendance plus large vers une mode et un luxe plus responsables, où l’innovation et la durabilité vont de pair.
Agnès Ouhioun EFAP et IFA Paris
ENTRETIEN AVEC GEOFFROY BELHENNICHE (UNILASALLE)

Entretien avec Geoffroy Belhenniche, Directeur UniLaSalle Rennes.

Certaines des formations, voire des parcours métier, proposés par Unilasalle peuvent intéresser les jeunes qui se destinent à l’ingénierie durable dans les secteurs de la Mode ou du Luxe. Pourriez-vous présenter les formations concernées ?

Installée sur le campus de Ker Lann à Bruz (Ille-et-Vilaine), UniLaSalle Rennes s’impose comme la première école en France entièrement consacrée aux enjeux environnementaux.

Actuellement, 550 étudiants y suivent une formation spécialisée, parmi deux cursus :

  1. Ingénieur Génie de l’environnement
  2. Bachelor Environnement et Développement Durable

À travers ces formations, les étudiants acquièrent des compétences adaptées à une grande diversité de domaines d’activité, y compris ceux de la mode et du luxe, où les enjeux environnementaux deviennent incontournables.

Trois parcours au cœur du diplôme d’ingénieur

Le cursus d’Ingénieur en Génie de l’Environnement s’articule autour de trois axes majeurs, visant à préparer les futurs experts aux défis de la transition écologique :

  • Stratégie pour des organisations durables : ce parcours forme à la conception de systèmes énergétiques modernes et efficients pour les entreprises et les territoires, en s’appuyant sur les énergies renouvelables et les smart grids afin de réduire l’empreinte environnementale.
  • Technologie de traitement et éco-efficacité : les étudiants se spécialisent dans la préservation des écosystèmes terrestres et marins, avec une approche axée sur l’anticipation des risques, l’évaluation des impacts environnementaux et la réduction des pollutions.
  • Transition énergétique : grâce à l’éco-conception et à l’économie circulaire, ce parcours vise à accompagner les mutations écologiques et sociétales des entreprises et des territoires, en abordant des enjeux tels que la sobriété énergétique, la biodiversité, les mobilités alternatives ou encore l’adaptation au changement climatique.

Vers quels métiers du Luxe ou de la Mode durable pourraient mener ces formations ?

Les diplômés d’UniLaSalle Rennes s’insèrent dans des secteurs clés de la transformation environnementale :

  • Développement des énergies renouvelables & efficacité énergétique
  • Gestion des ressources & réemploi
  • Économie circulaire & analyse du cycle de vie
  • Mobilité durable & aménagement des territoires
  • Génie écologique & gestion de l’eau
  • Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) & éco-conception

Avec une approche pédagogique ancrée dans les réalités du terrain, UniLaSalle Rennes forme une nouvelle génération d’experts capables de relever les défis environnementaux d’aujourd’hui et de demain.

Geoffroy BELHENNICHE Unilasalle Rennes
ENTRETIEN AVEC JOSÉ EMMANUEL SOLER (GLION)

Entretien avec Jose Emmanuel Soler, Directeur Général de Glion.

Pour un lycéen français, quels sont les pré-requis pour intégrer un Bachelor Glion ?

Les étudiants doivent avoir un baccalauréat (ou un diplôme équivalent) avec une solide maîtrise de l’anglais (minimum niveau B2). Glion valorise également des compétences en communication, ainsi qu’une passion pour l’industrie de l’hôtellerie et du luxe.

Les critères d’admission pour le Bachelor à Glion Institut de Hautes Études sont les suivants :

  • Âge Minimum : 17,5 ans au début du programme.
  • Éducation : Diplôme de niveau secondaire supérieur (Baccalauréat, IB, ou équivalent).
  • Évaluation : Évaluation personnalisée de la motivation et des documents administratifs de l’étudiant, pouvant inclure un exercice préalable.
  • Langue Anglaise : idéalement 2 ans dans un établissement anglophone. Exigences minimales : IELTS 5.5 (min. 5.0 par sous-composant), TOEFL 70 (internet-based) ou 525 (papier), ou First Cambridge Exam Grade C.

De quelles façons les enjeux du développement durable dans les secteurs du Luxe sont-ils enseignés à Glion ?

Glion, l’un des leader mondiaux de la formation en management hôtelier, intègre pleinement les enjeux du développement durable dans ses programmes académiques.

Son approche transversale permet aux étudiants de développer une expertise approfondie sur la durabilité dans les secteurs du luxe et de l’hôtellerie.

Les Bachelors incluent des modules comme Sustainable Design, Wellness and Wellbeing et Sustainability in Ethical Business, abordant les concepts de durabilité et l’impact des nouvelles technologies. Dès le semestre 2, les étudiants collaborent avec des marques de luxe sur des projets appliqués, intégrant la durabilité dans la production, la distribution et la communication.

Glion s’engage également au niveau institutionnel en réduisant l’empreinte écologique de ses campus et en alignant ses actions sur quatre Objectifs de Développement Durable (ODD) des Nations Unies : éducation de qualité, santé et bien-être, consommation responsable et action climatique.

