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« Coach d’orientation ». Le terme est devenu à la mode et de plus en plus souvent préféré à celui de conseiller en orientation. A tel point, qu’il suscite désormais l’intérêt des journalistes en quête « d’experts » sur les sujets qui touchent à l’orientation scolaire, aux formations post-bac, à Parcoursup, aux études supérieures…

coach en orientation

Coach d’orientation, coaching étudiant, voire coaching Parcoursup

Alors qu’elles étaient le plus souvent exploitées dans un contexte professionnel, les déclinaisons pratiques du « coaching » couvrent aujourd’hui des champs élargis aux problématiques de l’éducation et de la formation.

L’action de « coacher » (emprunté à coche ou voiture) renverrait à une forme « d’entraînement » pour identifier un parcours scolaire.

Les collégiens, les lycéens et les étudiants dans l’expectative (voire les parents désemparés de ces derniers) peuvent désormais recourir à un « coach » pour clarifier une situation personnelle quelque peu opacifiée par le doute.

Objectifs affichés : permettre au jeune d’identifier la ou les voies professionnelles susceptibles de lui convenir et les formations requises pour y parvenir.

Le coaching scolaire et étudiant est un accompagnement personnalisé visant à obtenir des résultats concrets et mesurables tout au long d’un parcours d’études. Le processus de coaching vise notamment à résoudre un problème en s’appuyant sur le questionnement du coach et les compétences d’auto-analyse du client dans le but de créer une certaine autonomie vis-à-vis de ses problèmes.
source : Wikipédia

De prime abord, l’activité de « coaching d’orientation » ne serait pas sans heurter les sensibilités des Conseillers du réseau Tonavenir. Allez savoir pourquoi, l’appellation fait penser aux prérogatives du « coaching sportif » ? Il nous arrive de nous imaginer en préparateurs physiques de ces jeunes, indécis, qui souhaitent s’engager dans une course d’endurance aux études.

Certes, l’analogie est excessive. Elle témoigne cependant de notre réticence à être perçus uniquement comme des accompagnateurs exemptés de toute forme de responsabilité vis-à-vis des jeunes qui viennent nous voir.

Nous rechignons à ce que la méthode Tonavenir soit assimilée à cette forme dominante de coaching que Dominique Jaillon, psychosociologue et coach, définit comme « une conception comportementaliste et instrumentaliste de l’individu à qui sont vendus prescriptions de comportements, tests et recettes du bonheur ».

coaching

Nous ne sommes pas (que) des coachs !

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle chez Tonavenir, nous préférons le terme de Conseiller en orientation à celui de « coach en orientation ». D’aucuns diront qu’il s’agit d’une coquetterie purement formelle et que l’un est synonyme de l’autre. Pas nous. À la différence de la plupart des coachs d’orientation, qui se refusent à prendre position vis-à-vis des « coachés », le conseiller en orientation Tonavenir va bien au-delà de cette démarche préambule « d’accoucheur ».

Il s’implique, prend parti, recommande.

Bien entendu, il ne s’engage sur des filières d’études et des propositions d’établissements qu’après avoir identifié les opportunités de métiers qui s’offrent au jeune, qu’après avoir pris en compte ses souhaits personnels, qu’après avoir fait l’état des lieux de ses singularités, de ses capacités et de ses résultats scolaires.

Si le coach revendique sa filiation socratique (le « connais-toi toi-même » du célèbre penseur grec), le conseiller Tonavenir serait plutôt Nietzschéen dans son approche. « Deviens ce que tu es » serait davantage son crédo.

Même s’il va sans dire que les pistes envisagées sont sujettes à évolution et que le jeune et ses parents restent libres de suivre ou pas les conseils prodigués.

L’avis de Laurence Isaac-Sibille, Conseillère en orientation Tonavenir

J’avoue que quand on me parle de « Coach en orientation », je reste toujours très dubitative….

En effet, en tant qu’executive coach certifiée HEC-Paris, je sais que ma posture de coach exige que je reste dans le questionnement. Le coach en développement personnel ne fait que poser des questions qui permettent au/à la coachée/e de trouver ses propres réponses et solutions.

Le/la coach n’est jamais dans le conseil / consulting.

Quand des parents font appel à un/e conseiller/ère en orientation, ce n’est pas pour coacher/préparer leur enfant à de meilleures performances scolaires. Ils font appel à un/e conseiller/ère en orientation pour conseiller au mieux leur enfant afin que ce dernier trouve la meilleure formation en adéquation à ses envies, son profil, ses capacités et ses compétences.

Certes le/la conseiller/ère en orientation pose des questions à l’élève afin de mieux le connaître, afin que l’élève se connaisse mieux et puisse, ainsi, construire son projet de formation. Mais la partie questionnement n’est qu’une partie du travail de conseiller/ère en orientation.

La connaissance des métiers, des formations, la compétence de pouvoir conseiller à chaque élève un/des métier/s et le le/les cursus de formation en fonction de chaque projet et profil est la compétence principale du conseiller en orientation….

