Accueil > Le Mag > Formations et métiers agricoles : le bonheur est dans le pré agroécologique

De nombreuses sources d’informations permettent de découvrir les formations et les métiers de l’agriculture et de l’agroalimentaire. Mais peu d’entre elles autorisent une recherche tenant compte des aspirations « éco-responsables » des collégiens, des lycéens et des étudiants.

Pourtant, les enjeux de la transition écologique étant ce qu’ils sont, traiter le sujet des formations et des métiers agricoles peut-il s’envisager autrement que sous le prisme de la préservation du Vivant ?

Après tout, bien qu’ils soient mal connus, les métiers de la nature et du vivant séduiraient plus de 8 jeunes sur 10 de moins de 30 ans selon un sondage réalisé en juin 2022 par le CNEAP (Conseil National de l’Enseignement Agricole Privé).

éleveuse poule

Agriculture et agroalimentaire, du champ à l’assiette !

Aborder le sujet des métiers et des formations de l’agriculture et de l’agro-alimentaire n’est pas une mince affaire, tant les voies d’orientation sont pléthoriques et les modalités d’accès souvent complexes à déchiffrer.

Au sens le plus large, ce secteur de l’économie comprend les cultures, l’élevage, la chasse, la pêche et la sylviculture. La nomenclature d’activités française établit une distinction entre l’activité agricole (exploitation des ressources naturelles en vue de la production des divers produits de la culture et de l’élevage), la sylviculture et l’activité de pêche (exploitation professionnelle des ressources halieutiques en milieu marin ou en eau douce).

Définition de l’INSEE

Une difficulté renforcée par le fait que les secteurs concernés comptent des activités disparates.

Agriculteurs, arboriculteurs, horticulteurs, viticulteurs, maraichers… relèvent du travail de la terre et de la production des matières premières agricoles. Chef de produit, logisticien, responsable qualité, opérateur de production… renvoient à la transformation, à la commercialisation et à la distribution des denrées produites.

Dans la pratique, la nomenclature arrêtée comprend aussi les éleveurs, les apiculteurs et les vétérinaires. Certains petits producteurs ne se contentent plus non plus de produire pour l’agro-industrie ou la grande distribution, et assurent eux-même la valorisation, le conditionnement et la commercialisation locale de leurs produits. Et n’oublions pas les pêcheurs, les jardiniers, les paysagistes… qui font aussi partie des métiers de « l’agriculture ».

Reste que ces deux univers, agriculture et agroalimentaire, demeurent étroitement liés. Ne serait-ce que parce que l’agro-industrie transforme plus des 2/3 de la production agricole française. Ou encore que certains industriels investissent dans la production, voire même manifestent un engouement croissant pour le foncier agricole.

Concentration des exploitations et financiarisation seraient-elles les deux mamelles de la France agricole d’aujourd’hui ?

 

Agriculture et agroalimentaire : données clés*

  • Les activités agricoles occupent aujourd’hui près de la moitié du territoire français (contre 70% dans les années 50).
  • Production agricole : 75 milliards d’euros / 390 000 exploitations.
  • Agroalimentaire : près de 80 000 entreprises / plus de 355 milliards d’€ de CA (Industries, Artisanat commercial et Commerce de gros) / près de 800 000 salariés.
  • Agriculture bio : 58000 exploitations / sur 2,8 millions d’hectares / 10% de la Surface Agricole Utilisée (SAU).
  • Pêche : 1,2 milliard d’euros / 6200 navires / 7300 emplois.
  • Aquaculture : moins de 200 000 tonnes / environ 730 M€ / près de 12 000 emplois.
  • Le nombre d’exploitations agricoles est passé de 1,6 million en 1970 à 390 000 aujourd’hui.
  • Grandes cultures (blé, orge, colza, tournesol…) : sauf rares exceptions, la part de la surface traitée en produits phytosanitaires dépassent les 80%.
  • Les émissions d’ammoniac (en partie responsable de la pollution de l’air), sont dues, à 98%, par les activités agricoles.
  • Près de 90% des émissions d’azote et 70% des émissions de méthane proviennent de l’agriculture.

* Sources officielles (ministères, Agreste, Graph’Agri…)

tracteur vu du ciel

Agriculture et enjeux environnementaux : de la fourche caudine à l’assiette déséquilibrée ?

Ce sont les nombreux rapports du Giec qui l’affirment : l’agriculture industrielle est responsable du quart des gaz à effet de serre (GES). Ces derniers contribuant à un réchauffement climatique dont les effets (sécheresses, inondations…) impactent le secteur agricole et donc notre souveraineté alimentaire.

En l’espace d’un demi-siècle, les pertes de récoltes liées aux sécheresses et aux canicules ont été multipliées par 3 en Europe.

GIEC

tracteur dans un champs
Déforestation, appauvrissement des sols, baisse des ressources en eau, diminution de la biodiversité, extinction d’espèces, pollutions diverses et variées… sont étroitement liés à la façon dont sont produits, stockés, transformés, emballés, transportés, préparés les produits alimentaires que nous consommons et qui génèrent des GES.

Nous avons une double responsabilité face à la gestion des terres, nous sommes à la fois responsables de la crise climatique qui les appauvrit mais aussi d’une agriculture productiviste polluante qui les dégradent renforçant ainsi la crise climatique. Ce rapport du GIEC doit permettre à nos décideurs politiques de comprendre l’urgence à reformer notre système de production agricole pour assurer la sécurité alimentaire des années à venir.

Laurence Tubiana • 2019 • Directrice générale de la Fondation européenne pour le climat

assiette tofu

Sans compter que notre alimentation influe sur notre santé. Si, selon l’OMS, la moitié des européens sont en surpoids et le quart d’entre eux souffrent d’obésité ce n’est pas en raison d’une surconsommation de tofu.

Les problèmes associés d’allergie, de diabète, de maladies inflammatoires, de trouble du sommeil, de dépression… et de cancers, pourraient être provoqués par les aliments ultratransformés, selon l’INSERM.

Un véritable inventaire médical à la Prévert, en moins poétique !

L’agriculture devrait être la première activité de santé. Le paysan doit précéder le médecin.

Pierre Rabhi • Graines de possibles, regards croisés sur l’écologie (2005)

Avec la chute abyssale du nombre d’exploitations agricoles, l’augmentation de leur taille et la diversification du profil et du statut des exploitants, l’image d’Epinal du « paysan sur sa terre nourricière » aurait-elle vécu ?

En résumé, l’agriculture pollue l’eau à grands coups de nitrates, de phosphates et de pesticides, et les consommateurs paient non seulement leur nourriture, les aides aux agriculteurs, mais aussi la facture de dépollution.

Isabelle Saporta • Le Livre noir de l’agriculture

Dès lors, pouvait-on s’épargner l’évocation de la relation symbiotique qui existe entre agroindustrie et bouleversements environnementaux, sanitaires ou économiques dans un dossier qui touche aux formations et aux métiers que choisiront les prochaines générations dans les années à venir ?

Ces choix d’orientation méritent d’être éclairés à l’aune d’un contexte et de perspectives qui ne permettent pas toujours d’affirmer que le bonheur est dans le pré. N’en déplaisent à ceux qui pratiquent le green washing avec l’aplomb d’un Sultan dirigeant une compagnie pétrolière et se préparant à présider la COP28.

Les promoteurs d’une agriculture intensive gavée aux engrais, aux pesticides, aux herbicides et aux aides financières ciblées, ont bien compris que la préservation de leur modèle passait par l’aveu marketé d’une prise de conscience béate, suivi d’actions homéopathiques en faveur de l’environnement.
copie d'écran site web bayer france

Un stratagème qui s’apparente à cette « fabrique du consentement » qu’affectionnait le linguiste et sociologue Noam Chomsky.