L’institution renforce cet engagement via le Glion Research & Innovation Center, où la recherche et l’enseignement portent sur l’éthique, la responsabilité sociale et les stratégies commerciales durables. Des cours spécialisés sur la durabilité sont intégrés aux Bachelors, Masters et Masters exécutifs, couvrant des sujets tels que le luxe durable et l’entrepreneuriat responsable.

En combinant enseignement académique, projets pratiques et initiatives institutionnelles, Glion forme des leaders capables de comprendre et de relever les défis du développement durable et de promouvoir des pratiques écoresponsables dans l’industrie du luxe.

Les diplômes Glion de Bachelor et de Master permettent-ils une poursuite d’études en France ?

Les diplômes de Bachelor et de Master délivrés par le Glion Institute of Higher Education sont accrédités par la New England Commission of Higher Education (NECHE), une institution d’accréditation américaine, garantissant ainsi la qualité académique et internationale des formations proposées.

En ce qui concerne la poursuite d’études en France, la reconnaissance des diplômes étrangers, y compris ceux de Glion, dépend des établissements d’enseignement supérieur français, qui évaluent individuellement leur équivalence et admissibilité.

Si un étudiant souhaite poursuivre ses études en France après un diplôme de Glion, il est recommandé de contacter directement les établissements français envisagés pour obtenir des informations sur la reconnaissance des diplômes et les conditions d’admission.

Chaque année, de nombreux diplômés de Glion poursuivent des études complémentaires en France et à l’étranger, attestant ainsi de la valeur et de la reconnaissance des compétences acquises grâce aux programmes de l’institut.

Glion accueille une majorité d’étudiants issus d’Europe, et une part significative des stages effectués dans le cadre du cursus se déroulent également sur le continent, la France figurant parmi les trois destinations les plus prisées tant pour les étudiants que pour les stages.

Cette forte présence en Europe illustre la reconnaissance du niveau de formation dispensé à Glion ainsi que l’intérêt des établissements académiques et des employeurs pour ses diplômés.

Ainsi, bien que la poursuite d’études en France dépende des critères de chaque établissement, l’expérience montre que les diplômés de Glion intègrent régulièrement des formations académiques complémentaires en France et à l’international.

Les frais académiques d’un Bachelor Glion en Suisse avoisinent les 200 000 francs suisses pour 4 années d’études (hors hébergement, nourriture…). Proposez-vous des dispositifs d’aide au financement ?

Glion propose une dizaine de bourses d’études basées sur des critères tels que la nationalité ou d’autres facteurs spécifiques. Ces bourses sont destinées aux nouveaux étudiants ainsi qu’à ceux déjà inscrits, et visent à soutenir les étudiants financièrement. Elles couvrent uniquement les frais de scolarité et la politique des bourses est révisée chaque année.

José Emmanuel Soler DG Glion
ENTRETIEN AVEC WILLIAM GROULT (DUCASSE)

Entretien avec William Groult, Directeur des Programmes et de la Formation au sein d’Ecole Ducasse Paris Campus.

Ecole Ducasse compte parmi les quelques formations à faire rimer haute gastronomie et écologie. Comment enseignez-vous l’art de cuisiner bon, sain et durable à vos étudiants ?

Nous dispensons un module « Cuisine saine et durable » en 4 semaines, centré autour de la cuisine du végétal, des légumineuses et des aliments fermentés dans laquelle la protéine est un condiment.

A travers un atelier « Alimentation durable et biodiversité dans l’assiette », nous sensibilisons nos étudiants aux enjeux de biodiversité avec un focus sur les labels et le sourcing local.

Nos étudiants Bachelors ont également accès à une visite immersive de la ferme pilote Hectar, notre partenaire pionnier dans le développement de nouveaux modèles agricoles durables, incluant un atelier participatif sur les sols vivants, en collaboration avec Moët Hennessy.

Nous avons un jardin comestible, entretenu en permaculture par les élèves, permettant de mettre en pratique le triptyque : agriculture raisonnée, saisonnalité et traçabilité. On y cultive des vivaces, des aromatiques, des fleurs comestibles et des légumes de saison.

Des intervenants académiques sensibilisent régulièrement nos étudiants sur les pratiques durables en restauration (gestion des stocks, des déchets, de l’eau, empreinte carbone…) et abordent la nutri-écologie et l’impact du sourcing sur l’environnement, la nutrition et la santé.

Nous offrons également des masterclass avec des artisans-producteurs engagés (pêche durable et responsable, pâtisserie Vegan, sans gluten et sans lactose).

Avec ces initiatives, École Ducasse forme des chefs non seulement talentueux, mais également acteurs d’une transition engagée vers une alimentation plus durable, conscients de leur impact environnemental dans le cadre de leur pratique professionnelle.

La vision d’Alain Ducasse, Fondateur d’École Ducasse, chef étoilé et figure emblématique de la gastronomie, inspire l’esprit de ce partenariat : « Un produit bien sourcé est un produit bon à manger, bon économiquement et bon pour la planète ».

Ecole Ducasse est une « école professionnelle reconnue par le CCF ». Qu’est-ce que le Collège Culinaire de France ?

