En novembre prochain se tiendra le salon annuel MIF Expo à Paris. Pour celles et ceux qui envisagent de devenir artisan, ce sera l’occasion de découvrir le savoir-faire « Made In France » de plus de 200 artisans venus de toutes les régions françaises.
De la préparation de crème chantilly à la confection de bijoux en cuir en passant par la sculpture sur métal ou la fabrication de braseros, les métiers de l’artisanat regorgent d’activités aussi surprenantes que variées.
Devenir artisan : des centaines d’activités et de métiers !
De prime abord, le métier d’artisan vous fait peut-être penser à menuisier, maçon, cordonnier, serrurier, boulanger, coiffeur…
En France pourtant, l’artisanat se décline en plus 250 métiers et couvre plus de 500 activités différentes.
Sertisseur, ambulancier, tailleur, orthoprothésiste, luthier, taxidermiste ou crémateur animalier… Avec son 1,9 million d’entreprises artisanales, ses 3,1 millions d’actifs et ses 300 milliards de chiffre d’affaires annuel, l’artisanat aime à se présenter comme la « Première entreprise de France » .
Pour celles et ceux qui penseraient à s’orienter, voire à se réorienter vers l’artisanat, la Chambre de Métiers et de l’Artisanat met à disposition un site dédié : artisanat.fr
Quelques-uns des métiers concernés y sont répartis en 4 secteurs (Alimentation, Fabrication, Bâtiment et Services) et sommairement présentés.
Destiné plus spécifiquement aux jeunes de 14 à 25 ans, la web-application Un métier de ouf ! permet quant à elle de découvrir une sélection de métiers en vidéos, présentés par celles et ceux qui les exercent.
Qu’est-ce qu’un artisan ?
La Chambre des métiers et de l’artisanat définit ainsi l’artisan :
L’artisan est un chef d’entreprise qui investit son savoir-faire. Son statut est juridiquement défini, il doit :
- Détenir un diplôme ou un titre homologué dans le métier pour justifier de sa qualité d’artisan ;
- Exercer une activité professionnelle de production, de transformation, de réparation ou de prestation de service relevant de l’artisanat. L’entreprise doit générer l’essentiel de son revenu de la vente de produit ou de services issus de son propre travail ;
- Etre économiquement indépendant. L’entreprise doit intervenir pour son propre compte et non pour celui d’une autre personne morale ou physique ;
- Etre immatriculé au Registre national des entreprises (RNE).
Quelles formations pour devenir artisan ?
Si elle commence dès l’entrée au collège dans le cadre du Parcours Avenir, c’est en fin de troisième qu’une première orientation va se dessiner.
Qu’il s’agisse des formations diplômantes (CAP, Bac pro, BTS…) ou des modalités d’études (lycées professionnels, CFA, Apprentissage…), de nombreuses solutions mènent à l’artisanat (passerelles, réorientation…).
Il convient préalablement de définir le ou les métiers d’artisan ou à défaut les secteurs d’activité qui intéresseront le jeune. Et de déterminer parallèlement ses objectifs (durée d’études, diplômes visés…) au regard de sa situation (niveau scolaire…).
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Avec la réforme du bac pro entamé en 2023 et effective depuis la rentrée malgré les contestations, les changements sont nombreux :
- les épreuves de terminale de certaines matières sont avancées d’un mois;
- la modification du calendrier de terminale entraîne une réduction des périodes de cours et de formation en milieu professionnel;
- à partir de mi-mai il conviendra d’opter pour une poursuite d’études dans l’enseignement supérieur ou une insertion professionnelle;
- le « chef d’oeuvre » se métamorphose en « projet » parce qu’il « permet une plus grande diversité de démarches proposées aux élèves » selon le Ministère de l’Education;
…
BTS, métiers d’art, ingénierie… en théorie, les titulaires d’un Baccalauréat professionnel peuvent donc s’inscrire sur Parcoursup afin de poursuivre dans le supérieur. Des quotas de places leur sont réservés dans les académies.
En pratique, ils ne sont que 40% à s’inscrire, majoritairement en BTS.
Les 12 mesures de la réforme des lycées professionnels
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Gratifier les périodes de stages des élèves de la voie professionnelle dès la rentrée 2023
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Permettre des enseignements aux savoirs fondamentaux en classes réduites
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Permettre aux élèves de choisir des options
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Organiser l’année de terminale en lien avec le projet de l’élève : obtenir un diplôme puis, accéder à l’emploi, soit poursuivre ses études
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Créer trois nouveaux dispositifs pour prévenir les risques de décrochage pendant et après le lycée :-Tous droits ouverts ;-Ambition emploi ;-Parcours de consolidation.