Ainsi, Bayer, propriétaire de Monsanto, se targue de « contribuer aux grands enjeux de société en lien avec les Objectifs de Développement Durable des Nations Unies (…) ».

D’émouvantes déclarations d’intention aussi gouteuses qu’une lampée de Glyphosate, qui n’ont pas empêché le géant de la chimie d’être plusieurs fois condamné, aux Etats-Unis comme en France, pour les cancers provoqués par certains de ses produits.

Bien plus efficace qu’une posture climatosceptique, le green washing, que l’on peut traduire par « croyez ce que je dis, ne regardez pas ce que je fais », est devenu un sport en vogue pour tous les pollueurs de la planète.

Il existe néanmoins des formations menant à des métiers qui tendent à préserver le Vivant.

Avant de devenir un marché lucratif plébiscité par les bobos des grandes métropoles, Cédric Rabany (Les agronautes aux éditions Nouriturfu) rappelle que « l’agriculture biologique est d’abord née parmi des agriculteurs peu convaincus des recettes diffusées par l’agrochimie et pas forcément pour des raisons écologiques ou sanitaires ».

Des alternatives existent donc. Elles témoignent, poursuit l’agronome, du « besoin d’expérimenter localement, de comprendre les mécanismes du vivant, de gérer une ferme à une échelle systémique ».

Un « cadre de pensée complexe » aux antipodes du tout phytosanitaire recommandé durant les trente glorieuses par les chercheurs de l’agrochimie, et qui a montré ses limites.

biodiversité champignon

Quelles alternatives à l'agriculture intensive ?

Plusieurs modèles agricoles alternatifs coexistent. Certains sont encadrés ou certifiés, d’autres non. Les acteurs en présence (Etat, ONG, associations…) peinent d’ailleurs à s’entendre sur les critères ou les référentiels qu’il conviendrait de privilégier.

Générations Futures considère l’agroécologie comme un « concept flou » qui ne « garantit en aucun cas la non présence de pesticides », quand d’autres (FAO, Oxfam, Greenpeace…) la plébiscitent. Il n’y aurait donc pas de modèle « panacée » à proprement parler, mais une volonté commune de préserver l’environnement.

Dans cette perspective, un scénarioAfterres2050a été échafaudé à l’initiative de l’association Solagro avec le concours d’agriculteurs, de scientifiques, d’institutions et de citoyens. Parmi les différents leviers d’action envisagés, la généralisation de l’agroécologie figure en bonne place.

Agroécologie

L’agroécologie vise à promouvoir des systèmes alimentaires viables respectueux des hommes et de leur environnement. Ces systèmes engagent des modes de productions agricoles et des filières valorisant les potentialités écologiques, économiques et sociales d’un territoire. Leur développement s’appuie sur des approches transdisciplinaires réunissant professionnels du monde agricole, scientifiques, acteurs des mouvements sociaux de l’agroécologie et des politiques publiques.

Dictionnaire d’agroécologie

L’agroécologie serait le modèle d’avenir pour des institutions telles que l’ONU. En France, ce modèle est officiellement reconnu depuis 2012 dans le cadre du Plan agroécologique pour la France mis en oeuvre par le Ministre de l’agriculture de l’époque, Stéphane Le Foll. Pour Nadine Lauverjat, Déléguée Générale de l’association Générations Futures, l’agroécologie devrait « a minima reposer sur ces piliers » :

  • pas d’intrants chimiques de synthèse (tout au long de la filière);
  • pas d’OGM;
  • préserver et favoriser de la vie du sol ainsi que la ressource en eau et la biodiversité sauvage et cultivée;
  • des semences adaptées au terroir;
  • assurer le bien être animal;
  • favoriser des circuits courts et des productions de saison.

Agriculture Biologique

Système de gestion agricole et de production alimentaire qui allie les meilleures pratiques environnementales, un haut degré de biodiversité, la préservation des ressources naturelles, l’application de normes élevées en matière de bien-être animal et une méthode de production recourant à des substances et des produits naturels.

DGCCRF

Si les premiers cahiers des charges datent du début des années 70, il faut attendre une réglementation européenne de 1991 (puis 2000 pour les animaux) pour que les produits biologiques soient strictement encadrés.

Permaculture

La permaculture est un système de culture intégré et évolutif s’inspirant des écosystèmes naturels. C’est également une démarche éthique et une philosophie qui s’appuient sur 3 piliers : « prendre soin de la Terre, prendre soin des humains et partager équitablement les ressources ». La société associe généralement permaculture avec maraîchage et jardinage amateur.

Jean-Pierre Sarthou • Professeur en Agronomie et Agroécologie

Parfois associée à une pratique individuelle, la permaculture tend à reproduire le fonctionnement d’un biotope en associant plusieurs cultures dans un espace généralement restreint.

Agroforesterie

L’agroforesterie est un système dynamique de gestion des ressources naturelles qui intègre des arbres dans les exploitations agricoles et le paysage rural et permet ainsi de diversifier et maintenir la production afin d’améliorer les conditions sociales, économiques et environnementales de l’ensemble des utilisateurs de la terre.

Centre mondial d’agroforesterie

L’agroforesterie peut être utilisée dans des contextes très variés : grandes cultures, vigne, élevage, vergers…

D’autres approches peuvent être citées :

  • l’agriculture raisonnée a été inventée dans les années 90 par les tenants de l’agriculture productiviste pour répondre aux enjeux environnementaux. Dans la mesure où elle s’inscrit dans une démarche de production conventionnelle (en particulier pour l’utilisation des intrants), ce modèle n’a de « raisonnée » que le nom;
  • l’agriculture de conservation des sols, s’apparent à l’agroécologie lorsque ses référentiels spécifiques (moindre perturbation mécanique, couverture permanente du sol et diversification des cultures) sont associés à la préservation de la biodiversité.
  • l’agriculture syntropique, proche de l’agroforesterie, a été mise en oeuvre dans les années 80 sur une terre aride brésilienne par un chercheur suisse, Ernst Götsch. La méthode consiste à faire renaître un écosystème riche et viable au sein duquel une grande variété de plantes pourront être cultivées dans leurs conditions naturelles de lumière et de fertilité. Le système fonctionne sans intrants et avec peu ou pas d’irrigation.

Le changement de paradigme agricole viendra-t-il des étudiants ?

Cette volonté de penser l’enseignement, les débouchés professionnels et plus largement les grands choix de société dans une perspective de révolution éco-responsable, certains jeunes diplômés s’en sont faits l’écho à plusieurs reprises.

En 2018, plus de 30 000 étudiants avaient signé le manifeste Pour un réveil écologique. Et les étudiants de plusieurs grandes écoles (ENSAT, ESSEC, HEC…) ont fait état de leur engagement pour un monde plus juste et plus durable.

Le dernier en date et sans doute le plus médiatisé, fut celui offert par 8 étudiants d’AgroParisTech qui ont manifesté leur désir d’opter pour la « désertion » : agriculture collective et vivrière pour l’une, installation en apiculture pour un autre…

Nous sommes plusieurs à ne pas vouloir faire mine d’être fiers et méritant d’obtenir ce diplôme à l’issue d’une formation qui pousse globalement à participer aux ravages sociaux et écologiques en cours (…) Nous voyons que l’agro-industrie mène une guerre au vivant et à la paysannerie partout sur terre (…)

La vidéo complète

remise diplomes agroparistech

Formations et métiers pour une agriculture durable qui préserve le Vivant

Il n’est pas systématiquement nécessaire de suivre une formation agricole pour occuper un emploi de Community manager dans une entreprise de l’agroforesterie.