Fondé en 2011, le Collège Culinaire de France mobilise sur tout le territoire des hommes et des femmes engagés activement pour une cause : faire de l’artisanat et de la diversité culinaire, une alternative durable face à l’industrialisation et la standardisation de l’alimentation, de la restauration et de la production.

Le Chef Alain Ducasse est un des fondateurs de ce collectif et l’engagement de l’Ecole s’inscrit en faveur de la transmission et l’avenir de l’artisanat culinaire.

Nous souhaitons sensibiliser les futurs professionnels à l’importance de soutenir les producteurs et artisans, qui chaque jour mettent en œuvre un savoir-faire artisanal afin d’offrir des produits de qualité pour ensuite être sublimés dans l’assiette grâce aux chefs et leur créativité.

Quels sont les métiers de la haute gastronomie durable amenés à se développer dans les années à venir ?

L’intelligence artificielle est un enjeu majeur pour les futurs chefs. Cela va leur permettre de gagner du temps sur des tâches administratives pour se dédier à des tâches plus créatives.

C’est d’autant plus précieux qu’aujourd’hui, le chef est sursollicité : il doit être un bon manager, un bon gestionnaire, il y a de plus en plus d’attentes sur les questions d’alimentation et développement durable (comme la réduction de son empreinte carbone et le sourcing).

Ainsi, l’intelligence artificielle offre un potentiel de transformation pour le secteur de la restauration, à condition de savoir l’utiliser correctement ce qui implique de maîtriser son domaine d’expertise, sinon les résultats sont moins bons.

Ceux qui seront formés à l’IA auront un avantage par rapport aux autres (aide à la construction des planning, optimisation de la gestion des stocks, planification des menus, calcul de l’empreinte carbone, rédaction de fiches techniques, optimisation des recettes etc…).

Face à ce besoin de formation, les métiers de consultants ou de formateurs dans ce domaine vont se développer y compris dans le secteur de la haute gastronomie ; une opportunité pour les personnes capables d’accompagner les Chefs afin de leur permettre de répondre aux mutations du marché.

3 formations post-bac sont accessibles à l’école Ducasse (Diplôme Supérieur des Arts Pâtissiers, Bachelor in Culinary Arts et Bachelor in French Pastry Arts). Que conseiller à un lycéen passionné de cuisine qui hésiterait à choisir l’une des vos formations ?

Nos formations dispensées en 3 ans, sont dispensées en petit groupes par nos chefs formateurs experts hautement qualifiés.

Elles allient trois types d’enseignements :

  1. la pratique des arts culinaires ou pâtissier, allant de l’acquisition des fondamentaux à la maîtrise de techniques avancées,
  2. un socle de cours académiques dédiés au management et à l’entrepreneuriat dispensé par des professionnels du secteur,
  3. et une forte expérience en milieu professionnel grâce aux trois stages en entreprise.

Ce programme complet permettra aux jeunes Chefs d’intégrer des établissements de restauration avec de solides compétences techniques et managériales.

William Groult Ducasse
ENTRETIEN AVEC THOMAS BUCAILLE (LISAA MODE)

Entretien avec Thomas BUCAILLE, directeur de LISAA Mode.

Lisaa propose plusieurs formations « Mode » en Bachelor ou en Mastère. Pouvez-vous présenter ces formations et préciser de quelle façon y sont intégrés les enjeux du développement durable ?

Nous proposons des formations en Stylisme design de mode ainsi qu’en Fashion Business. Dans ce dernier cas nous proposons en 5eme année une option marketing et écoresponsabilité qui est l’une des seules sur l’écoresponsabilité, à Paris.

Pour ce qui est des formations initiales, nous avons revu l’ensemble des curriculums pour intégrer au sein des cours l’apprentissage des concepts et outils indispensables à la mise en œuvre d’une mode plus responsable.

Nous avons suivi une méthodologie Creativity for Positive Impact conçue avec des entreprises et des consultants à la pointe du sujet. Il nous parait essentiel d’aller au delà de la sensibilisation pour doter les étudiants d’outils pratiques et concrets : comment concevoir une veste plus facile à réparer ou à recycler par exemple…

Nous complèterons cette approche métier dès la rentrée en intégrant les recommandations du MESRI pour l’acquisition des connaissances globales en matière de RSE.

Vers quels métiers du luxe ou de la mode durable peuvent mener ces formations ?

Beaucoup de maisons se sont dotées d’équipes spécialisées dans la RSE dans les 3-4 dernières années.

Malgré ce que l’on entend, cette tendance ne va pas disparaitre car les obligations légales demeurent. Mais ma conviction est que ce sont l’ensemble des métiers, de conception, de production, de commercialisation et même de marketing qui vont se transformer pour intégrer des compétences liées à la RSE.

Pour nos étudiants, maitriser ces compétences est un gage d’employabilité.

Le Groupe Galileo Global Education (dont fait partie Lisaa) est sur la sellette depuis la publication du livre-enquête de Claire Marchal : « Le cube – Révélations sur les dérives de l’enseignement supérieur privé ». La journaliste y révèle notamment « l’obsession des managers Galileo à augmenter sans cesse les effectifs de leurs écoles, réduire leurs coûts, optimiser leurs rendements. » Renaud Jungmann (ancien directeur du développement de LISAA) est cité : « À mesure qu’il coupe les budgets, optimise les filières, diminue la sélection à l’entrée et supprime des heures, le directeur s’isole et s’enfonce peu à peu dans la dépression ». La situation décrite dans ce livre est-elle le reflet de ce que vous vivez à LISAA ?