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Mieux préparer l’insertion professionnelle grâce à des partenariats extérieurs.
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Adapter l’offre de formation pour préparer l’avenir professionnel des jeunes en fixant des objectifs ambitieux :-rénover en profondeur un quart des diplômes existants d’ici la rentrée scolaire 2025 ;-démultiplier le nombre annuel d’ouvertures et de fermetures de formation.
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Passer de 4 500 à 20 000 le nombre de places en formation de spécialisation en Bac + 1 à la rentrée 2026, afin de faciliter l’insertion professionnelle des lycéens.
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Créer un bureau des entreprises dans chaque lycée.
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Permettre aux professeurs volontaires d’exercer de nouvelles missions rémunérées pour favoriser la réussite et un meilleur accompagnement des élèves.
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Accompagner une prise de fonction réussie des nouveaux chefs d’établissement de lycée professionnel.
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Permettre une nouvelle approche pédagogique du lycée professionnel autour du projet de l’élève.
Se reconvertir dans l’artisanat : et si vous deveniez un néo-artisan ?
Pour celles et ceux qui souhaitent se plonger dans l’histoire de la tapisserie du Moyen-âge à nos jours, découvrir les subtilités de la peinture sur soie, s’exercer au tricot ou s’adonner à la fabrication de bijoux fantaisies, les publications foisonnent.
Les ouvrages abordant l’artisanat sous l’angle des portraits ou des récits d’expériences sont moins nombreux.
Sur le même sujet : Artisan en contrat d’apprentissage et fier de l’être !
Comme si les activités ou les métiers de l’artisanat ne pouvaient s’envisager qu’à l’aune d’un violon d’Ingres. Comme si devenir artisan relevait d’une sorte de sacerdoce inénarrable.
« Nouveaux artisans », de Magali Perruchini, publié aux Editions Eyrolles, est l’exception qui confirme la règle.
Les 25 portraits d’artisans parisiens qui jalonnent son ouvrage témoignent de son envie de « rencontres et d’histoires de vie inspirantes ».
Ils rendent compte aussi d’un changement de paradigme au sein de cette « génération qui bouscule les codes ». Une évolution qui se nourrit des désillusions de la société de consommation et prône la quête de sens professionnel.
Parmi les membres des jeunes générations, la voie artisanale ou celle du commerce de proximité n’est plus perçue comme un choix par défaut… mais comme une voie de réussite, y compris chez les bons élèves. Ce basculement spectaculaire des aspirations est le signe que nous changeons d’époque. À mesure que la dégradation symbolique des jobs de bureau se précise, exercer un métier manuel cesse non seulement d’être honteux, mais prend même une forme nouvelle de prestige dans une économie en pleine phase de « transformation digitale », dans laquelle tout le monde manipule des informations et tape sur un clavier, mais où nul n’a l’impression de produire quoi que ce soit d’utile, ni même de tangible.
Extrait de la préface de Jean-Laurent Cassely
Chacun de ces témoignages constitue le fragment d’un quotidien de céramiste, de brasseur, de souffleur de verre, de boulanger, de mécanicien moto… qui a choisi de changer de vie.
L’apport de ces nouveaux artisans ne se limite pas pour autant à une sorte de conservatoire de la tradition. Vivant dans leur époque, ces travailleurs d’un nouveau genre réinterprètent certains métiers et en réécrivent les codes : ils savent allier le geste et la pensée, le local et l’hyperconnecté, l’authentique et le sens commercial et ils excellent à répondre aux attentes d’une génération de consommateurs éduqués eux-mêmes en pleine crise existentielle.
Durant les quelques 250 pages qui mêlent texte et photos, ces femmes et ces hommes partagent leurs raisons d’aimer, leur désir de créer, de produire et de façonner, leur façon de penser l’artisanat.
ENTRETIEN AVEC L’AUTEURE DES NOUVEAUX ARTISANS
Magali Perruchini a gentiment accepté de répondre à nos questions.
Vous vous intéressez de près aux métiers de l’artisanat depuis la création de votre blog en 2014. Après votre carrière dans la communication, avez-vous vous aussi pensé à devenir un jour artisan ?