De même que les formations en droit, en communication, en journalisme, en gestion… peuvent être complétées par une poursuite d’études qui permettra d’exercer un métier lié à l’écologie, à l’environnement, à la biodiversité…

C’est dire que s’agissant du secteur de l’Agro-industrie comme des modèles alternatifs (agroécologie, agriculture bio…), les combinaisons de métiers, de formations et de secteurs sont pléthoriques.

petite fille dans un champ

Formations agricoles du collège au doctorat

En France, il existe, quelle que soit la voie choisie (Générale, Technologique ou Professionnelle), près de 3500 formations agricoles, en initiale ou en apprentissage, qui commencent dès la 4e et peuvent se poursuivre dans l’enseignement supérieur, via Parcoursup pour certaines.

Depuis la mise en place, en 2014, du premier plan « Enseigner à produire autrement » (EPA), les enjeux environnementaux couvrent désormais tous les champs de la formation agricole, quels que soient les établissements concernés (publics et privés).

Il a été renforcé en 2020 par le plan « Enseigner à Produire Autrement, pour les transitions et l’agro-écologie » (EPA2). Actant « un nouvel élan pour accompagner les transitions agro-écologiques et alimentaires sur les territoires et mobiliser l’ensemble des établissements d’enseignement agricole technique et supérieur ».

vigne raisins

Réforme du bac pro agricole

Dans la cadre de la réforme du baccalauréat professionnel, le nouveau bac pro agricole est entrée en application à la rentrée 2022. Il doit permettre aux lycéens de disposer des clés pour « agir en conscience dans une société complexe et un monde professionnel en mutation ».

Ce nouveau bac fait évoluer le tronc commun des enseignements généraux dispensés dans les 16 spécialités existantes, autour de 4 blocs de compétences :

  • construire son raisonnement autour des enjeux du monde actuel;
  • débattre à l’ère de la mondialisation;
  • développer son identité culturelle;
  • agir collectivement dans des situations sociales et professionnelles.

Les 16 spécialités du bac pro agricole :

  1. Agroéquipement
  2. Aménagements paysagers
  3. Conduite et gestion de l’entreprise agricole
  4. Conduite et gestion d’une entreprise du secteur canin et félin
  5. Conduite et gestion de l’entreprise hippique
  6. Conduite et gestion de l’entreprise vitivinicole
  7. Conduite de productions aquacoles
  8. Conduite de productions horticoles
  9. Forêt
  10. Gestion des milieux naturels et de la faune
  11. Laboratoire Contrôle Qualité
  12. Services aux personnes et animation dans les territoires
  13. Technicien conseil vente en alimentation (produits alimentaires et boissons)
  14. Technicien conseil vente en animalerie
  15. Technicien conseil vente univers jardinerie
  16. Technicien en expérimentation animale

Entretien avec Delphine Riccio

delphine riccioQuestions à Delphine Riccio, psychologue de l’Education Nationale.

Dans une tribune publiée en novembre dernier dans Le Monde, vous notez que selon l’étude PISA 2020 1 jeune européen de 15 ans sur 2 a les mêmes ambitions professionnelles qu’il y a 20 ans. Comment expliquer que des métiers en lien avec l’urgence écologique n’aient pas pris le pas sur des professions telles que médecin, avocat, vétérinaire ou chef d’entreprise, toujours autant plébiscitées ?

L’intérêt pour des métiers sont des constructions avant tout socio-culturelles, de classes, de genres à partir des représentations sociales et dans une moindre mesure seulement, en fonction des besoins de la société.

Les enfants arrivent dans une société dont l’organisation les précède et tendent à se construire sur ce modèle. Certains métiers, certaines formations sont davantage valorisées que d’autres. Il existe une hiérarchisation des métiers et des formations dans l’inconscient collectif.

Par exemple, il nous est très rare en entretien de conseil en orientation de rencontrer un jeune souhaitant devenir éboueur. A contrario, sur Parcoursup en 2021, on a observé que 11% de candidats ont fait au moins un vœu en PASS (Parcours d’Accès Spécifique Santé), filière qui conduit à médecine, dentiste, pharmacie ou maïeutique.

Pourtant le métier d’éboueur est tout aussi important que le métier de médecin. L’âge moyen des décès a considérablement reculé depuis que les rues sont nettoyées et que des poubelles ont été mises. Les médecins soignent mais les éboueurs ont permis d’éradiquer des maladies comme la peste. Cet exemple montre que les secteurs d’activités et les métiers sont porteurs de représentations sociales, dont le critère de prestige social a un impact fort sur les intérêts professionnels.

Par ailleurs, il n’y a pas de correspondance entre l’utilité sociale d’un travail et sa rémunération. Une étude de la New Economic Foundation intitulée : « Un peu riche, la réelle valeur sociale des métiers » a mis en évidence que les professions les mieux rémunérées sont aussi les plus coûteuses sur le plan social et environnemental. Publiciste en est un exemple probant. La hiérarchie des métiers est bien souvent dissociée de celle des bénéfices qu’ils rendent à la société.

Le secteur de l’agronomie et du vivant souffre d’un déficit d’image, par ses conditions de travail exigeantes.

Pendant un siècle, la société n’a fait que de dévaloriser ce secteur. Ainsi, on a développé toute une culture de la nourriture à bas coût et le budget alimentation est passé de 23,6 % en 1960 à 12,4% en 2013. De façon plus globale, le secteur scientifique plus généralement souffre d’une baisse constante d’attractivité.

Il y a des raisons culturelles comme le fait que le goût pour la technologie et les sciences se déploie d’autant plus facilement qu’on en voit l’application. Or, notre société s’est urbanisée et le travail s’est tertiarisé ; les métiers sont rendus abstraits et non visibles. Enfin, un autre frein à choisir des métiers en lien avec l’urgence écologique est la méconnaissance des questions transversales à l’écologie.

Qui peut répondre à la question : quels sont les métiers dont nous aurons besoin face à la limitation des ressources naturelles, la nécessité d’atteindre la neutralité carbone, les évolutions écologiques et le changement climatique ? La réponse est le plus souvent méconnue par les élèves et les adultes.

La façon de penser l’orientation scolaire au collège et au lycée pourrait-elle favoriser une appétence nouvelle pour les formations et les métiers traitant d’écologie, d’environnement, de biodiversité… ?

Pour développer un goût pour les formations et les métiers traitant d’écologie, d’environnement et de biodiversité, il s’agirait de développer un esprit critique sur la valeur sociale que l’on porte sur les métiers afin de redonner leur juste place à ces métiers mais aussi une distance critique avec les métiers survalorisés aujourd’hui. Il s’agit d’inscrire un lien entre le sujet, ses désirs et motivations socialement construites et les besoins de la société pour la bifurcation écologique.

Actuellement, les séances collectives en orientation en classe sont surtout des dispositifs pour que chaque individu ait les outils pour entrer dans une démarche personnelle et autonome de construction de projet.

Cela favorise la cristallisation des représentations et des stéréotypes des professions. Aujourd’hui, on accompagne les processus de choix alors que ce qui est essentiel dans un contexte de changement de paradigme, c’est d’offrir aux jeunes des temps d’exploration, de découvertes, une ouverture culturelle, une compréhension du monde du travail, de son utilité sociale, de son organisation dans la cité.

Quand nous travaillons l’orientation avec les jeunes, chaque jour, nous voyons un paradoxe agir. Alors que l’urgence climatique vient interroger notre surconsommation, lorsqu’on parle orientation et projection dans l’avenir, il s’agit avant tout d’une rêverie individuelle, celle d’un bon métier permettant d’assurer qualité de vie et liberté de consommation.

La réflexion est depuis trop longtemps déliée des problématiques collectives. Si nous voulons organiser une société plus sobre en énergie mais accroître le bonheur auquel nous aspirons tous, autrement dit si nous voulons amorcer une bifurcation écologique de notre société articulant justice sociale et climatique, il m’apparaît indispensable d’accompagner les jeunes à comprendre les impasses de notre organisation du travail et notamment en venant interroger la (sur)valorisation de certains métiers et la dévalorisation d’autres.