Le directeur de Lisaa Mode Paris que je suis depuis 3 ans n’est pas du tout déprimé. Tout au contraire,  je suis enthousiasmé par notre mission de donner à nos étudiants les meilleurs chances de s’épanouir dans la vie professionnelle qu’ils se sont choisis.

Le groupe fait l’objet d’attaques injustifiées.

Pour ce qui est de l’école, elle est idéalement située, très bien équipée de matériels et de logiciels de pointes, avec des professeurs expérimentés bien encadrés par une équipe engagées.

La professionnalisation est, je le disais, notre préoccupation centrale et nous avons mis en place de nombreux dispositifs pour préparer les étudiants, depuis la préparation de leur book jusqu’à des formations sur la posture avec l’aide de nos cousins du Cours Florent.

Sur le même sujet : Les formations tirées à quatre épingles de LISAA Mode Paris

directeur Lisaa mode
ENTRETIEN AVEC KEMAL KARTAL (KEDGE BS)

Entretien avec Kemal Kartal, Directeur Adjoint Recrutement Programmes Spécialisés & PGE de Kedge Business School.

Il existe une trentaine de formations au sein de Kedge Business School. Parmi elles, quelles sont celles menant à une carrière dans le Luxe ou la Mode ?

Nous pouvons citer 4 formations :

KEDGE Bachelor : spécialisation marketing et communication du luxe

Les étudiants en L3 Bachelor sur notre campus associé de KEDGE Bayonne ont la possibilité de suivre la spécialisation Marketing et communication du luxe. Ils acquièrent des compétences en matière de Branding Strategy et des techniques de communication. Les modules sont dispensés par des experts en activité qui ont dirigé des services marketing, créé des entreprises ou participé à la mise en oeuvre de stratégies marketing innovantes dans le secteur du sport ou du luxe.

KEDGE Arts School : Bachelor Créativité & Design

Le Bachelor Créativité & Design de KEDGE est particulièrement adapté aux étudiants souhaitant intégrer l’industrie du luxe. Voici comment ce programme les prépare efficacement :

  • Un ancrage fort dans la culture et la créativité
    Le programme s’appuie sur les meilleures pratiques créatives et culturelles françaises, un atout majeur dans le secteur du luxe qui valorise l’artisanat, l’histoire et l’innovation esthétique. L’accent mis sur la créativité et le design permet aux étudiants de développer une sensibilité artistique et une capacité à imaginer des produits et des expériences uniques, caractéristiques essentielles dans l’univers du luxe.
  • Une pédagogie immersive et expérientielle
    La formation met en avant une pédagogie par l’expérimentation, essentielle pour comprendre et maîtriser les codes du luxe. Les étudiants sont encouragés à créer, expérimenter et innover à travers des projets concrets, une approche qui correspond parfaitement aux exigences des maisons de luxe en quête de talents capables de proposer des concepts avant-gardistes et différenciants.
  • Un positionnement stratégique à Marseille
    Marseille, ville où est implanté le programme, est un carrefour de cultures et d’influences artistiques, notamment dans la mode et le design. De nombreux créateurs renommés, comme Jacquemus, y puisent leur inspiration. Cet environnement dynamique offre aux étudiants de multiples opportunités pour collaborer avec des acteurs du luxe et du design.
  • Une hybridation des compétences
    L’industrie du luxe exige des professionnels capables de mêler créativité, innovation et gestion de projet. Le programme forme des profils hybrides, capables d’évoluer aussi bien dans les directions artistiques que dans le développement produit ou la stratégie de marque, en phase avec les attentes des grandes maisons de luxe.

Programme Grande Ecole : Majeure Luxury Marketing

Au sein de notre Programme Grande Ecole, les étudiants ont la possibilité de suivre une majeure en marketing du luxe.

L’objectif principal de cette majeure est d’initier les étudiants aux fondamentaux du marketing du luxe tout en leur permettant d’acquérir une expérience concrète grâce à des collaborations avec des marques prestigieuses. La formation se structure autour de cinq modules complémentaires :

  1. Le monde du luxe : compréhension des codes et des stratégies du secteur.
  2. Le luxe expérientiel : immersion dans l’expérience client et les nouvelles tendances du luxe.
  3. La gestion internationale du luxe : stratégies d’expansion et d’adaptation aux marchés mondiaux.
  4. Le luxe digital : analyse de l’impact du numérique sur les maisons de luxe.
  5. Les services de luxe : différenciation des services premium et excellence dans la relation client.

L’un des points forts de cette formation réside dans les interventions des professionnels de l’industrie. Tout au long de l’année, des cadres issus de grandes maisons comme Dior, Hermès, Chanel, Bugatti, Patek Philippe ou encore Accor viennent échanger avec les étudiants, partager leur expertise et les accompagner dans leurs projets académiques.

