Début mai, la décision concertée du rectorat de Paris et du Ministère de l’enseignement supérieur dut être à l’origine d’une grosse tachycardie pour les futurs postulants à la Paces. Le hasard devait décider de leur avenir d’étudiant en médecine. Alors qu’ils seraient d’ores et déjà plus de 14.000 à avoir choisi de s’inscrire en première année commune aux études de santé sur le portail APB, seuls 7500 devaient été admis en Paces dans l’une des 7 facultés parisiennes.
Tollé chez les syndicats qui déplorèrent que le tirage au sort soit substitué aux résultats scolaires.
Puis revirement embarrassé de Thierry Mandon le secrétaire d’Etat à l’Enseignement supérieur.
Je ferai tout pour que le tirage au sort pour accéder en première année de médecine n’existe jamais : il n’y a pas plus stupide comme moyen de sélection surtout pour accéder à des filières très sélectives
Etudes de médecine :
pile tu gagnes, face je perds ?
Beaucoup de bruit pour rien ? À voir, car pour quelques centaines de futurs bacheliers le problème du manque de places pourrait se poser. D’ailleurs, entre les déclarations tonitruantes de Thierry Mandon et ses aveux d’impuissance, est-il exclut que certains étudiants soient contraints de se replier sur leur second voeu ?
Formellement, par mesure de précaution, la possibilité de tirage au sort existe effectivement pour les facs de médecine qui ont depuis longtemps des plafonds d’effectifs
source : Libération
Reste qu’il ne faut pas avoir fait 10 ans d’études pour comprendre que l’équation « plus d’étudiants / autant de places disponibles » n’est pas simple à résoudre.
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Le numerus clausus en question
Il y a aujourd’hui en France plus de 280.000 médecins en activité (dont 65.000 retraités !). Soit 235 patients pour chacun d’eux. Il existe certes de fortes disparités entre les professions et bien entendu selon les régions concernées. Un souci que le Pacte territoire-santé tente de compenser depuis 2012. Notamment avec des carottes financières pour les étudiants acceptant de s’installer dans des zones démunies, le déploiement accru des Maisons de santé, le développement de la « télémédecine »…
Mais au regard des difficultés régulièrement dénoncées par le personnel soignant, en milieu hospitalier en particulier, on peut s’interroger sur l’efficacité des solutions mises en oeuvre.
Certains persistent à dénoncer les affres du « désert médical » français, d’autres affirment qu’il y aura trop de praticiens d’ici à 2025 en raison de l’arrivée de médecins formés à l’étranger (environ 25% selon l’Atlas 2015 de la démographie médicale du CNOMConseil national de l'ordre des médecins).
Alors faut-il oui ou non plus de médecins ?
Initié au tout début des années 70, le numerus clausus avait à l’origine pour double objectifs de préserver les médecins du désoeuvrement (et donc préserver aussi leur rémunération) et de limiter les dépenses de santé (en restreignant l’offre).
Au cours des décennies suivantes, cette « sélection » en amont des étudiants en médecine a évolué tel un yoyo au gré des politiques menées. Tantôt favorable à une augmentation, tantôt hostile… Une bataille de chiffres qui s’apparente à des comptes d’apothicaire, que décrit le docteur Daniel Wallach dans un ouvrage critique publié en 2011 (« Numerus clausus, pourquoi la France va manquer de médecins ») et qu’un autre médecin commente vertement sur son blog.
Devenir médecin : un sacerdoce ?
C’est à se demander si les futurs étudiants en médecine ont pris véritablement la mesure des obstacles qui les attendent. Car outre des capacités d’accueil restreintes et donc des conditions de travail contestables, un taux d’échec supérieur à 85% en fin de première année et un investissement personnel qui relève d’une préparation olympique, la suite des études de médecine peut prêter à circonspection.
Exploitation, violence verbale en stage, harcèlement et pression, au détriment de la formation
Dans les conclusions d’une enquête réalisée fin 2012 auprès de 7500 étudiants en médecine, l’ANEMF (Association Nationale des Etudiants en Médecine de France) évoquait « un certain mal être » de cette population et estimait que « la priorité n’est actuellement pas à l’harmonie entre une formation de qualité et un épanouissement personnel des étudiants ». Le moins que l’on puisse dire c’est que l’association manie l’euphémisme avec entrain.
La plupart des étudiants voient leur externat comme une forme d’exploitation, ce dernier les contraignant à réaliser de nombreuses tâches ingrates, confiées la plupart du temps par leur chef de service, sans aucun apport pédagogique.
Quand on leur demande s’ils ont « l’impression d’être exploité en stage », les étudiants en 3e année du Diplôme de Formation Approfondie en Sciences Médicales (DFASM3 – ex DCEM4) répondent « oui » à près de 70%.
Et la qualité de la formation des stagiaires ne paraît pas davantage avérée; ils sont moins de 3% à estimer « être suffisamment bien formé pour devenir un bon interne ».
Les enseignements en stage restent pauvres, et le ressenti global en est un manque de formation, tels qu’en attestent les quelques 59% d’étudiants ne se sentant pas suffisamment formés en stage.
Pour ceux qui seraient néanmoins convaincus que l’exercice de la médecine reste la plus belle activité au monde, l’Etudiant a récemment proposé un classement fort utile des universités françaises de médecine selon leur taux de réussite.
À consulter avant de se lancer dans une Paces.