C’est pourquoi, alors qu’il est habituel de demander « Qu’est-ce que tu veux faire plus tard ? », je propose d’aborder la problématique de l’orientation en classe à partir de réflexions collectives autour de « Quelle société voulons-nous construire demain? » et donc quels activités et métiers sont nécessaires, font sens, Mais aussi à quoi faudrait-il renoncer ?

A travers les crises que nous vivons et les défis qui attendent les jeunes générations, il va de soi que les histoires individuelles ne pourront se penser que dans une histoire collective que nous devons tous participer à réécrire.

L’Ecole me semble le lieu propice mais les programmes sont trop chargés et il n’y a plus de temps pour la mise en place d’un accompagnement à l’orientation permettant de construire de nouvelles représentations sociales plus en cohérence avec les nécessités contemporaines de bifurcation.

Depuis quelques années, certains jeunes fraichement diplômés (AgroParisTech, HEC, ESSEC…) remettent en cause le modèle économique qui a conduit aux dérèglements qui vous préoccupent. Et ce en dépit de formations conçues pour les préparer à évoluer au sein des entreprises mises en cause. Si comme le pensait Nelson Mandela, « L’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde », ne faudrait-il pas songer à revoir la façon dont sont enseignées les matières qui touchent à l’agriculture, à l’agro-alimentaire et plus largement au Vivant ?

L’interpellation de ces jeunes a en effet suscité des questionnements au sein de la communauté éducative. De plus en plus de personnes s’interrogent sur ce que seraient les contours d’une éducation à l’anthropocène. Néanmoins les Ecoles sont souvent des lieux pour former les jeunes à intégrer un monde qui est déjà là. Si elles permettent de développer un esprit critique, ces Ecoles préparent d’abord à des compétences qui ont été pensées et développées dans notre propre modèle économique. Elles préparent à assurer un fonctionnement des systèmes actuels en les faisant évoluer.

C’est d’autant plus évident quand on voit les moyens de financement de ces écoles et les liens étroits avec le monde industriel. Cette transformation peut être nécessaire mais pas suffisante, d’où l’appel à déserter des jeunes diplômés d’AgroParisTech. Remettre en cause notre modèle économique c’est repenser nos organisations qui reposent sur une énergie à bas coût et indigente en vision systémique des impacts environnementaux, non seulement via les gaz à effets de serre, mais aussi sur les sols et la biodiversité.

Des transformations des métiers sont à venir, mais ce sont surtout des changements de l’organisation du travail et de nos modes de vie qui sont à opérer. En 2019, la part de l’agriculture dans les émissions de gaz à effet de serre sur le territoire français est estimée à 19%. Par ailleurs, en 2017, la consommation moyenne de denrées alimentaires locale des ménages des 100 plus grandes aires urbaines françaises n’est que de 2%. A contrario, chaque territoire exporte en moyenne 97% de sa production.

Il n’y a donc presque aucun lien entre ce qui est produit à un endroit et ce qui est consommé sur ce même lieu. Notre modèle, en privilégiant la compétitivité économique, a imposé aux territoires de se spécialiser pour augmenter la productivité au détriment des coûts écologiques. Ce que promeut un collectif d’AgroParisTech pour inventer une agriculture responsable et soutenable serait plutôt la mise en place d’écoles-laboratoires indépendantes soutenues par l’État.

Dans ce sens, des tiers lieux et des pôles de formation en ruralité pourraient aussi faire prochainement leur apparition.

Que conseiller à un lycéen que ces domaines intéressent mais qui peine à s’y retrouver dans la profusion de formations post-bac et de métiers existants ?

Il y a une façon traditionnelle d’opérer qui est de partir des domaines d’intérêts des lycéens – leurs matières scolaires préférées ou bien leurs secteurs professionnels favoris – et de consulter les quatre grandes catégories de formations du BAC +2 à BAC +5 : BTS, BUT, Université, Ecoles d’ingénieurs.

L’écologie est une thématique transversale à tous les secteurs, et chaque domaine de spécialité sera concerné.

On n’est pas obligé de devenir biologiste ou ingénieur en environnement pour partager cette problématique, les non-scientifiques peuvent y trouver leur place, tel que communicant, juriste ou directeur de ressources humaines.

La transition écologique c’est passer d’un système de production énergivore et polluant à un modèle plus respectueux, qu’on devra donc adapter à tout type d’entreprise.

Si l’on souhaite travailler spécifiquement dans ce domaine, écologie, développement durable, économie verte, environnement sont autant de termes utilisés dans les intitulés de formations pour tout ce qui touche à la protection de la nature dans les activités humaines.

Une autre méthode possible est de partir des problématiques des 4 secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre en 2019, en France : la part était de 31% pour les transports, 19% pour l’industrie, 19% pour l’agriculture, 17% pour les bâtiments.

Le groupe de réflexion The Shift Project, qui œuvre pour une économie libérée de la contrainte carbone préconise particulièrement une Réorganisation du Transport, pour limiter la consommation de pétrole (davantage de déplacement en trains, bus et vélos, et moins en voiture ou en avion), un redéploiement de l’agriculture, pour passer de l’agriculture actuelle, intensive et carbonée, à une agriculture extensive, avec plus de main d’œuvre et moins de pétrole, une rénovation thermique des bâtiments, pour moins consommer de chauffage ou de climatisation et un fort développement des activités de recyclage, réparation et réemploi, ce qu’ils appellent industries des objets de deuxième vie.

L’orientation écologique offre donc de multiples possibilités.

S’agissant de l’agriculture et de l’agroalimentaire, quels sont selon vous les métiers dont nous aurons le plus besoin dans les années à venir pour faire face aux enjeux du climat et de la biodiversité ?

De nombreux métiers intègrent dorénavant de nouveaux savoir-faire liés à l’environnement.

Les métiers particulièrement concernés sont ceux du conseil et de l’assistance technique en agriculture, de l’ingénierie en agriculture et environnement naturel (en rapport avec l’agriculture biologique, l’agriculture raisonnée, la maîtrise de l’énergie, la protection des sols, la production de biocarburants, etc.).

On parle aussi d’agro-ressources pour qualifier les matières issues de l’agriculture (en particulier les végétaux) qui peuvent être utilisées pour des usages autres qu’alimentaires : pour remplacer les carburants (voir plus haut) mais aussi les produits issus du pétrole ou les produits chimiques (dans l’industrie agroalimentaire par exemple).

De plus, les études en prospectives métiers révèlent que pour faire face au changement climatique, nous aurons besoin de plus de travail humain. Une agriculture utilisant moins de pétrole, nécessite plus de mains d’œuvre. On estime les besoins d’ouvriers agricoles de 500 000 postes à plus d’un million d’emplois, d’ici 2050.

Parce qu’ils sont physiques, ils sont peu attirants, il apparaît de plus en plus de formes de diversification des activités : vendre les produits de son activité d’agriculteur ou bien des formes participatives où les acheteurs participent au moment de la récolte.

Parce qu’il faut reprendre la terre aux machines, il y aura un redéploiement de la mécanique agricole de proximité.

Pour plus d’informations sur les métiers de l’agriculture et de l’agro-alimentaire, les ressources suivantes peuvent être utiles :

Quels diplômes agricoles jusqu’au Bac ?

Certificat d’Aptitude Professionnelle agricole (initiale ou apprentissage)

  • en 2 ans après la 3e;
  • 10 formations possibles en apprentissage (Jardinier paysagiste, Palefrenier soigneur, Travaux forestiers…);
  • passerelles ou poursuite d’études possibles vers un bac professionnel ou un brevet professionnel.