Ces rencontres constituent une opportunité unique d’apprentissage et de réseautage, ouvrant la voie à des stages et des opportunités professionnelles exceptionnelles.

Programme spécialisé Msc Arts (au sein de la KEDGE Arts School)

Le Programme spécialisé MSc Arts & Creative Industries Management (au sein de la KEDGE Arts School) propose une formation d’excellence pour les étudiants souhaitant intégrer les industries créatives tout en développant une expertise applicable aux secteurs du luxe et de la mode.

Un enseignement alliant théorie et pratique : Le programme combine des cours en stratégie marketing et management dans différents secteurs d’expertise (arts visuels, industries culturelles, industries du gout, services créatifs, etc.) avec des études de cas réels et des collaborations avec des entreprises du luxe.

Une immersion dans l’univers du luxe : Les étudiants participent à des événements majeurs comme les fashion weeks, des salons spécialisés et des visites d’entreprises, renforçant leur réseau et leur compréhension du marché. Le programme ouvre également les portes de stages dans des maisons de luxe et des institutions culturelles renommées, offrant une opportunité idéale pour intégrer un secteur compétitif et exigeant.

Un tremplin vers des carrières prestigieuses : Grâce aux partenariats avec de grandes maisons et au réseau Alumni de KEDGE, les diplômés accèdent à des postes clés tels que directeur marketing, chef de produit, consultant, responsable évènementiel en stratégie du luxe.

Le Programme spécialisé MSc Marketing…

…qui propose un parcours International Luxury Marketing : Develop a global marketing vision to excel in international luxury marketing.

Le parcours International Marketing & Luxury de KEDGE est conçu pour former des experts capables de comprendre et d’appliquer les stratégies globales du marketing dans le secteur du luxe.

Ce programme vise à offrir aux étudiants une approche approfondie des dynamiques du marché du luxe, en combinant des compétences en stratégie, en communication et en analyse des tendances culturelles et économiques internationales.

Un programme d’excellence en marketing du luxe : Le parcours forme des experts en stratégies globales appliquées aux secteurs du luxe, de la mode, de l’hôtellerie haut de gamme et de la gastronomie.

Un enseignement alliant théorie et pratique : Le programme combine des cours en stratégie marketing internationale, communication de marque, retail et e-commerce, avec des études de cas réels et des collaborations avec des entreprises du luxe.

Focus sur les transformations digitales : L’accent est mis sur la data, l’IA et les nouvelles technologies, avec des modules spécialisés en Data Analytics, Bootcamp IA et Coding Skills pour maîtriser les outils numériques du secteur.

Une immersion dans l’univers du luxe : Les étudiants participent à des événements majeurs comme les fashion weeks, des salons spécialisés et des visites d’entreprises, renforçant leur réseau et leur compréhension du marché.

Un tremplin vers des carrières prestigieuses : Grâce aux partenariats avec de grandes maisons et au réseau Alumni de KEDGE, les diplômés accèdent à des postes clés tels que brand manager, chef de produit, ou consultant en stratégie du luxe.

Comment ces formations intègrent-elles les enjeux du développement durable ?

Dans un secteur historiquement associé à l’exclusivité et au prestige, la question du développement durable devient aujourd’hui un enjeu incontournable.

Conscient de cette évolution, l’ensemble des programmes de KEDGE intègre pleinement ces nouvelles exigences environnementales et éthiques au sein de son programme.

1. Ethique et à la durabilité dans le luxe

Les formations liées au luxe abordent des sujets clés tels que :

  • La durabilité et la responsabilité sociale des entreprises (RSE) dans l’univers du luxe.
  • L’impact environnemental de la production de biens de luxe, notamment dans la mode, la joaillerie et l’horlogerie.
  • Les nouveaux modèles de consommation : seconde main, localisation de produits de luxe, upcycling, etc.
  • Le paradoxe du luxe durable : comment concilier rareté et production responsable ?

Ces réflexions peuvent être illustrées notamment des études de cas réels comme celui d’Hermès et sa stratégie d’éco-conception, ou encore les initiatives de marques comme Stella McCartney, pionnière de l’éthique du luxe.

2. Des interventions de professionnels engagés

Des cadres et experts du luxe viennent également partager les défis et les solutions mises en place par leur entreprise pour répondre aux attentes des consommateurs d’aujourd’hui, de plus en plus sensibles aux valeurs environnementales et sociales.

Les étudiants ont ainsi l’opportunité d’échanger avec des représentants de marques qui ont intégré l’éco-responsabilité dans leur stratégie, comme LVMH avec son programme LIFE 360, ou encore Kering, qui publie régulièrement un bilan de son impact environnemental.

3. La digitalisation comme levier d’une consommation plus responsable

Les étudiants sont également amenés à explorer comment le numérique peut favoriser une production et une consommation plus durable. Certains sujets clés incluent :

  • La blockchain et la traçabilité des matières premières, permettant d’assurer une transparence totale sur l’origine des produits.
  • Les plateformes de vente et d’achat de luxe d’occasion, en pleine expansion pour limiter la surproduction.
  • L’intelligence artificielle et la personnalisation des produits impliquent le gaspillage en adaptant l’offre à la demande réelle.