Après ma formation en communication, j’ai effectivement travaillé plusieurs années en entreprise ainsi qu’en agence de communication en tant que responsable de projets.
Je dois bien avouer que je ne suis pas une manuelle !
J’ai décidé de quitter cette profession car elle ne correspondait pas au quotidien que j’aspirais à vivre. Comme vous l’avez dit, je nourrissais l’envie de rencontrer des gens qui font « du beau, du bon et du bien » et de les valoriser à travers l’écriture en racontant leur histoire. C’est comme ça qu’un beau jour de décembre 2014, je suis partie avec mon carnet et mon appareil photo sous le bras rencontrer mon tout premier artisan : un réparateur de parapluies, ancien cadre commercial.
Quels sont les points communs des nombreux artisans que vous avez rencontrés ? Plus particulièrement, quels ont été leurs parcours professionnels et de formation ?
Ils ont tous des parcours professionnels distincts. Dans le cadre du blog, j’ai essentiellement rencontré des reconvertis qui étaient d’anciens « cols blancs ». Ils venaient du monde de la communication et du marketing, de l’hôtellerie, du commerce, de la finance…
Ils ont tous pour point commun d’avoir fait le choix de se lancer dans l’entrepreneuriat artisanal après un premier parcours professionnel.
Leurs motivations sont multiples : l’envie d’allier compétences intellectuelles et manuelles ; le besoin de sens et d’autonomie ; le retour à une activité concrète et à la maîtrise de la chaîne de valeur de A à Z. Le tout sous-tendu par une démarche la plus éthique possible.
Dans votre ouvrage, vous présentez 25 artisans qui exercent tous leur activité à Paris. Est-ce à dire que « les artisans qui bousculent les codes » ne se rencontrent que dans la ville lumière ? Ce parti-pris éditorial ne donne-t-elle pas un reflet un peu faussé d’une tendance qui tend pourtant à se développer partout en France ?
Le phénomène des « nouveaux artisans » est particulièrement visible dans les grandes villes et notamment à Paris. Il est perceptible notamment à travers l’ouverture de commerces de proximité comme les épiciers, les bouchers et les poissonniers ainsi que les fromagers.
Il y a peu encore, ces petits commerces tendaient à disparaître et ils peuplent à nouveau nos rues. C’est un phénomène urbain mais qui bien sûr essaime de plus en plus en province. C’est la raison pour laquelle il n’est pas spécifié que les artisans sont parisiens ; leur discours et leurs motivations sont communs à tous, quel que soit le territoire.
Pour être tout à fait transparente, le choix d’artisans parisiens a été guidé par des contraintes de temps et de budget. J’espère une V2 du livre pour pouvoir emprunter les routes de France et rencontrer des artisans sur tout le territoire.
La préface des Nouveaux artisans a été rédigée par Jean-Laurent Cassely et Pierre-Yves Gomez. Qui sont-ils et pourquoi les avoir sollicités ?
Jean-Laurent Cassely est journaliste et auteur « De la révolte des premiers de la classe » (Editions Arkhê) qui traite de la reconversion dans les métiers manuels et les commerces de proximité.
Dans son ouvrage, il s’intéresse à ce phénomène de « deuxième vie professionnelle » et à l’engouement que suscite depuis quelques années le port du tablier. Chacun à notre manière, nous avons rendu visible une tendance probablement faite pour durer.
Quant à Pierre-Yves Gomez, il est Professeur à l’EM Lyon et auteur, entre autres, de « Intelligence du travail » (Editions Desclée de Brouwer).
Au delà de travailler, les artisans à qui j’ai donné la parole répondent avant tout à leur vocation, dont le mot tire ses racines de « vox », la voix qui appelle, comme le souligne M. Gomez.
Chaque témoignage donne une vision micro de ce qui se joue et je souhaitais avoir une analyse plus macro en faisant appel à l’analyse de ces deux experts. J’ai voulu cet ouvrage comme un livre-témoin sur les aspirations et les changements de mentalité qui sont à l’oeuvre dans notre société post-moderne.
Sites utiles sur les métiers et les formations de l’artisanat
- Les métiers d’art
- CNAMS (Confédération Nationale de l’Artisanat des Métiers de Service et de Fabrication)
- CGAD (Confédération Générale de l’Alimentation en Détail)
- CAPEB (Confédération de l’Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment)
- Que faire après la 3eme ?
Photo Magali Perruchini © Matthieu Suprin