Brevet professionnel (BP) et Brevet Professionnel Agricole (BPA) et BPREA (responsable d’entreprise agricole) sont accessibles par la voie de l’apprentissage. Le BP est un diplôme de niveau 4, le BPA de niveau 3. Le BPREA (2 ans d’études) peut être passé à l’issue d’un CAP.

Bac professionnel de l’enseignement agricole

  • en 3 ans après le collège;
  • 24 formations possibles (Agroéquipement, Cultures marines, Conduite de productions horticoles…);
  • le Brevet d’Études Professionnelles Agricoles (BEPA) a disparu suite à la réforme du bac professionnel;
  • poursuite d’études possible, courtes (BTSA) ou longues (masters, ingénieur).

Bac Technologique et général de l’enseignement agricole

  • Techno : série Sciences et Technologie de l’Agronomie et du Vivant (STAV anciennement STAE);
  • Général : 3 enseignements de spécialité possibles en 1ère (Biologie-écologie, Mathématiques, Physique-chimie), puis 2 en terminale (SVT et Biologie/écologie en lycées agricoles);
  • poursuite d’études : BTSA, classes prépas, BUT…
culture des oliviers

Quel enseignement agricole post-bac ?

BTSA (Brevet de Technicien Supérieur Agricole)

  • diplôme bac+2 (niveau 5);
  • plus d’une vingtaine de formations possibles (Gestion et maitrise de l’eau, Agronomie-productions végétales, Aquaculture…);
  • poursuite d’études possibles en licence pro (1 an), en classes prépas (écoles d’ingénieur, vétérinaire, paysage) ou pour un second BTSA en 1 an pour se spécialiser.

BUT (Bachelor Universitaire de Technologie / remplaçant des DUT)

  • bac+3 (grade de licence);
  • 24 mentions disponibles, parmi lesquelles le BUT Génie biologique (Agronomie, Sciences de l’environnement et écotechnologies…);
  • Poursuite d’études en classe prépa ATS, école d’ingénieur…

Licence professionnelle / Bachelors / Masters

  • diplôme bac+3 (niveau 2) à bac+5;
  • nombreuses mentions existantes en licences pros (Agriculture biologique, Agronomie, Gestion des organisations agricoles et agroalimentaires…) et en masters (Biodiversité, écologie et évolution; Biologie, agrosciences; Sciences de la vigne et du vin…);
  • certains écoles reconnues par l’Etat proposent par ailleurs des Bachelors (grade de licence) et des Masters spécialisés (Bachelor Agribusiness Développement durable d’Unilasalle, Master Biodiversité Écologie Évolution de l’Institut Agro Montpellier…);
  • poursuite d’études possible en master, doctorat ou écoles d’ingénieur.

Classe préparatoire ATS (Adaptation des Techniciens Supérieurs)

  • ouverte aux titulaires d’un BTSA, d’un DUT, d’un BUT, d’une seconde ou troisième année de licence pro, elle permet de concourir aux écoles d’ingénieurs, de paysage ou de vétérinaire;
  • 6 spécialités parmi lesquelles Biologie ou Métiers de l’horticulture et du paysage préparent aux formations « agricoles »;
  • plus globalement, les CPGE (Classes Préparatoires aux Grandes Ecoles), ouvertes aux bacheliers ayant opté pour des enseignements de spécialité technologies et/ou scientifiques pourront intégrer une école d’ingénieur.
apiculteur abeilles

5 métiers pour la préservation du Vivant

Les exemples de formations et de métiers présentés ci-après sont loin d’être exhaustifs.

Ils s’inscrivent par ailleurs dans une démarche de préservation du Vivant et couvrent les secteurs de l’Agriculture Biologique, de l’agroforesterie, de la sensibilisation à l’environnement, de l’agronomie et de l’océan.

protection des oiseaux
légumes agriculture biologique

Comment devenir agriculteur biologique ?

L’agriculture biologique est un mode de production agricole excluant l’emploi de substances de synthèse, tels que les pesticides, les médicaments ou les engrais de synthèse, et d’organismes génétiquement modifiés.

INSEE

Près de 60 000 exploitations « bio », plus de 10% de la SAU, 200 000 emplois générés (+30% par rapport à une ferme non bio), leader mondial de la viticulture biologique (en surface), 13 milliards d’euros de chiffre d’affaires… comparée à ses concurrentes européennes, l’agriculture biologique française n’a pas à rougir de ses résultats.

Marginaux il y a encore un demi-siècle, les produits issus de l’agriculture biologique sont aujourd’hui consommés au moins une fois par semaine par 1 français sur 2. Malgré un cahier des charges contraignant pour l’obtention du label AB, le marché offre donc de fortes perspectives de développement.

Quelles formations suivre pour exercer un métier dans la production « bio » ?

  • Les plans EPA, la loi EGalim, le programme Ambition Bio 2022, la réforme de la voie professionnelle… sont à l’origine des évolutions voulues pour les formations « bios » de l’enseignement agricole. Ces évolutions permettent de distinguer les formations spécifiques en Agriculture Biologique, des formations ayant obtenu la reconnaissance « À orientation AB » et qui doivent répondre aux critères d’attribution mis en place.
  • Nombreux diplômes et formations disponibles quels que soient les secteurs concernés (Fruits & Légumes, Viticulture, Semences, Apiculture…) : Licence professionnelle ABCD (Agriculture Biologique Conseil et Développement); BTSA Analyse et Conduite des Systèmes d’Exploitation; CS production en AB et transformation- commercialisation, BPREA Agrobiologie, BTS Production Horticole, CAPA Métiers de l’Agriculture…

Chiffres Formation

Maraîcher & arboriculteur biologique

par Alexandre Hector | Ferme du Matet • Groupement Agricole d'Exploitation en Commun (GAEC)

Paysan herboriste

par Stephen Chong | Ferme du futur Largenté – Seysses

agroforesterie

Comment devenir Technicien forestier ?

Ouvrier en sylviculture, Garde forestier, Technicien de l’Office National des Forêts, Technicien de parcs naturels… les métiers de la forêt, de l’agroforesterie, et plus largement de la filière Bois sont nombreux et accessibles par le biais de plusieurs formations.

En France, les forêts occupent près de 20 millions d’hectares, soit le tiers du territoire métropolitain et sont en grande majorité privées. Leur capacité à stocker le carbone font des forêts de formidables régulateurs climatiques.

Une fonction mise à mal depuis plusieurs années en raison des dérèglements en cours, qui les rendent vulnérables (sécheresses, feux, insectes…). En l’espace d’une décennie, leur mortalité a progressé de moitié.

Gestion, surveillance, observation, préservation… les métiers qui touchent à la forêt ne manquent pas.

Quelles formations suivre pour devenir Technicien forestier ?

  • Autres appellations : Conseiller forestier, Gestionnaire de forêt.
  • BTSA Gestion forestière, en 2 ans après le bac (ex : Bac Pro Forêt) / une trentaine d’établissements
  • Licence Pro (Métiers des ressources naturelles et de la forêt, Gestion et commercialisation de la filière forestière…)

Métiers du bois ONF

globe terrestre dans une main

Comment devenir Chargé de mission environnement ?

Il n’existe pas à proprement parler de formations spécifiques de « Chargé de mission environnement ». Qu’il s’agisse de sensibilisation ou d’éducation à l’environnement, à l’écologie, à la biodiversité, à l’océan, à l’agriculture durable… les fonctions du chargé de mission peuvent répondre à des objectifs très différents selon les publics à sensibiliser et les organisations publiques ou privées concernées.

Les fonctions du Chargé de mission environnement requièrent de bonnes connaissances techniques et/ou scientifiques des thèmes abordés (agriculture, forêt, biodiversité, océan…), des capacités d’analyse et de synthèse, des compétences en gestion de projet et selon les prérogatives confiées, des aptitudes à la pédagogie et à la transmission d’informations.