4. Un accompagnement vers des carrières dans le luxe durable

De nombreuses marques recherchent aujourd’hui des profils capables de comprendre les enjeux du développement durable et d’apporter des solutions innovantes.

Les formations de KEDGE accompagnent les étudiants vers ces nouvelles opportunités en mettant en avant les métiers liés à l’innovation responsable dans le luxe :

  • Responsable RSE pour une maison de luxe.
  • Consultant en stratégie durable pour des groupes comme LVMH ou Kering.
  • Chef de projet en éco-conception pour les marques de mode ou d’horlogerie.

Un luxe repensé pour un monde plus durable.
Aujourd’hui, le luxe ne peut plus ignorer l’impact environnemental et social de son industrie. Grâce à des programmes innovants, des partenariats avec des marques engagées et une approche pédagogique alliant théorie et pratique, KEDGE forme des professionnels capables de réconcilier luxe et durabilité. La nouvelle génération de talents du luxe devra non seulement perpétuer son héritage, mais aussi être force de proposition pour un avenir plus responsable.

De quelle façon accompagnez-vous les bacheliers que ces métiers intéressent mais qui hésiteraient quant à la formation à privilégier ?

Les conseillers formation
à KEDGE : Une équipe de collaborateurs participe à de nombreux salons partout en France pour rencontrer directement les potentiels futurs étudiants et les orienter au mieux selon leur ambition.

Par ailleurs, plusieurs Journées Portes Ouvertes et Soirées Portes Ouvertes sont organisées sur les différents campus pour informer les futurs étudiants des spécificités des programmes proposés.

Des webinars ou sessions d’information, animées par les directeurs de programme et conseillers en formation, fournissent toutes les informations nécessaires sur l’ensemble des programmes.

Un Career center
Le Career Centre est le service qui accompagne le développement personnel et professionnel de tous les étudiants de KEDGE durant leur scolarité. Les équipes proposent des outils, des évènements, des dispositifs qui permettent aux étudiants de construire leur employabilité.

Tout au long de l’année, plusieurs fois par semaine, le Career Centre propose des workshops RH ; ces workshops ont pour objectifs de faciliter la finalisation des outils de candidature, développer leur personnal branding et être performant dans la recherche de stage / alternance / emploi.

Kemal Kartal Kedge BS
ENTRETIEN AVEC ANDRÉE-ANNE LEMIEUX (IFM)

Entretien avec Andrée-Anne Lemieux, Directrice du Développement Durable de l’Institut Français de la Mode (IFM). Avec les contributions de Delphine Wharmby (Directrice Marketing et Communication) et Marie Schneier (Directrice des Relations Publiques).

En formation initiale, l’IFM propose une quarantaine de parcours pré et post-bac qui couvrent la création, le management et le savoir-faire. En quoi se distinguent-ils d’autres formations existantes ?

L’IFM propose 14 formations du CAP au doctorat qui sont à la fois très académiques, accréditées par le ministère de l’enseignement supérieur par des titres de licence ou master, et très professionnalisantes car proches des réalités d’une industrie de la mode en pleine transformation.

Notre approche pédagogique favorise l’interdisciplinarité, basée en effet sur les 3 piliers de l’école que sont le design, le management et les savoir-faire.

Nos concurrents en France et à l’international sont soit des écoles d’art soit des business schools et proposent rarement une telle combinaison de disciplines centrées à 100% sur la mode.

La grande proximité avec les entreprises de mode basées à Paris ainsi que le réseau des diplômés IFM Alumni, actif et solidaire, constituent enfin des atouts indéniables pour l’IFM, que peu d’écoles peuvent revendiquer.

Comment ces formations intègrent-elles les enjeux du développement durable ?

Grâce à la création de la Chaire d’enseignement et de recherche IFM-Kering en Fashion Sustainability, l’IFM a développé un socle d’enseignements obligatoires en développement durable et RSE pour tous nos étudiants, quel que soit leur cursus.

A titre d’exemple, cela représente 600 heures de cours délivrés l’an dernier.

L’impact environnemental est également pris en compte au sein même des enseignements, par exemple à travers des projets d’upcycling ou l’apprentissage de techniques favorisant la réduction des déchets textiles.

Au-delà de ces cours obligatoires, les étudiants de dernière année de toutes nos formations ont la possibilité de participer à un certificat supplémentaire à leur diplôme dans lequel ils conçoivent et implémentent des projets à impact en conditions réelles avec des partenaires associatifs, startups, marques, etc.

Ainsi 50 projets ont déjà vu le jour et ont été présentés dans des lieux prestigieux tels que le Sénat l’an dernier ou ChangeNow cette année.

L’IFM a noué des partenariats académiques avec d’autres établissements, en France, comme à l’étranger. Pour quelles raisons ? En quoi consistent-ils ?

Il est très important pour l’IFM de nouer des partenariats avec des institutions académiques de premier plan qui apportent une expertise complémentaire à la nôtre et permettent d’ouvrir nos étudiants à d’autres approches, d’autres savoirs, d’autres expériences.