Même si quand je croise mes élèves dans la rue, je les entends dire « c’est ma coach en orientation » plutôt que de dire « conseillère en orientation », je reste persuadée que l’appelation « coach en orientation » ne met en évidence qu’une toute petite partie du métier de conseil en orientation.

De plus, comme j’aime à le rappeler, seuls les coachs certifiés par une formation reconnue, peuvent se réclamer coachs en développement personnel…

La compétence d’ouvrir tous les champs des possibles en adéquation à chaque profil et à chaque projet pour chaque élève suivi en orientation est dans le titre « Conseiller en Orientation ».

Quitte à trouver une appellation autre que conseiller/ère en orientation je préfère « Révélateur/trice de talents ».

Coach d’orientation ou conseiller en orientation ?

Dans un entretien accordé au journal Le Parisien, Patrice Huerre ne fait quant à lui aucune distinction entre coach scolaire et conseiller d’orientation.

Pour ce psychiatre spécialiste des adolescents, quel que soit le nom qu’on lui donne, le recours à ce genre de prestations tient plus du « remède à l’angoisse des parents (que d’un) véritable bien pour l’enfant ».
Il estime « qu’il n’est pas étrange de ne pas savoir ce qu’on veut devenir quand on est en 1ère ou en terminale » et qu’il « importe, à (son) avis, de respecter ce suspense ».

Et quand on l’interroge sur la dangerosité de s’en remettre à une personne extérieure pour cerner le profil d’un jeune, l’auteur de La France adolescente répond par la négative tout en estimant « qu’il vaut mieux, plutôt que de formater (le jeune) dans une voie donnée, l’aider à rester ouvert à la surprise ».

On ne peut que partager les constats relatifs à l’indécision et à la méconnaissance de soi qui prévalent à l’adolescence. Et il apparaît évident que le « formatage dans une voie donnée » n’est pas davantage une solution.

Il nous faut en revanche confesser une certaine circonspection quant au concept de « suspens de l’orientation ».

sophie laborde-balen

La pochette surprise de l’orientation scolaire :
pile médecine, face commerce ?

En premier lieu, le fait est que les conseillers d’orientation doivent composer avec le fonctionnement du système scolaire. Or le modèle en place requiert des choix d’orientation au collège, comme au lycée.

Ne serait-ce que pour des raisons pragmatiques -sélectionner une filière en fin de 3e et en fin de seconde, puis une formation post-bac en terminale- et à moins de s’en remettre au hasard pour choisir une voie d’études, il s’avère compliqué de « rester ouvert à la surprise ».

Sauf, peut-être, s’agissant de Parcoursup, qui peut en générer certaines. L’algorithme de l’Education National est taquin.

Par ailleurs, il importe d’insister sur le fait que les Conseillers en orientation Tonavenir ne « formatent » en aucune façon les jeunes qui les sollicitent. Il s’agit au contraire d’ouvrir des portes, de donner à réfléchir sur le champ des possibles, au regard des aspirations exprimées, des potentiels révélés et du parcours scolaire suivi.

Enfin, il nous semble que c’est une bien curieuse conception du libre arbitre que celle qui consiste à laisser le « suspense » (« situation dont on attend la suite avec une inquiétude très vive » selon Larousse), décider d’un avenir professionnel en lieu et place de ceux qui le vivront.

La très grande majorité des lycéens et des étudiants qui nous interroge réclament notre accompagnement. Ils aspirent à être aidés pour prendre du recul, identifier des filières dont ils ignoraient jusqu’à l’existence et faire des choix cohérents et connaître les solutions de réorientation ou de poursuite d’études qui leur sont ouvertes.

Les recommandations qui leur sont faites ne présagent en rien de ce qu’ils deviendront et de la profession pour laquelle, in fine, ils opteront. La destination importe moins que ce processus de réflexion qui mène à décider, à choisir, à agir. Mais hormis dans une salle de cinéma, le « suspense » doit-il intervenir dans une décision d’orientation ?

Assez paradoxalement, le même Patrice Huerre expliquait en 2009, en réponse à une question du site web de ELLE qui se demandait s’il fallait s’inquiéter qu’il ne soit « pas toujours facile de choisir la bonne filière quand on a à peine 18 ans et tout juste le bac en poche » :

C’est important que les parents donnent leur avis. Aujourd’hui, beaucoup d’entre eux respectent avant tout l’autonomie de leur enfant et ne veulent pas interférer dans ses choix. Or, un avis parental est un repère, vers lequel l’adolescent peut choisir d’aller ou, au contraire, de s’opposer. Dans les deux cas, il aura un moteur pour faire ses choix.

À l’époque le suspense n’était pas encore la panacée pour le pédopsychiatre. Et l’avis d’un parent, à défaut d’un tiers spécialiste d’orientation, constituait un « repère » vivement souhaitable.

Les voies de l’orientation scolaire sont impénétrables.