Quelles formations suivre pour devenir Chargé de mission ?

  • Les niveaux d’études requis varient selon les fonctions confiées et les secteurs d’intervention. Les postes de Chargé de mission environnement sont le plus souvent ouverts aux titulaires d’un diplôme Bac+5 ou plus qui peuvent justifier d’expériences ou de stages dans le domaine ciblé : Chimie, biologie, urbanisme, écologie, sciences de la vie, océanographie, géologie, politiques environnementales, aménagement du territoire…
  • Toutefois, de nombreux métiers (Animateur nature ou environnement, Chargé de la protection du patrimoine naturel, Éducateur environnement par exemple) peuvent être accessibles après le bac : Bac pro GMNF (gestion des milieux naturels et de la faune); Bac techno Stav (sciences et technologies de l’agronomie et du vivant); Bachelor environnement et développement durable; BTSA DATR (Développement animation des territoires ruraux); Licence Pro MSEE (Médiation Scientifique et Éducation à l’Environnement) …

Référente sensibilisation environnementale

par Caroline Vickridge | Département du Val de Marne

ingénieur agronome

Comment devenir ingénieur agronome ?

L’agronomie est la science de l’agriculture en général – qui étudie les opérations de production et les personnes qui les mettent en oeuvre. Au sens restreint, l’agronomie est consacrée à l’ensemble des aspects de la production de végétaux. Au sens large, l’agronomie inclut des notions de zootechnie (science des pratiques d’élevage), de pédologie (science des sols), d’écologie (science des interactions des êtres-vivants avec leurs milieux), d’économie, de foresterie, etc.

Association Française d’Agronomie

Les champs d’intervention de l’ingénieur agronome peuvent couvrir, outre l’agronomie, ceux de l’agroalimentaire, de la biodiversité, de l’agroforesterie, de l’environnement, de l’eau…

Comme l’indique l’AFA, « c’est une science passionnante qui se trouve à l’interface de nombreuses problématiques (production alimentaire, gestion des ressources et des écosystèmes, impacts environnementaux de l’agriculture, …), qui mobilise des compétences d’observation, d’échanges et de modélisation notamment, et qui est en interaction constante avec nombres disciplines (géographie, sociologie, …) ».

Quelles formations de l’enseignement agricole suivre pour devenir ingénieur agronome ?

  • Autres appellations : ingénieur écologue, ingénieur agro-environnement…
  • Bac+5 (2 années préparatoires + 3 années du cycle ingénieur) : diplôme reconnu par la Commission des Titres d’ingénieurs (CTI), octroyant le grade de Master.
  • Toutes les écoles d’ingénieurs relevant du ministère chargé de l’agriculture proposent au moins une formation d’ingénieur par la voie de l’apprentissage dans les spécialités suivantes : agronomie, agriculture, horticulture, paysage, agro-industries, agroalimentaire, alimentation et santé, eau et environnement.
  • Il existe plusieurs concours (commun pour les écoles publiques et spécifiques pour les écoles privées sous contrat) permettant d’accéder aux écoles d’ingénieur agro (et de vétérinaire) en fonction de la situation de l’étudiant; les bacheliers généraux devront suivre une prépa BCPST (Biologie, Chimie, Physique et Sciences de la Terre) en 2 ans (Voie A du concours « agro »); les bacheliers Techno une prépa A TB (Voie Agriculture Technologie Biologie du concours « agro »).
  • Une douzaine d’établissements publics et privés forment les ingénieurs de l’enseignement agricole (y compris pour vétérinaire et paysagiste) / Seuls Ensaia Nancy, INP-ENSAT et Enstib dépendent du Ministère de l’Enseignement Supérieur.
  • Plus largement, de nombreuses spécialités d’ingénieur permettent d’exercer un métier en lien avec la préservation du Vivant : outre l’Agriculture, citons Bioingénierie, Forêt et génie des biosystèmes, Génie biologique, Génie environnemental, Géologie…

A noter • À défaut de suivre une formation d’ingénieur, il existe une multitude de parcours et de spécialisations débouchant sur un diplôme de Master. La mention Sciences et technologie de l’agriculture, de l’alimentation et de l’environnement (Master 3A) offre par exemple des possibilités en Agrodesign, en Ingénierie de la production alimentaire, en Gestion de la qualité des productions végétales… Celle de Biodiversité, écologie et évolution mène à des parcours tels que Agroécologie, connaissances, territoires et société, Bioévaluation des écosystèmes et expertise de la biodiversité…

Ministère de l’agricultureMonMasterConcours Agro

Entretien avec The Shift Project

visuel former l'ingénieur du XXIe siècleQuestions à Clémence Vorreux (Coordinatrice Enseignement Supérieur & Mobilité pour le think tank The Shift Project) et Léa Ovet (ingénieure agronome et intervenante bénévole pour The Shift Project).

Le rapport sur la transformation des formations de l’ingénieur est le fruit d’un partenariat entre le Shift project et des étudiants du groupe INSA. En quoi consiste-t-il ?

En 2019, le Shift a publié un rapport faisant le constat d’une carence majeure en termes de formation aux enjeux écologiques dans le supérieur en France.

Or, il est impossible d’imaginer réaliser la transition si la population n’est pas formée à comprendre de quoi il s’agit !

Ainsi, en 2020, le Shift s’est associé au groupe INSA pour présenter un cas d’étude de la manière dont un groupement d’établissements peut intégrer les enjeux socio-écologiques sur l’ensemble du parcours de formation de tous les ingénieurs.

Ce projet a été réalisé en étroite collaboration avec le corps enseignant et dans une démarche d’ouverture aux bonnes pratiques extérieures. Le tout en s’attachant à préserver la rigueur scientifique sur le fond.

Selon nous, l’enjeu de l’évolution des formations réponds à 3 objectifs distincts et complémentaires :

  1. Former des ingénieurs conscients, capables de comprendre et d’analyser la complexité croissante du monde dans lequel ils évoluent professionnellement;
  2. Répondre à la demande de sens grandissante de la part des étudiants tant dans leur formation que dans leur future carrière professionnelle;
  3. Répondre aux besoins de compétences actuels et à venir des organisations à opérer efficacement leur propre transition énergétique et écologique.

Pour cela, nous souhaitions proposer des outils définis en collaboration avec les premiers concernés (les établissements, et en particulier les enseignants), qui leur permettent de s’emparer rapidement de la problématique d’évolution des formations.

Attention, il ne s’agit pas ici de proposer un cours sur les enjeux écologiques, ou en tout cas pas seulement. Il s’agit de repenser l’intégralité des parcours à l’aune de ces enjeux pour qu’ils les intègrent de manière transversale, et que ces enjeux infusent dans tous les enseignements. Cela représente un défi considérable pour tous les enseignants, et leurs établissements.

L’équipe a d’abord cherché à comprendre le fonctionnement de chaque établissement pour établir une méthode ensemble, et dressé un état des lieux de la prise en compte des enjeux socio-écologiques dans les formations du Groupe INSA. Elle a ensuite élaboré, en co-construction avec les parties prenantes concernées, un socle commun de connaissances et de compétences pour tous les étudiants INSA (et plus largement, ingénieurs). Elle a également documenté la manière d’organiser l’intégration de ces objectifs de formation sur la durée des formations par les équipes pédagogiques.

Ce travail a été réalisé de manière ouverte et transparente, en intégrant de nombreux acteurs extérieurs au Groupe INSA. Les différents livrables, publics, offrent des outils opérationnels aux différentes parties prenantes :

S’agissant spécifiquement des études d’ingénieur menant à des métiers en liens avec l’agriculture, l’agroalimentaire ou la biodiversité, que faudrait-il transformer ?