Nous avons des partenariats au niveau doctoral avec l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, l’université Paris Nanterre et le CNAM. Nous proposons également un double diplôme avec l’ESCP Business School au niveau master et des collaborations (workshops, échanges de professeurs) avec des écoles aussi variées que l’Ensait, l’IAE de Lille ou l’école 42.

Avec plus de 50% d’étudiants internationaux venant du monde entier, l’IFM a également vocation à être tourné vers l’international.

Au niveau bachelor, nous proposons un programme d’échange d’un semestre avec certaines des meilleures universités et business schools (NYU aux USA, Esade en Espagne, l’Université du Québec à Montréal, la Fundaçao Getulio Vargas au Brésil…) ou de prestigieuses écoles de design (Politecnico di Milano en Italie, RMIT en Australie…).

Nous avons également depuis plusieurs années une collaboration avec la Bezalel Academy of Art and Design en Israël autour de projets liés au développement durable et à l’innovation.

Quels sont selon vous les métiers de la Mode et du Luxe durable amenés à se développer dans les années à venir ?

Tout d’abord, l’innovation constitue un levier central de cette transition, qu’il s’agisse de l’innovation matériau (matières recyclées, biologiques, biodégradables, cultivées en laboratoire, etc.), technologique (intelligence artificielle, blockchain, traçabilité) ou modèle d’affaires (location, seconde main, économie de la fonctionnalité, personnalisation à la demande).

Ces évolutions imposent aux designers, responsables de production, et développeurs produits d’intégrer une nouvelle vision des ressources, une approche écosystémique, et de collaborer avec des profils scientifiques, ingénieurs ou spécialistes en biomimétisme.

Par ailleurs, l’évolution rapide de la réglementation européenne (CSRD, DPP, ESPR, etc.) impose aux marques une nouvelle gestion de la donnée, exigeant des compétences en analyse de cycle de vie (ACV), reporting extra-financier, gestion des bases de données environnementales et en conformité réglementaire. Cela favorise l’émergence de profils hybrides, entre sustainability manager, data analyst et juriste spécialisé en environnement et impact social.

Enfin, le développement de la mode circulaire (revente, réparation, location, upcycling, etc.) transforme également les métiers de la vente, du marketing et de la communication. Il s’agit désormais de concevoir des expériences clients responsables, de partager des récits authentiques et transparents et de piloter des stratégies orientées vers la valeur d’usage plutôt que de possession.

En résumé, la transition durable du secteur mode et luxe ne se limite pas à la création de nouveaux métiers, mais implique surtout une transformation transversale des compétences, une culture de la collaboration et une capacité d’adaptation continue.

 Quelle serait votre définition d’un produit ou d’un service de Luxe durable ?

Un produit ou service de luxe durable est conçu pour durer dans le temps tout en limitant la pression sur les ressources naturelles et humaines. Mais il va au-delà de la simple réduction d’impact : il s’inscrit dans une logique régénérative, en contribuant à restaurer les écosystèmes et à générer des effets sociaux positifs.

Il conjugue excellence, responsabilité et désirabilité en démontrant que le luxe peut non seulement séduire mais aussi réparer, régénérer et inspirer. Cette approche globale dépasse le seul bilan carbone pour intégrer les dimensions sociales, culturelles et territoriales et replacer au cœur des préoccupations la préservation de la biodiversité, des sols et de l’eau.

Andrée-Anne Lemieux IFM

8 podcasts pour mieux comprendre le quotidien des métiers de la mode et du luxe durable

Juriste/Avocat pour la mode durable

L’avocat spécialisé en mode durable accompagne marques, créateurs et entreprises dans le respect des réglementations environnementales et éthiques. Il sécurise contrats, labels et droits de propriété intellectuelle, tout en veillant à la conformité des pratiques (sourcing, éco-conception). Son expertise protège l’image et la pérennité des acteurs engagés dans une mode responsable.

Le juriste RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) veille quant à lui à l’application des normes sociales, environnementales et éthiques au sein des organisations. Il conseille sur la conformité réglementaire, rédige des chartes et rapports ESG, et anticipe les risques juridiques liés au développement durable, renforçant ainsi l’engagement responsable de l’entreprise.

Je suis Avocate pour les acteurs de la mode responsable

par Glynnis Makoundou

Influenceur mode/luxe responsable

L’influenceuse mode éthique sensibilise et inspire sa communauté en mettant en avant des marques responsables, des matières durables et des pratiques respectueuses de l’environnement. À travers ses contenus, elle valorise une consommation plus consciente, décrypte les labels et engage le dialogue sur les enjeux sociaux et environnementaux de l’industrie textile.

Je suis influenceuse mode éthique

par Zoé Levenn | @zoelevenn

Styliste mode durable

Le styliste de mode durable conçoit des collections alliant esthétique et responsabilité. Il sélectionne des matières écologiques, privilégie des techniques de fabrication éthiques et intègre l’éco-conception à son processus créatif. Son objectif : proposer une mode tendance et engagée, limitant son impact environnemental tout en respectant les valeurs du commerce équitable.