Dans les écoles d’ingénieurs en agronomie, les formations sur le climat et la biodiversité existent, mais uniquement en « spécialisations », elles sont encore trop l’apanage de quelques étudiants ayant choisi d’en faire leur métier, et ce sont des notions effleurées dans les programmes, mais pas traitées en profondeur par tous les étudiants dans leurs socles communs de connaissances.

Les formations devraient être transformées pour que les socles communs de tous ces métiers prennent en compte l’extinction de la biodiversité et ses causes, les enjeux climat, l’adaptation au changement climatique, et laisser de la place et de la créativité aux étudiants et étudiantes pour penser la transformation de ces secteurs, qui est trop étouffée aujourd’hui.

Il est donc nécessaire d’intégrer deux temps essentiels dans les formations : la compréhension de taille du problème et des interconnections entre les limites planétaires, et comment l’agriculture est à la fois responsable mais va aussi être très impactée, puis un deuxième temps sur les leviers d’actions, en laissant de la place pour la créativité des étudiants.

Ces formations, si elles évoluent suffisamment, devraient permettre aux étudiants de se rendre compte que des ajustements à la marge et innovations technologiques ne suffiront pas, ni pour l’atténuation, l’adaptation ou l’extinction du vivant mais que nous avons besoin de changements beaucoup plus transformationnels.

Les plans EPA et EPA2 (« Enseigner à Produire Autrement, pour les transitions et l’agro-écologie ») développés depuis 2014 pour toutes les filières de l’enseignement agricole vous paraissent-ils suffisantes, voire utiles ?

Les plans EPA et EPA2, Enseigner à Produire Autrement, pour les transitions et l’agroécologie, développés depuis 2014 pour toutes les filières sont nécessaires et c’est un bon début, mais ils ne sont pas suffisants.

C’est le début d’un petit mouvement qui va dans le bon sens, et qui a l’avantage de concerner toutes les filières de l’enseignement agricole. Cependant, le développement de ces plans sont assez lent, ils ne sont pas encore suffisamment développés dans les établissements, et surtout ils ne vont pas assez loin dans l’étude des enjeux climatiques et de ces solutions, et la transformation des programmes scolaires de toutes ces filières.

L’ingénierie ne représente qu’une petite part des formations dédiées à la préservation du Vivant; à quand un rapport sur la transformation des formations post-bac plus courtes, telles que les BPA, BTSA, Licences pros… ?

Bien sûr, ce projet concerne une infime partie de la formation. Il a cependant été suivi en 2022 d’un rapport « ClimatSup Business – Former les acteurs de l’économie de demain » qui porte sur les formations en gestion, et d’un autre « ClimatSup Finance – Former pour une finance au service de la transition » sur les formations des professionnels en finance.

Le Shift n’a cependant pas la prétention de pouvoir répliquer la réflexion sur toutes les disciplines et filières, et espère surtout que ces premiers travaux vont inspirer les acteurs légitimes à répliquer la démarche.

Car effectivement, c’est bien cela l’enjeu : toutes les filières et disciplines doivent se demander comment elles sont affectées par et doivent contribuer à la transition écologique.

Et au regard de l’ampleur des bouleversements que cette transition implique pour l’ensemble de notre économie et de nos sociétés, cela revient à revisiter en profondeur chaque discipline, filière, et métier.

Le ministère de l’Enseignement supérieur planche aujourd’hui à la promotion d’un socle commun de connaissances et de compétences pour tous les étudiants (une excellente nouvelle, si les moyens sont au rendez-vous).

Nous espérons au Shift que la déclinaison de ce socle par filière suivra de près.

Le Shift, pour sa part, souhaite désormais davantage tenter d’essaimer en terme de méthode pour aider les acteurs à se mobiliser dans cette perspective. Or, si la formation initiale a encore du travail pour se mettre au diapason des enjeux écologiques, la formation continue, elle, n’est pas non plus au bout de ses peines, et peine à enclencher ces évolutions.

Le Shift souhaite donc lancer prochainement un nouveau projet avec et pour les acteurs de la formation continue, en associant son expérience de l’enseignement à celle qu’il a pu développer sur l’emploi dans le cadre du Plan de transformation de l’économie française (PTEF), afin de réfléchir avec ces acteurs à la meilleure manière pour eux d’organiser la transition de leurs propres formations.

Nous lançons également un projet massif sur la transformation du secteur agricole, dans lequel la question de la formation sera un axe central.

Dans le cadre du Plan de transformation de l’économie française, vous avez traité le sujet de l’agriculture et de l’alimentation. Certaines de vos recommandations vont dans le même sens que celles émises par l’association Solagro et son scénario Afterres 2050. Ne serait-il pas plus productif de mutualiser les actions à mettre en oeuvre ?

En effet, nous avons initié dans le cadre du PTEF un travail sur l’agriculture, mais que nous n’avons pas mené à son terme, faute de moyens dédiés. C’est pourquoi nous relançons cette année un gros projet sur ce secteur crucial en termes de décarbonation et de résilience, mais notamment de formation et d’emploi en particulier.

Et effectivement, des acteurs comme Solagro, l’IDDRI ou encore l’INRAE et d’autres ont déjà fait des analyses poussées et de grande qualité sur le sujet avec lesquelles nous sommes largement en accord. C’est pourquoi nous n’avons pas l’intention de refaire tout le travail en repartant de zéro.

Nous avons l’intention de nous inspirer largement de ces travaux, tout en nous permettant de les mettre en discussion dans notre écosystème, et de produire le cas échéant nos propres analyses.

Pourquoi ?

Déjà, parce que le point de vue du Shift sur ces sujets est attendu par notre écosystème et que nous souhaitons effectivement nous positionner pour pouvoir porter des recommandations que nous aurons pris la peine d’étudier, même si in fine, elles convergent largement avec les propositions d’autres acteurs (dont on peut rappeler qu’ils ne sont pas totalement d’accord sur tout les uns avec les autres, et c’est aussi cela qui fait la richesse de la recherche !).

D’autre part, l’intérêt du PTEF réside notamment dans sa capacité à « reboucler » afin de proposer une vision aussi complète que possible de la transition à mener et de ses implications. Rebouclage en termes d’énergie, de matière, de climat, mais aussi d’utilisation des sols, d’emploi et de compétences/formation.

Ainsi, l’absence d’une analyse poussée de l’agriculture au sein du Shift constitue un trou important dans notre raquette sur tous ces points, pour lesquels l’agriculture (et les secteurs « biomasse » dans leur ensemble) jouent un rôle déterminant.

J’ajoute que nous souhaitons d’autant plus collaborer avec les acteurs existants que nous souhaitons intégrer à notre réflexion des paramètres comme la biodiversité et l’eau, qui ne sont pas le cœur d’expertise du Shift, et pour lesquels nous aurons nécessairement besoin d’expertise complémentaire.

En revanche, ce travail réalisé, nous avons bien l’intention de joindre notre voix et notre capacité d’action à celles des autres acteurs pour avoir un maximum d’impact !

biodiversité marine

Comment devenir océanographe ?

L’océanographie regroupe l’ensemble des activités qui ont trait à la compréhension et à la modélisation des paramètres physiques de la colonne d’eau (température, salinité, transparence, …) et de leur évolution. Elle regroupe les disciplines suivantes : l’océanographie générale, les niveaux marins, la biogéochimie marine et les propriétés optiques de l’eau, la dynamique sédimentaire, les vagues et états de mer, les glaces de mer et icebergs.

Service Hydrographique et Océanographique de la Marine (shom)

La vie marine compte plus de 250 000 espèces répertoriées, disséminées sur plus de 360 millions de km2, soit environ les 3/4 du globe. Insectes exceptés, près de 9 espèces sur 10 évoluent sous les mers et les océans au sein d’écosystèmes complexes et interdépendants.