Je suis styliste dans la mode durable

par Danielle Colle | Co-fondatrice de la marque de lingerie Bott

Entrepreneur dans la mode durable

L’entrepreneur en mode ou luxe durable crée et développe une activité qui peut allier création, innovation, éthique et responsabilité selon le secteur choisi. Sélection de matériaux durables, optimisation de la production pour réduire l’empreinte écologique, mise en place d’un modèle économique transparent… Son défi : concilier rentabilité et impact positif sur l’environnement et la société.

Je suis créatrice d'entreprise dans la mode responsable

par Asefeh Ghafourian | GUIV • La jupe sur mesure

Enseignant dans la mode durable

L’enseignant en mode durable forme les futures générations de créateurs, de stylistes et de professionnels à des pratiques respectueuses de l’environnement et de l’éthique. Il peut être amené à transmettre des savoir-faire innovants, à partager des savoirs sur les matériaux écologiques, les méthodes de production responsables et l’éco-conception… tout en sensibilisant les étudiants aux enjeux sociaux et environnementaux du secteur et en encourageant une approche critique et engagée.

Je suis enseignante en matières premières textile

par Jennifer Hagiakian

Journaliste spécialisé mode et luxe responsable

Le journaliste spécialisé en mode et luxe durable analyse les tendances liées aux transitions écologiques, à la circularité, à l’éco-responsabilité, rencontre les différents acteurs du secteur, enquête sur les innovations et décrypte la réalité des engagements des marques et des solutions mises en oeuvre. À travers articles, interviews et reportages, il sensibilise le public aux enjeux environnementaux et sociaux de ces industries.

Je suis journaliste indépendante en mode et luxe durable

par Agathe Escalier | Décousu podcast

Conseiller image dans la mode durable

Le conseiller en image (ou le personal shopper) en mode durable aide ses clients à adopter un style éthique et responsable. Il sélectionne des vêtements issus de marques éco-responsables, valorise la seconde main et conseille ses clients sur des achats durables. Son objectif : allier élégance, authenticité et respect de l’environnement dans chaque garde-robe.

Je suis personal shopper indépendante en mode durable

par Steffie Corbet | @intipersonalshopper

Consultant RSE mode durable

Le consultant RSE en mode durable accompagne les marques et les entreprises dans l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies éthiques et responsables. Il peut être amenée à évaluer l’impact environnemental d’un processus de conception et de production des produits, à optimiser les chaînes d’approvisionnement et il garantit la conformité aux réglementations. Son expertise aide les organisations à allier performance, transparence et engagement durable.

Je suis consultante RSE mode durable

par Philomène Tellaroli | Séléné Hélios

Sources & ressources

Copyright photos

  • Comité Colbert : ©davidatlanphoto
  • Courbet : ©Dmitry_Kostyukov / pmonetta
  • Julia Faure (Loom) : ©Romy Alizée
  • Visuels libres de droits : PEXELS

Remerciements

Odile Idkowiak (Odile communication)

Nota Bene

  • Les réponses reçues dans le cadre des entretiens ont été publiées en l’état, sans ajouts ni modifications.
  • LVMH, Kering, Hermès, Fashion pact, Clear fashion, ESMOD, EIDM, INSA… n’ont pas répondu à nos sollicitations.

L’une des promesses du conte de fée du capitalisme est que tout le monde peut aspirer au luxe privé. Le néolibéralisme pousse ensuite cette histoire encore plus loin, en affirmant que plus les riches accumuleront du luxe, mieux ce sera pour tout le monde. Mais, comme nous l’avons vu, il n’y a tout simplement pas assez d’espace physique ou de capacité écologique pour que tout le monde puisse vivre comme les riches. Certains possèdent des châteaux et des domaines privés, des ranchs et des îles – seulement parce que d’autres ne le peuvent pas. Si nous possédions tous des jets et des yachts privés, la planète deviendrait rapidement inhabitable. En affirmant le droit au luxe privé, les très riches privent les autres des nécessités de base.

Alors est-ce que cela signifie que personne ne devrait aspirer au luxe ? Non, au contraire, tout le monde devrait y aspirer. Pas au luxe privé, mais au luxe public. Bien qu’il n’y ait pas assez d’espace ou de ressources sur Terre pour que chacun puisse jouir du luxe en privé, il y en a assez pour offrir à chacun de magnifiques parcs, jardins, hôpitaux, piscines, plages, galeries d’art, bibliothèques, courts de tennis, systèmes de transport, terrains de jeux et centres communautaires publics. Nous devrions chacun avoir nos propres petits royaumes – nous devrions tous disposer du nécessaire en privé – mais lorsque nous voulons déployer nos ailes, nous pouvons, grâce au luxe public, le faire sans nous emparer des ressources d’autrui.

(…) Pour que tout cela arrive, il faudra décourager l’accumulation excessive de richesses privées. La philosophe belge Ingrid Robeyns a un terme pour cela : le limitarisme. Tout comme il existe un seuil de pauvreté en dessous duquel personne ne devrait tomber, elle soutient qu’il existe un seuil de richesse au-dessus duquel personne ne devrait s’élever – car ni la société ni les système terrestres ne peuvent résister davantage aux assauts de la ploutocratie.

George Monbiot & Peter Hutchinson • La doctrine invisible – L’histoire secrète du néolibéralisme • 2025 • Editions du Faubourg

couverture Doctrine invisible