Indispensables, ces larges et profondes étendues aqueuses contribuent à la moitié de l’air que nous respirons et absorbent chaque année plus du quart du gaz carbonique émis.

Autant dire que océans et biodiversité marine sont essentielles. En raison de leur action positive sur la régulation du climat d’une part, mais aussi parce qu’ils nourrissent l’humanité et constituent une source de revenus pour de nombreuses populations (4 habitants de la planète sur 10 vivent à moins de 100km des côtes).

Les dérèglements climatiques, les pollutions des littoraux, la pêche intensive… ont des répercussions catastrophiques sur cette vie sous-marine. Hausse des températures, désoxygénation de l’eau, acidification des océans, développement d’espèces exotiques invasives… bouleversent les équilibres écosystémiques.

Un bilan auquel la France n’échappe pas. Selon l’Office Français de la Biodiversité, près du tiers des coraux ont disparu dans les Outre-mer, la moitié des eaux de surfaces des zones littorales sont en mauvais état, plus de la moitié des poissons migrateurs sont en danger…

Quelles formations pour devenir océanographe ?

  • Selon son parcours de formation et les spécialités choisies, l’océanographe (ou océanologue) peut intervenir sur des sujets variés : plaques tectoniques, biodiversité marine, ressources aquatiques, courants océaniques…
  • Exemples de métiers en lien avec l’océanographie : Biologiste ou Géologue marin, Océanographe Chimiste ou Physicien, Ingénieur en génie maritime…
  • Plusieurs formations courtes post-bac possibles : BTSA Aquaculture; BTS Maritime Pêche et Gestion de l’environnement marin, Licence Sciences de la Terre Biologie et Géologie – Option géosciences marines
  • Pour une formation longue, le réseau des Universités Marines (une quinzaine d’établissements en France) proposent quelques dizaines de Masters spécialisés. Et certaines écoles d’ingénieur ont un parcours Sciences de la mer : ENSTA Bretagne, L’institutAgro, SeaTech…

Universités MarinesOFBIfremerIntechmer

Ingénieure Océanographe

par Carole Saout-Grit | Bureau d'études Glazeo • © photo L. Berthy @LeTélégramme

Entretien avec l'association Bloom

chargée de projet association bloomQuestions au Dr. Valérie Le Brenne, Chargée de projet au sein de l’association BLOOM.

Site web de l’association Bloom

Si vous deviez résumer en quelques lignes les principales problématiques auxquelles est confronté le secteur de la mer et de l’océan, quelles seraient-elles ?

Les menaces qui pèsent sur l’océan sont multiples et leurs effets se cumulent.

Les océans se réchauffent et deviennent également de plus en plus acides en raison du CO2 atmosphérique qu’ils absorbent. Ces transformations ont d’ores et déjà des conséquences sur les équilibres physico-chimiques de l’océan et sur les écosystèmes marins.

Bien entendu, les océans subissent également de très nombreuses pollutions, en particulier celles provoquées par les déchets plastiques. Toutefois, les experts de l’IPBES sont formels: la surpêche est l’activité ayant eu le plus d’impact sur les écosystèmes marins au cours des cinquante dernières années.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes: la part des stocks de poissons surexploités est passée de 10% dans les années 1970 à plus de 35% aujourd’hui.

À mon sens, les territoires marins souffrent principalement de pressions anthropiques excessives dûes à nos activités humaines : tourisme, navigation, loisirs, alimentation (pêche), santé (pharmacologie), et ce dans un contexte géopolitique complexe poussant certains états à se tourner vers des espaces maritimes jusqu’ici peu regardés et peu exploités.

Carole Saout-Grit (ingénieure océanographe)

La façon de former les futurs professionnels de la mer et de l’océan vous parait-elle en phase avec les défis à relever ?

Les futurs professionnels de la mer et de l’océan – mais comme dans tous les domaines d’activités – doivent être formés aux enjeux écologiques. C’est absolument indispensable pour affronter les défis qui nous attendent.

Les futurs professionnels doivent bénéficier d’une solide formation scientifique afin de comprendre pleinement les enjeux auxquels nous sommes confrontés, avoir conscience de leur responsabilité et mettre en place des solutions.

Il faut sortir du prisme de l’exploitation maximale des océans et de la nature en général.

Que conseiller à un jeune que ces thématiques intéressent mais qui se demande quels métiers exercer et quelles formations privilégier ?

Les « métiers de la mer », cela recoupe une panoplie d’emplois extrêmement différents ! Il y a mille manières d’y arriver.

Je pense que l’essentiel, c’est d’abord de choisir une voie/un métier qui nous plaise, qui ait du sens (c’est-à-dire qui soit en accord avec nos valeurs personnelles) et dans lequel on pense qu’on sera utile ! Ce n’est peut-être pas très précis, mais c’est vraiment le meilleur conseil que je puisse donner !

Sources & Ressources

Remerciements

FNSEA, Confédération Paysanne, CIRAD, ANIA, Time For The Planet, L’aventure du vivant (Ministère de l’agriculture)… n’ont pas répondu à nos sollicitations.

“(…) En 1913, ce hameau de dix à douze maisons avait trois habitants. Ils étaient sauvages, se détestaient, vivaient de chasse au piège; à peu près dans l’état physique et moral des hommes de la préhistoire. Les orties dévoraient autour d’eux les maisons abandonnées. Leur condition était sans espoir. Il ne s’agissait pour eux que d’attendre la mort : situation qui ne prédispose guère aux vertus. Tout était changé. L’air lui-même. Au lieu des bourrasques sèches et brutales qui m’accueillaient jadis, soufflait une brise souple chargée d’odeurs. Un bruit semblable à celui de l’eau venait des hauteurs : c’était celui du vent dans les forêts. Enfin, chose plus étonnante, j’entendis le vrai bruit de l’eau coulant dans un bassin. Je vis qu’on avait fait une fontaine, qu’elle était abondante et, ce qui me toucha plus, on avait planté près d’elle un tilleul qui pouvait déjà avoir dans les quatre ans, déjà gras, symbole incontestable d’une résurrection. (…) Les maisons neuves, crépies de frais, étaient entourées de jardins potagers où poussaient, mélangés mais alignés, les légumes et les fleurs, les choux et les rosiers, les poireaux et les gueules-de-loup, les céleris et anémones. C’est désormais un endroit où on avait envie d’habiter. (…) Sur l’emplacement des ruines que j’avais vues en 1913, s’élèvent maintenant des fermes propres, bien crépies, qui dénotent une vie heureuse et confortable.

Les vieilles sources, alimentées par les pluies et les neiges que retiennent les forêts, se sont remises à couler. On en a canalisé les eaux. A côté de chaque ferme, dans des bosquets d’érables, les bassins des fontaines débordent sur des tapis de menthe fraîche. Les villages se sont reconstruits peu à peu. Une population venue des plaines où la terre se vend cher s’est fixée dans le pays, y apportant de la jeunesse, du mouvement, de l’esprit d’aventure. On rencontre dans les chemins des hommes et des femmes bien nourris, des garçons et des filles qui savent rire et ont repris goût aux fêtes campagnardes. Si on compte l’ancienne population, méconnaissable depuis qu’elle vit avec douceur et les nouveaux venus, plus de dix mille personnes doivent leur bonheur à Elzéard Bouffier. Quand je réfléchis qu’un homme seul, réduit à ses simples ressources physiques et morales, a suffit pour faire surgir du désert ce pays de Canaan, je trouve que, malgré tout, la condition humaine est admirable. Mais, quand je fais le compte de tout ce qu’il a fallu de constance dans la grandeur d’âme et d’acharnement dans la générosité pour obtenir ce résultat, je suis pris d’un immense respect pour ce vieux paysan sans culture qui a su mener à bien cette ouvre digne de Dieu.”

Jean Giono • L’homme qui plantait des arbres (Editions Folio)